Sécuriser le patrimoine de son entreprise familiale par les bonnes pratiques du family business


Droit


18 mai 2016

La vente à un tiers, la donation, la transmission aux héritiers repreneurs et/ou associés (Family Buy Out FBO) sont les stratégies de transmissions les plus souvent retenues par les dirigeants d’entreprise.

Pour autant, l’Administration fiscale peut se montrer suspicieuse à l’égard de certaines de ces opérations ; et la fiscalité y afférente peut s’avérer confiscatoire.
L’optimisation et la sécurisation de telles opérations nécessitent impérativement, bien en amont (dans l’idéal, une anticipation sur cinq ans), d’auditer et d’organiser la situation patrimoniale et fiscale du dirigeant, ainsi que celle de sa famille : procédure que nous appelons « A.T.A » (Audit-Transmission-Acquisition).

En outre, afin de tenir compte d’une fiscalité mouvante, cet au- dit organisationnel doit être suivi chaque année d’un point étape et ce, jusqu’à la réalisation défi- nitive de la transmission : il s’agit du « Family Office Business ».
Les principaux éléments à examiner sont :
- L’organisation du groupe et le fonctionnement de la société holding ;
- Le positionnement des pactes Dutreil et leur coexistence avec les pactes d’associés ;
- Le sort de l’immobilier d’entreprise ;
- La planification de la situation patrimoniale, fiscale et financière du chef d’entreprise après la mutation de ses titres.

1. L’organisation de l’entreprise
La première question à se poser est celle de savoir qui de la société holding (s’il en existe une) ou de la société opérationnelle (filiale) sera cédée.
S’il est décidé de céder les titres de la société holding, il sera nécessaire de procéder, à temps, au nettoyage des actifs toxiques pouvant empêcher le bénéfice des régimes fiscaux de faveur. Si la solution retenue est au contraire celle de la cession des titres de la société opérationnelle, l’optimisation fiscale liée à un apport-cession supposera d’anticiper l’opération soit sur deux ans (titres de participation) ou trois ans (apport partiel d’actifs) au minimum.
De même une donation avant cession devra toujours être envisagée sous l’angle de l’abus de droit et préparée à l’avance, surtout si la donation s’accompagne pour le dirigeant d’une réserve d’usufruit sur les titres donnés puis cédés.

2. Le positionnement des pactes Dutreil et leur coexistence avec les pactes d’associés
En cas de donation de titres d’une société holding, le régime de faveur lié aux pactes Dutreil pourra être invoqué si cette société holding revêt un caractère animateur. Celui-ci devra donc être examiné avec soin. Si le choix est fait d’activer cette société holding pour faciliter la transmission de ses titres, on s’évertuera, à titre de bonne pratique, à laisser s’écouler un exercice au minimum entre l’animation initiale de la société et l’opération de cession, le tout afin de pouvoir constater sur les plans comptables, juridiques, financiers et factuels son caractère animateur.
L’intérêt d’une telle activation de la société holding est triple :
- Elle permet de mettre en place un pacte Dutreil, et par là même, de profiter pleinement de l’exonération de 75% sur la valeur des titres transmis, et ce, sans avoir à extourner de cette valeur, celle des actifs sociaux non professionnels (immobilier notamment) ;
- Elle autorise, sous certaines conditions, de réputer acquis l’engagement collectif de deux ans ;
- Elle permet la mise en œuvre d’un FBO et ce, à la condition qu’un engagement collectif écrit existe depuis plus de deux ans.
En outre, un examen comparatif et attentif des pactes d’associés ordinaires et des pactes Dutreil devra être réalisé afin d’éviter les contradictions gênantes (clause de sortie conjointe, clause d’entraînement en contradiction avec les engagements de conservation de titres Dutreil...).

3. Le sort de l’immobilier d’entreprise
Si l’immobilier figure à l’actif de l’entreprise, il est usuel de l’externaliser.
Une telle opération allégera la valorisation (et donc la taxation) des titres à transmettre. Elle permettra également, en cas de transmission à titre gratuit, d’attribuer des biens « sans risques » aux héritiers non désireux de reprendre l’entreprise. Elle allègera enfin la soulte éventuellement due par l’héritier repreneur de l’entreprise au profit de ses frères et sœurs non repreneurs.
Il peut à l’inverse être envisagé de maintenir l’immobilier à l’actif de la société, voire de l’intégrer sciemment, afin d’élargir la portée de l’exonération partielle Dutreil (cf. point 2.).

4. La planification et l’anticipation de la situation patrimoniale, fiscale et financière du chef d’entreprise après la transmission des titres (vente ou donation)
L’allongement de la durée de vie et les fluctuations régulières de notre système fiscal nécessitent de mener une réflexion quant au niveau de revenus futur souhaité par le chef d’entreprise ayant cédé, à titre onéreux ou à titre gratuit, son entreprise. Cette réflexion déterminera le choix de l’enveloppe juridique et fiscale appelée à abriter le patrimoine financier du chef d’entreprise.
La rentabilité hors fiscalité de celle-ci devra être examinée avec soin. Une simulation chiffrée de l’IRPP généré, des prélèvements sociaux divers y afférents, de l’ISF à venir et des droits de succession dus sera indispensable. Celle-ci devra bien évidemment être révisée annuellement pour tenir compte du contexte mouvant de la fiscalité.
L’idéal est d’anticiper la structuration organisationnelle de l’entreprise cinq années avant sa transmission avec ensuite des points-étapes annuels jusqu’à la cession de celle-ci.
La même démarche doit être faite au sujet de la situation personnelle patrimoniale, fiscale et financière future du dirigeant d’entreprise avant et après transmission.