La foi en Bourse

La foi en Bourse

En dépit des désordres climatiques, le cycle des saisons n’est pas bouleversé. Surtout en France : chez nous, le mois de mai demeure le plus propice à la construction des ponts et au semis des potirons. Encore que les courges prospèrent toute l’année sur notre sol – c’est une espèce très rustique, qui résiste efficacement à la pollution éducative dès après la première pousse de la maternelle. Mais le mois de mai, c’est aussi celui de la créativité, de l’invention et de la remise en question. Tout particulièrement sur le plan politique, surtout après une succession d’élections. Ainsi, en mai, il apparaît nécessaire de tailler les vieilles factions blanchies sous le harnais et noircies sous les mauvaises pratiques. Afin de créer de nouveaux partis fédérateurs, par hybridation de la probité, de la sincérité, de l’efficacité et d’un raton laveur – autant d’espèces non protégées bien que menacées d’extinction. C’est que les actionnaires des partis cotés au CAC 40 redoutent l’érosion de leur capital et la fonte de leurs dividendes. Et les cadres craignent de se faire virer sans indemnités avant la tenue de la prochaine assemblée générale. Il leur faut donc se recentrer sur le cœur de métier et c’est bien là le problème : trouver le cœur. Car les grosses bécanes de la politique vendent à-peu-près le même produit. Et c’est de la camelote, que le consommateur paie un prix exagéré – pas étonnant que l’électeur soit exaspéré.

Puisque désormais tout se mesure en argent sonnant et trébuchant, il est naturel de ramener toutes les aspirations humaines à une question de fric. On sera donc indulgent face aux dérives mercantis de l’idéal politique, qui est nécessairement influencé par l’intérêt individuel. On peut toutefois s’émouvoir de la tendance observée sur le marché de l’idéal spirituel. Un Californien allumé fait en ce moment un appel de fonds pour lancer une start-up religieuse, afin de capitaliser sur la foi universelle en Mark Zuckerberg, le créateur de Facebook. Le jeune prophète serait en effet un « avatar de Jéhovah », pour avoir fait naître une immense communauté adepte de son réseau social. Cette nouvelle religion reposerait sur «  l’enseignement de la sagesse et des compétences sociales de Mark Zuckerberg », qui ne marche pas sur l’eau mais baigne dans un océan de dollars. Faute de garantir à ses adeptes le salut de leur âme, le culte facebookien promet de généreux dividendes à ses actionnaires. Voilà qui nous rappelle ces quelques vers que l’on aime à citer : « L’argent ! L’argent ! Sans lui tout est facile/La vertu sans argent est un meuble inutile ». Mais la maxime de Boileau est aujourd’hui périmée : nous vivons désormais les temps de l’argent sans vertu.

La recette du jour

Religion en canettes

Vous cherchez à créer votre entreprise mais vous manquez d’idées. Investissez dans le business de la start-up religieuse : il suffit d’identifier une communauté qui compte déjà de très nombreux adeptes. Vous pouvez par exemple faire naître le culte Pemberton – du nom de l’inventeur du coca-cola : ses pratiquants sont déjà plus nombreux que les Papistes.

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