A voir sur ARTE : "Classe

A voir sur ARTE : "Classe moyenne, des vies sur le fil"

ARTE diffuse "Classe moyenne, des vies sur le fil" - Un documentaire événement en trois épisodes de Frédéric Brunnquell - Premier épisode : Mardi 17 février à 20.50.

CLASSE MOYENNE , DES VIES SUR LE FIL

Un documentaire en 3 épisodes de Frédéric BRUNNQUELL
Une coproduction : ARTE France, Nilaya Productions
(France, 2014, 3x52mn)

Dix millions de Français vivent avec 1200 euros par mois pour une personne seule, 2600 euros pour une famille de deux enfants. Ils forment une petite classe moyenne oubliée des statistiques qui partage le sentiment de n’intéresser personne et d’avoir disparu des écrans radars. En France, comme dans le reste de l’Europe, cette petite classe moyenne est la catégorie sociale dont la situation s’est le plus détériorée depuis la crise.

Pendant sept mois Frédéric Brunnquell a vécu avec quatre familles prises dans des difficultés auxquelles aucune n’avait été préparée.

Il a réalisé ce documentaire en trois épisodes pour tenter de comprendre cette crise de l’intérieur et découvrir les entailles profondes qu’elle provoque dans la société. à Lille, Régis, ancien directeur de restaurant, est contraint de travailler comme serveur dans une brasserie. à Nancy, Jean-Philippe, cadre dans le hard discount, a vu son salaire baisser de 25%. à Lyon, Gaëlle, metteur en scène de théâtre, gagnait mieux sa vie à ses débuts tout en travaillant autant. Catherine, marchande de journaux parisienne étranglée par la crise de la presse, se sent dépossédée par ce monde qui change si vite.

Tous vivent aujourd’hui avec le sentiment que leurs efforts ne leur permettent plus de s’élever dans la société. Les vies des familles de la petite classe moyenne croquées
pendant le tournage les révèlent vulnérables. Ils vivent avec l’obsession vitale de leur rebond, pour garder leur rang, pour conjurer l’angoisse de finir à la rue. Chacun
développe des stratégies personnelles pour s’en sortir.
Dans notre monde de plus en plus inégalitaire, la fragilité de la petite classe moyenne menace notre société et détruit notre cohésion sociale.

Pourquoi ce film ? par le réalisateur Frédéric Brunnquell

La crise frappe. Tout à sonder les profondeurs de la faille, à en décortiquer les mécanismes malins, avons-nous pris le temps de la comprendre émotionnellement ? De cesser de courir d’un économiste à un autre. De dépasser, le temps d’une soirée,
le débat qui oppose les néo-keynésiens aux libéraux dé-régulateurs pour l’analyser enfin d’un point de vue empathique. Saisir les dégâts psychologiques qu’elle
provoque ; pour comprendre notre société, sauver le lien social, combattre le repli, ne pas se résigner et aiguiser un regard politique.
Les maelströms économiques et leurs souffrances associées fragilisent la société. Les crises sont des tornades dont les forces centrifuges éjectent, déclassent, menacent la stabilité de notre pays. Nous savions les classes précaires,
les smicards, les 8 millions de pauvres impactés par les crises larvées qui nous empoisonnent depuis des années, nous découvrons que la classe moyenne est à son tour touchée par le tourbillon, dangereusement étreinte par un
désespoir grandissant.
La classe moyenne en France, désigne les couches sociales qui depuis l’après-guerre ont profité du développement économique, du miracle de notre société de
consommation. La France moderne a forgé son assise sur cette partie de la population avec une garantie de stabilité, de réelle appétence démocratique en échange d’une assurance de prospérité, de protection bienveillante d’un
Etat-providence et d’une ascension sociale quasi-assurée ; un pacte social.
Le rêve de progression de la classe moyenne était celui de toute la société française. Aujourd’hui prise dans l’étau de la crise, elle ne diffuse plus de la confiance en l’avenir mais de l’anxiété. Son angoisse pourrait devenir le cauchemar de tous. N’oublions pas que les classes moyennes ont toujours été là pour changer le cours de l’histoire, qu’il s’agisse de transformation radicale le temps d’une explosion sociale et
libérale ou au contraire conservatrice. On pourrait objecter que les problèmes de cette tranche de la société restent marginaux dans un pays touché par la pauvreté. En fait, pour reprendre une image du sociologue Louis Chauvel, les classes moyennes sont un peu comme un sucre dressé au fond d’un verre. Si la partie supérieure semble toujours intacte, l’érosion continue de la partie immergée la promet à une déliquescence prochaine et inéluctable. C’est à cette partie basse de la classe moyenne que j’ai souhaité consacrer ce documentaire.

Je suis parti à la recherche de la classe moyenne. Parti voir ce qu’elle raconte, d’elle, de la France, de notre époque et donc de nous-même.

Faire acte d’appartenance en filmant, en écoutant, en laissant s’animer les situations
devant la caméra. Filmer en autorisant les choses à être petites, lointaines parce qu’elles sont parfois plus inquiétantes ou signifiantes vues de loin ; s’approcher
d’elles quand elles ont quelque chose à nous raconter et trouver pour chaque situation la bonne distance filmique.
Travailler sur la distance est la clé pour faire du banal des vies « moyennes » un sujet cinématographique, à la condition aussi de savoir prendre le temps nécessaire.
J’ai travaillé avec quatre familles appartenant à cette classe moyenne fragilisée. Je les ai suivies de juillet 2013 à mars 2014. Un laps de temps suffisant pour développer
un récit, soutenir la réalisation d’un documentaire social en ce temps de crise. Et surtout pour avoir une chance de voir les familles s’adapter à différents enjeux qui constituent les ressorts du film. Des familles aux profils variés qui permettent d’esquisser le portrait de cette France de la classe moyenne qui dicte le tempo à la société. J’ai découvert qu’elles vivaient dans une société d’incertitude.

Frédéric Brunnquell est un auteur, réalisateur de films documentaires.

Il a commencé sa carrière à France Culture. Puis a été pigiste par choix une dizaine d’années au cours desquelles il a écrit cinq ouvrages dont un remarqué sur la guerre du Liban.
En 1996, il a rejoint l’agence Capa comme grand reporter. Depuis 2006 il est réalisateur indépendant, auteur de films documentaires dont certains ont été primés dans de nombreux festivals et diffusés dans plus de 20 pays dans le monde.

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