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Information sur les modifications sur la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat

La loi d’urgence sanitaire en date du 23 mars 2020 (JO du 24 mars 2020) a donné la possibilité au gouvernement de modifier par ordonnances les modalités de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, dite « prime Macron ». Pour rappel, cette prime avait été renouvelée par la loi du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 (article 7), mais son versement était soumis à l’existence d’un accord d’intéressement couvrant la période de versement de la prime. L’ordonnance du 1er avril 2020, publiée au Journal Officiel le 2 avril 2020 modifie donc, seulement en partie, la loi de financement précitée : les parties non modifiées restent donc complètement applicables ainsi que la circulaire DSS/5B/2020/11 du 15 janvier 2020 prise pour son application. Le point avec notre partenaire Médiation Conseil.

Les points modifiés concernent principalement :

1 - Le versement d’une prime d’un montant différent selon que vous êtes dotés ou non d’un accord d’intéressement à sa date de versement. Le versement d’une prime exceptionnelle sans accord d’intéressement est donc possible ;

2 - La possibilité de moduler le montant de la prime à verser en rajoutant un nouveau critère reposant sur la prise en compte des conditions de travail durant l’épidémie, afin de récompenser « les salariés au front » ;
 Le report de la date limite de mise en place (par accord d’entreprise ou DUE) et de versement de la prime au 31 août 2020 ;

3 - Le report de la date de conclusion de l’accord d’intéressement au 31 août 2020 (au lieu du 30 juin), lequel doit ensuite être déposé dans les 15 jours suivants.

Voici exposées les règles désormais applicables

Salariés concernés

Si vous mettez en œuvre cette prime (qui n’est qu’une possibilité et non une obligation), elle devra être versée à tous les salariés liés à votre entreprise par un contrat de travail, aux intérimaires mis à votre disposition :
 Soit à la date de versement de cette prime ;
 Soit à la date de dépôt de l’accord d’entreprise ;

Ou encore à la date de la signature de la décision unilatérale (la date de décision unilatérale et la preuve de cette date sont donc essentielles).

L’acte fondateur (DUE ou accord collectif) devra donc expressément indiquer le critère de présence que vous retenez parmi les trois dates d’appréciation énoncées ci-dessus.

Sont donc concernés tous les salariés à temps partiel, les salariés en CDI, les CDD, les apprentis et mandataires sociaux disposant d’un contrat de travail et les intérimaires mis à disposition de votre entreprise.

Concernant les salariés intérimaires, vous devez obligatoirement informer l’entreprise de travail temporaire à laquelle vous faites appel car c’est elle qui devra verser la prime aux personnes concernées. Dans ce cadre, vous devrez transmettre à l’entreprise utilisatrice votre accord d’entreprise (avec justificatif de la date de son dépôt) ou votre Décision Unilatérale, l’identité des salariés intérimaires concernés, le montant à verser à chacun d’eux ainsi que la date de versement à votre personnel permanent.

Montant maximal de la prime – 2 plafonds différents

Pour pouvoir être totalement exonérée de prélèvements fiscaux et sociaux, la prime versée ne doit pas excéder (par salarié) :
 1.000 euros hors accord d’intéressement : La partie de prime qui excède cette limite est réintégrée dans l’assiette de l’ensemble de ces cotisations, contributions, impôts et taxes ;
 2.000 euros si vous mettez en œuvre un accord d’intéressement déjà existant ou en voie d’être conclu : La partie de rémunération qui excède cette limite est réintégrée dans l’assiette de l’ensemble de ces cotisations, contributions, impôts et taxes ;
 2.000 euros pour les associations et fondations reconnues d’utilité publique ou d’intérêt général même sans conclure d’accord d’intéressement (Ord. n° 2020-460, 22 avr. 2020, art. 19).

ATTENTION, comme auparavant, la prime n’est exonérée que pour les salariés ayant perçu sur les 12 mois précédant son versement une rémunération inférieure à 3 fois le SMIC annuel, calculée en fonction de la durée du travail prévue au contrat (à proratiser en cas de temps partiel ou pour les salariés qui ne sont pas employés sur toute la période).
 Il est donc possible d’exclure du versement de la prime les salariés dont la rémunération excède un certain plafond de rémunération mais il faut prévoir ce critère dans votre accord collectif ou dans votre décision unilatérale.

Accord d’intéressement

Dans l’hypothèse où vous souhaiteriez procéder par accord d’intéressement, trois cas de figure peuvent se présenter :
 si vous êtes déjà couverts par un accord d’intéressement et que vous avez déjà versé une prime exceptionnelle en 2020 : vous pourrez verser une deuxième prime et le plafond d’exonération de 2 ?000 € s’apprécie en cumulant les montants des deux primes ;
 si vous êtes déjà couverts par un accord d’intéressement mais n’avez pas versé de prime exceptionnelle en 2020 : vous pouvez verser une prime exonérée dans la limite de 2 ?000 € ;
 si vous n’êtes actuellement pas couverts, mais que vous concluez un accord d’intéressement d’ici le 31 août 2020 (et vous le déposez ensuite dans le délai de 15 jours suivant sa conclusion) : vous pourrez verser une prime exonérée dans la limite de 2 ?000 €.

Vous avez désormais jusqu’au 31 août pour conclure votre accord d’intéressement :
Il peut être conclu pour une durée minimale d’un an (3 ans maximum) ;
Par dérogation, l’accord d’intéressement ouvre droit aux exonérations, y compris s’il est conclu à compter du premier jour de la deuxième moitié de la période de calcul suivant la date de sa prise d’effet.

Par exemple, une entreprise dont l’exercice fiscal est l’année civile pourra conclure un accord d’intéressement (d’une durée de 1 à 3 ans) jusqu’au 31 août 2020 pour couvrir l’ensemble de l’année 2020. Toutefois, cette exception n’est applicable qu’aux entreprises qui auraient dû conclure leur accord d’intéressement en 2020 selon les règles de droit commun. Ainsi, une entreprise ayant un exercice courant du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020 ne pourra conclure un accord sur cette base puisque, selon les règles de droit commun, l’accord d’intéressement aurait dû être conclu au plus tard le 31 décembre 2019.
Cet accord doit couvrir la période de versement de la prime.

Pour rappel, le versement effectif d’une prime d’intéressement n’est pas une condition pour pouvoir attribuer une prime « Macron », le dispositif d’intéressement étant par nature aléatoire.

N’oubliez pas que l’accord d’intéressement n’est pas en lui-même suffisant pour mettre en place la prime exceptionnelle : vous devrez procédez par DUE ou accord d’entreprise pour en fixer les modalités et conditions de versement.

Principe de non-substitution

En aucun cas le versement de cette prime ne peut remplacer et se substituer aux versements de primes résultant de votre convention collective, des contrats de travail de vos salariés, d’un usage que vous avez mis en place, ou encore de primes résultant d’une décision unilatérale. Elle ne peut pas non plus remplacer le versement de l’intéressement pas plus que le versement de la participation.
Cette prime se rajoute aux éléments de rémunération existants déjà au sein de votre entreprise et ne peut pas se substituer à eux.

Comme l’indique la circulaire interministérielle précitée, cette prime ne peut se substituer ou venir en diminution des primes au titre des résultats de l’entreprise ou du salarié, des primes de performance liées à l’évolution de l’activité de l’entreprise ou de certains des salariés et habituellement versés à quelque moment de l’année que ce soit, même lorsque leur montant n’est pas déterminé à l’avance. Toutefois, dans ce cas, la part de la prime exceptionnelle qui excède la moyenne, par salarié, du niveau de prime obligatoire ou d’usage versé au titre de l’année précédente peut être éligible à l’exonération dans la limite d’un montant global de prime de 1 000 €.

Modulation du montant de la prime – ajout d’un nouveau critère

Pour rappel, le montant de la prime pouvait déjà être modulé entre les salariés en fonction des critères suivants appréciés sur 12 mois :
 la rémunération,
 le niveau de classification,
 la durée du travail,
 la durée de présence effective au cours des 12 mois précédant le versement de la prime. Toutefois, pour que la prime soit éligible à l’exonération, il n’était déjà pas autorisé d’en réduire le montant à raison des congés mentionnés au chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail, c’est-à-dire les congés au titre de la maternité, de la paternité et de l’accueil ou de l’adoption d’un enfant, ainsi que le congé parental d’éducation, les congés pour la maladie d’un enfant et les congés de présence parentale. (point 3.3 de la circulaire DSS /5B/2020/11 du 15 janvier 2020).

Toutes les autres absences devraient donc pouvoir être exclues à la condition que la DUE le prévoit et que toutes les absences ( hors celles visées ci-dessus) soient traitées de la même façon.

L’ordonnance autorise la prise en compte d’un nouveau critère de modulation, qui se rajoute aux autres : celui des conditions de travail liées à l’épidémie de covid-19 afin de donner la possibilité de récompenser plus spécifiquement les salariés ayant travaillé pendant l’épidémie de covid-19.

L’ordonnance n’a pas modifié le principe selon lequel tous les salariés devaient en bénéficier (sous réserve de l’exclusion résultant d’un plafond de rémunération). En effet, jusqu’à présent qu’il s’agisse de la PEPA versée en 2019 que de la première circulaire de janvier 2020, il était clairement indiqué que si un critère de modulation pouvait faire varier le montant de la prime il était exclu qu’il conduise à priver de prime un salarié qui y était éligible (instr. DSS/5B 2020-11 du 15 janvier 2020 pour la PEPA 2020, Q/R 3.7)

Partant de ce principe, on pouvait donc en déduire qu’il n’était pas possible d’exclure des salariés du versement de la prime du fait des conditions de travail liées au Covid -19. On s’orientait donc vers un versement pour tous les salariés, et une majoration de prime pour les salariés travaillant pendant le covid-19.

Or, ce n’est pas la position que retient le gouvernement dans son questions/réponses.
Toutefois, les précisions données posent question et des précisions sur l’application des dernières Q/R mises en ligne seraient donc bienvenues afin d’éviter les erreurs et s’exposer non seulement à un contentieux avec l’Urssaf (opposabilité d’un questions/réponses) et avec les salariés (sur la fondement de discriminations et inégalités de traitement).

Voici reproduites les questions réponses 2.5 et 2.6 et 1.5 :

Quelles conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 permettent de moduler le montant de la prime ?

« La prime peut être modulée pour l’ensemble des salariés ayant continué leur activité durant la période d’urgence sanitaire (qui a débuté le 12 mars 2020*) ou pour certains d’entre eux en raison de conditions spécifiques de travail liées à l’activité de l’entreprise (activité obligeant à se déplacer sur place dans l’entreprise, activité au contact du public …). Il est notamment possible de majorer substantiellement la prime pour l’ensemble des salariés ayant continué leur activité pendant la période d’urgence sanitaire ou seulement pour les personnes ayant été au contact du public. Dans ce cas, l’appréciation sur 12 mois des conditions d’octroi de la prime ne s’applique pas.

Une modulation tenant compte des différences dans les conditions de travail des salariés ayant continué leur activité est également possible. Il est par exemple possible de différencier le niveau de la prime des salariés ayant continué leur activité en télétravail de celui versé à ceux qui ne pouvaient pas recourir au télétravail et ont dû se rendre sur leur lieu de travail.
Il est également possible, par exemple, de majorer la prime pour les salariés ayant été astreints de se rendre sur leur lieu de travail habituel pendant une large part de la période d’urgence sanitaire, par rapport à celle versée à des salariés ayant subi ces conditions de travail pendant une plus courte période
 ».

*Nb : à noter que l’état d’urgence sanitaire a pourtant été déclaré par la loi du 23 mars ( publiée au JO le 24 mars) pour une durée de 2 mois prenant fin, pour l’heure, le 24 mai 2020.

Une entreprise peut-elle exclure du versement des salariés qui n’étaient pas présents pendant la période d’urgence sanitaire ?

«  OUI. L’objectif du nouveau cas de modulation prévu par l’ordonnance 202-385 est de permettre de récompenser la possibilité de prendre en compte la présence effective du salarié, en excluant, par exemple, les salariés en télétravail. »

La modulation peut-elle aboutir, pour certains salariés, à une prime exceptionnelle égale à zéro ?

«  OUI. La modulation du montant de la prime, notamment en fonction des conditions de travail pendant la période d’urgence sanitaire, peut permettre le versement d’un montant compris entre 0 et 1000 euros, seuil porté à 2000 € en cas de mise en œuvre d’un accord d’intéressement. La loi prévoit que la prime exceptionnelle doit être versée à l’ensemble des salariés éligibles qui ne peuvent être exclus sur la base d’autres critères.  »

Vous pouvez utiliser un critère ou plusieurs, en les combinant pour déterminer le montant de la prime que chaque salarié se verra attribuer mais ces critères devront être clairement et précisément fixés soit dans votre DUE soit dans votre accord, de même que le plafond de rémunération du droit à la prime si vous souhaitez en mettre un.

La prime peut-elle être versée à une partie seulement des salariés ?

OUI :
 soit par l’exclusion d’une partie des salariés dont la rémunération est supérieure à un plafond. En effet, par cohérence avec le plafonnement du niveau de rémunération des salariés bénéficiaires ouvrant droit à l’exonération, l’employeur peut choisir de ne verser la prime qu’aux salariés dont la rémunération est inférieure à un certain niveau (qui peut être différent de celui de 3 SMIC qui limite l’éligibilité à l’exonération) ;
soit à raison des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 ( cf. points 2.3 à 2.6 et 2.11).

 s’ajoute à cela le fait que si les critères de présence effective ou de rémunération sont mis en œuvre, le salarié qui n’a pas été effectivement présent dans l’entreprise durant les 12 mois précédant le versement de la prime ou n’a perçu aucune rémunération au cours de cette même période pourra avoir une prime à 0.

Modalités de mise en place de la prime

La prime ne peut être versée qu’après l’avoir mise en place selon l’une des modalités ci-dessous (et le cas échéant, qu’après dépôt de votre accord d’intéressement) :

  par une décision unilatérale de votre part  :

Le cas échéant, la décision unilatérale doit au préalable être inscrite à l’ordre du jour d’une réunion CSE au cours de laquelle vous informez vos élus de votre projet de DUE, ce qui implique que vous soyez à jour de vos obligations en termes d’élections des représentants du personnel ; la DUE sera ensuite affichée dans les locaux.
Dans les entreprises sans CSE, la DUE doit être communiquée à chaque salarié par tout moyen (nous recommandons la remise contre décharge ou le LRAR).

>Il n’existe pas de modèle type de décision unilatérale puisqu’en premier lieu, il revient à chaque employeur de s’interroger sur les critères de modulation qu’il souhaite appliquer ainsi que sur la mise en place d’un plafond de rémunération.
Nous vous invitons à vous rapprocher de votre juriste pour procéder à sa validation en fonction des critères que vous souhaitez mettre en œuvre.

OU
 par accord d’entreprise ou par accord de groupe (dans ce cas l’accord s’impose aux filiales), selon les mêmes modalités que l’accord d’intéressement (accord d’entreprise avec les délégués syndicaux, accord avec le CSE, ou par ratification des 2/3 du personnel).

Vous avez le choix entre ces deux modalités  : le texte ne prévoit aucune priorité de l’accord d’entreprise sur la décision unilatérale. Toutefois, si vous disposez d’un délégué syndical, il vous est conseillé d’intégrer la négociation de cette prime et de ses conditions de versement dans la Négociation Annuelle Obligatoire (NAO) sur la rémunération :
 Soit vous signez un accord sur ce point ;
 Soit vous actez un PV d’échec des négociations sur ce point précis avec précision de la mise en place du dispositif par DUE ( uniquement dans ce cas, la DUE devra être déposée à la Direccte et au greffe des prud’hommes).

Exonérations

La prime est exonérée, dans la mesure où sa mise en place et son montant respectent les dispositions détaillées ci-avant  :
· d’impôt sur le revenu ;
· de toutes les cotisations et contributions sociales d’origine légale ou conventionnelle (cotisations sociales, CSG/CRDS, Agirc-Arrco, assurance chômage, etc.) ;
· et de la participation à l’effort de construction, de la taxe d’apprentissage (y inclus contribution supplémentaire), de toutes les contributions à la formation professionnelle. La prime sera également exonérée de taxe sur les salaires pour les employeurs concernés, en raison de l’alignement d’assiette avec la base CSG/CRDS.

Enfin, même si la prime est exonérée de l’ensemble des cotisations et contributions et d’impôt sur le revenu (si inférieure ou égale à 1 ?000 € voire 2.000 € en application d’un accord d’intéressement et si elle est versée à un salarié dont la rémunération des 12 mois précédents est inférieure à 3 fois le SMIC annuel), il faudra néanmoins la faire figurer sur le bulletin de salaire. Celui-ci doit en effet comporter le montant des versements s’ajoutant aux sommes soumises à cotisations (c. trav. art. R. 3243-1, 8°, b).

Enfin, à l’instar de la prime Macron attribuée en 2019, la prime Macron 2020 :
 doit être prise en compte dans le calcul de l’intéressement, sauf si sa neutralisation a été négociée dans l’accord d’intéressement ;
 n’entre dans le calcul d’aucune autre exonération de cotisations sociales (ex. : réduction Fillon) et n’ouvre pas droit à d’autres exemptions ou exonérations ;
 n’est pas incluse dans la rémunération servant à déterminer l’indemnité de fin de contrat ou de fin de mission ;
 n’entre pas dans le calcul des indemnités de rupture du contrat de travail.

Ci-dessous MODELE DUE NON EXHAUSTIF en pdf à télécharger en cliquant sur l’image

Visuel de Une : illustration DR