Réforme des retraites : ce qui va changer


Economie


8 novembre 2010

La loi portant réforme des retraites vient d’être promulguée ( J.O du 10 novembre). Revue de l’essentiel.

Relèvement de l’âge de départ à la retraite

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A partir du 1er juillet 2011, l’âge légal de départ à la retraite est reporté de quatre mois par an pour atteindre 62 ans pour les assurés nés à partir de 1956. Pratiquement, la réforme s’applique aux assurés nés à partir du 1er juillet 1951. Pour ceux-ci, l’entrée en vigueur sera progressive. Ainsi, pour une personne née à partir du 1er juillet 1951, l’âge légal deviendra 60 ans et 4 mois ; pour l’assuré né en 1952, ce sera 60 ans et 8 mois et ainsi de suite. Les 62 ans concerneront donc la génération des salariés nés à partir de 1956.

Exemples :

Un salarié est né le 1er janvier 1951. Avant la réforme, l’âge légal de départ à la retraite était 60 ans le 1er janvier 2011. Cette situation reste identique après la réforme.
Un autre salarié est né le 1er janvier 1952. Avant la réforme, l’âge légal de départ à la retraite était 60 ans le 1er janvier 2012. Il est repoussé au 1er septembre 2012 (60 ans et 8 mois)
Enfin, un dernier salarié est né le 1er janvier 1956. Avant la réforme, l’âge légal de départ à la retraite était 60 ans le 1er janvier 2016. Il est repoussé au 1er septembre 2018 (62 ans).

Les salariés qui n’avaient pas tous leurs trimestres d’assurance pouvaient jusqu’à présent faire liquider leur pension à taux plein à partir de 65 ans. Cet âge est reporté de deux ans selon les mêmes modalités que l’âge légal de départ à la retraite, pour atteindre 67 ans pour les personnes nées en 1956.

L’âge de la mise à la retraite d’office sollicitée par l’employeur reste fixé à 70 ans.

La loi améliore la prise en compte des interruptions de carrière liées à la maternité dans le calcul des droits à pension.

Maintien du départ à taux plein à 60 ans en cas de pénibilité du travail

Par exception, la loi maintient le départ à 60 ans dans deux cas : pour les salariés qui souffrent, à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, d’une incapacité permanente d’au moins 20 %, et pour ceux atteints d’un taux d’incapacité d’au moins 10 % et ce, à condition :
- d’avoir été exposés à des risques professionnels durant plusieurs années (le nombre sera fixé par décret) ;
- qu’il puisse être établi que l’incapacité est directement liée à l’exposition à ces facteurs de risques professionnels ;
- qu’une commission pluridisciplinaire ait apprécié "l’effectivité du lien entre l’incapacité permanente et l’exposition aux facteurs de risques professionnels".
Les branches professionnelles sont invitées, à titre expérimental et ce, jusqu’au 31 décembre 2013, à conclure un accord créant "un dispositif d’allègement ou de compensation de la charge de travail des salariés occupés à des travaux pénibles". Cet allègement de la charge de travail peut prendre la forme d’un passage à temps partiel ou l’exercice d’une mission de tutorat. La compensation se fera sous la forme d’une prime ou de jours de repos en plus.
Deux pénalités éventuelles à la charge des entreprises
On connaissait déjà la pénalité de 1% pour les entreprises qui n’auraient pas mis en œuvre un accord « senior ». La loi crée deux obligations nouvelles en l’absence desquelles l’entreprise serait soumise à une pénalité :
- accord relatif à la prévention de la pénibilité : les entreprises ou groupes d’au moins 50 salariés employant une proportion (fixée par décret) de salariés exposés à des facteurs de risques professionnels devront, avant fin 2011, signer un accord ou mettre en œuvre un plan d’action relatif à la prévention de la pénibilité (les entreprises de 50 à 299 salariés couvertes par un accord de branche sur la pénibilité seront, cependant exonérées de cette pénalité). Cet accord, dont la liste des thèmes obligatoires reste à définir par décret, sera renégocié au moins tous les trois ans. La pénalité de 1% constitue un plafond. Son montant sera modulé en fonction des efforts consentis par l’entreprise en faveur de la prévention de la pénibilité ;
- accord sur l’égalité hommes/ femmes : les entreprises d’au moins 50 salariés qui ne seront pas fin 2011 couvertes par un accord sur l’égalité professionnelle ou par un plan d’action visant à réduire l’écart salarial entre les hommes et les femmes seront également redevables d’une pénalité maximum de 1 % de leur masse salariale brute. Le montant réellement acquitté sera fixé par l’administration suivant des paramètres fixés par décret. Ce plan d’action doit recenser, les objectifs et les mesures prises au cours de l’année écoulée en vue d’assurer l’égalité professionnelle, les objectifs de progression prévus pour l’année à venir, la définition qualitative et quantitative des actions permettant de les atteindre ainsi que l’évaluation de leur coût. Ce plan pourra être établi dans le cadre des rapports que l’employeur transmet chaque année au comité d’entreprise (pour les entreprises de plus de 300 salariés, le rapport de situation comparée des femmes et des hommes dans l’entreprise et pour les entreprises de 50 à moins de 300 salariés, le rapport sur la situation économique de l’entreprise).
Aide à l’embauche des seniors
La loi crée le principe d’une aide pour les entreprises qui embauchent, en contrat à durée déterminée d’au moins six mois ou en CDI, des chômeurs de 55 ans et plus. Un décret doit prévoir le montant et la durée de versement de cette aide (selon les rapports parlementaires, elle devrait être limitée à douze mois et représenter 14 % du salaire brut dans la limite du plafond de la sécurité sociale). L’aide ne pourra être accordée lorsque l’entreprise a procédé à un licenciement économique dans les six mois précédents sur le poste pour lequel est prévue l’embauche, ni lorsqu’elle n’est pas à jour de ses obligations déclaratives et de paiement à l’égard des organismes de recouvrement des cotisations et des contributions de sécurité sociale ou d’assurance chômage.

Il faut rappeler qu’en 2009, le taux d’emploi des 55 à 64 ans était de 38,9% en France, contre 56,2% en Allemagne, 57,5% au Royaume-Uni et 44,1% en Espagne.

Modifications relatives à l’épargne salariale

Lorsque l’entreprise a mis en place un plan d’épargne retraite collectif (Perco), la participation doit être affectée pour moitié à ce plan d’épargne si le salarié ne demande pas son versement immédiat et s’il ne précise pas où il souhaite affecter sa participation. Les modalités d’information des salariés seront déterminées par décret.
Dossier médical en santé au travail et fiche individuelle d’exposition
Afin d’améliorer la traçabilité individuelle de l’exposition des salariés aux facteurs de risques professionnels, la loi crée un "dossier médical en santé au travail" constitué par le médecin du travail afin de retracer "dans le respect du secret médical les informations relatives à l’état de santé du travailleur, aux expositions auxquelles il a été soumis, ainsi que les avis et propositions du médecin du travail". Ce dossier ne pourra être communiqué qu’au médecin de son choix, à la demande de l’intéressé. En cas de risque pour la santé publique ou à sa demande, le médecin du travail le transmet au médecin inspecteur du travail. Ce dossier peut être communiqué à un autre médecin du travail dans la continuité de la prise en charge, sauf refus du salarié. Le travailleur, ou en cas de décès de celui-ci toute personne autorisée, peut demander la communication de ce dossier.
Par ailleurs, une fiche individuelle d’exposition à des facteurs de risques sera tenue dans l’entreprise, pour chaque travailleur exposé à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels, à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif, ou certains rythmes de travail susceptibles de laisser des traces durables identifiables et irréversibles sur sa santé. Une copie de cette fiche est remise au salarié à son départ de l’établissement, en cas d’arrêt de travail excédant une durée, fixée par décret, ou de déclaration de maladie professionnelle.


François Taquet