Revenu universel : une idée qui fait son chemin... doucement


Décryptage


26 janvier 2017

Les candidats à la présidentielle évoquent tous l’instauration d’un revenu "universel", "d’existence", "décent" ou d’une "allocation sociale". Mais quant à passer à l’action...

Comme une évidence

Dans un pays où il y a 3,5 millions de personnes inscrites à Pôle Emploi en catégorie A, et autant qui sont hors du marché du travail et pas indemnisées, la question du "revenu universel" ou "revenu d’existence" est venue s’inviter comme une évidence dans la campagne des présidentielles. Ouvrant un débat passionné entre les "pour" et les "anti".

La gauche partagée

Le clivage dépasse la frontière traditionnelle entre la gauche et la droite.
Le débat des primaires de gauche a montré que Benoît Hamon et Jean-Luc Bennahmias défendent cette idée alors que Vincent Peillon, au nom de la valeur travail, s’y oppose catégoriquement. Manuel Valls, de son côté, préfère parler de "revenu décent". Emmanuel Macron (de gauche ?) trouve l’idée intéressante mais ne se mouille pas plus, tandis qu’Arnaud Montebourg est vent debout contre cette proposition.

À droite

À droite, Nathalie Kosciusko-Morizet y était plutôt favorable. Alain Juppé, pas opposé sur le principe, demandait "le temps de la réflexion". Quant au vainqueur de la primaire François Fillon, il n’emploie pas le terme de "revenu universel" mais propose de fondre les diverses aides publiques en une seule et même "allocation sociale", ce qui revient à peu près au même.

Simplifier

En proposant un revenu universel, décent ou social, plutôt que l’empilement d’aides (allocations familiales, APL, RSA etc.) les partisans veulent responsabiliser les bénéficiaires en leur faisant gérer eux même un budget mensuel. Les contrôles seraient également plus faciles et efficaces.

La "valeur travail"

Une part importante de la société est opposée à une telle mesure.
Au nom de la responsabilité, de la valeur du travail qui seraient battues en brèche, sur le risque d’installer durablement et en particulier les jeunes dans un assistanat institutionnalisé.

Le coût

Difficilement chiffrable en l’état, puisque le montant de ce revenu n’est pas fixé et qu’il supprimerait des aides déjà versées. Les projections des candidats favorables tablent sur un coût neutre tandis que Montebourg parle de... 300 milliards !

Tests grandeur nature

Alors que les Suisses ont rejeté par référendum en 2016 l’idée d’un "revenu de base inconditionnel ", au même moment la Finlande et les Pays-Bas ont lancé des expérimentations qui sont en cours. En France, le département des Landes s’est porté candidat pour un test grandeur nature.

Une idée pas mûre

On voit bien que les "politiques", qui ont un œil sur les comptes de l’État, ont décidé de faire bouger les lignes des aides versées aux plus précaires, chômeurs, jeunes et personnes âgées ou isolées. Mais que le pas à franchir est large, tant pour des raisons économiques - qui financera ? - que politiques. Le débat reste ouvert... mais avec 7 millions de personnes pauvres en France (Insee) on ne pourra pas encore tourner longtemps autour du pot si l’on veut éviter une explosion sociale.


Jean-Michel Chevalier