Adrien Verrier et Cécile

Adrien Verrier et Cécile Schwal : "faire passer le Barreau de Nice du XXe au XXIe siècle"

Les nouveaux bâtonnier et vice-bâtonnier n’ont pas perdu de temps pour lancer d’ambitieux projets pour leur mandat 2022-2023, dont la modernisation de l’Ordre des avocats du Barreau de Nice.

Quels sont les principaux projets de votre bâtonnat ?

Cécile Schwal et Adrien Verrier ont succédé en janvier à un autre duo, composé de Thierry Troin et de Nathalie Beurgaud. ©David et Marcel

- Cécile Schwal : Avant tout, c’est d’assurer une modernité de l’Ordre et des outils que nous mettons à disposition des confrères mais également du public. On a commencé par la communication au sein du Barreau, en essayant de fluidifier cette communication et de la rendre plus attractive et plus recentrée. Nous communiquons également sur les réseaux sociaux et nous allons refondre notre site internet. On a envie de mettre à disposition une information accessible rapidement.

- Adrien Verrier : L’idée, c’est de simplifier la vie de nos confrères, de faire en sorte que les démarches plus administratives soient déléguées à des outils numériques et qu’ils soient plus recentrés sur leur cœur de métier et leur activité spécifique. On leur demande de faire surtout du droit, de plaider, de défendre, de conseiller. Pour tout ce qui est logistique, on essaie de leur apporter un appui technique pour pouvoir faire passer le Barreau de Nice du XXe siècle au XXIe siècle. In fine, cela permettra d’offrir au justiciable une défense et une assistance de meilleure qualité, de lui offrir un meilleur accueil, une meilleure disponibilité, de lui montrer que les avocats ne sont pas une caste supérieure, qu’ils sont accessibles et qu’ils peuvent intervenir à toutes les étapes de sa vie.

L’avocat n’est pas synonyme systématiquement de conflit, de litige mais aussi d’accompagnement dans la vie quotidienne.

- Cécile Schwal : Le deuxième volet, c’est de travailler à l’amélioration des relations avocats-magistrats. Dès avant notre prise de mandat, on a pris les contacts nécessaires pour organiser des réunions d’échanges avocats, magistrats et greffiers, pour que l’on communique mieux puisqu’il y a parfois des non-dits, des perceptions qui sont inexactes. En organisant ces tables rondes, on va peut-être désamorcer des difficultés et améliorer le relationnel. C’est très important pour nous.

Avez-vous pu rencontrer la nouvelle présidente du Tribunal judiciaire, Pascale Dorion ?

- Adrien Verrier : On a rencontré quelqu’un de très à l’écoute, de disponible, intéressé par nos projets. Ce que l’on souhaite ce sont des relations de proximité directe. C’est une personne en laquelle nous avons toute confiance pour pouvoir travailler en toute efficacité, comme on a toute confiance actuellement avec le parquet dans le cadre de nos relations et cela se passe plutôt très bien.

Est-ce que vous trouvez, comme le procureur de la République, que le Palais de Justice est devenu trop petit ?

- Adrien Verrier : On a un véritable problème de salle d’audience. Il nous manque une salle, pour se faire dérouler les audiences spéciales relativement longues.
Il y a une réorganisation actuellement en cours du Palais de justice au niveau des salles d’audience et de services. Nous, avocats, nous travaillons à cette réflexion.
Et il y a un autre projet sur lequel nous travaillons avec le parquet, avec la préfecture et avec la Ville, c’est de permettre une retransmission du procès d’assises du 14 juillet à Paris en septembre, à Nice, dans une salle dédiée, sécurisée, avec toute une logistique d’assistance et de soutien juridique, médical, psychologique et associatif. Cela permettrait aux victimes de ne pas avoir à se déplacer pour pouvoir suivre le procès. On va y arriver.
L’Ordre est présent. On a un collectif d’avocats qui travaille dessus et on a une municipalité qui est très volontaire sur ce dossier. On organisera des permanences d’avocats tous les jours.

- Cécile Schwal : Nous ne sommes pas pour un déménagement du Palais même si nous manquons de place. Il faut qu’il reste en centre-ville.

Quelle est, globalement, la situation des 1 200 avocats niçois en ce début d’année ?

- Cécile Schwal : Globalement, elle est encore "secure". Il y a eu les rattrapages de charges de fin d’année qui ont créé quelques remous mais qui sont maîtrisés. On est très vigilants pour le second semestre 2022 puisqu’on sait qu’avant l’élection présidentielle en général il ne se passe pas grand-chose. On essaie de mettre en place tous les outils requis pour être prêts face à ce second semestre où tous les acteurs du monde économique sont d’accord pour dire que s’il se passe quelque chose ce sera à ce moment-là. La profession d’avocat est souvent le pendant du monde de l’entreprise.
Quand les sociétés commencent à aller mal, en général, cela se répercute chez nous. On est un peu en miroir.
On a déjà fait un travail colossal depuis janvier sur la prévention des difficultés pour intervenir le plus en amont possible. On ne veut pas attendre que nos confrères soient presque en état de cessation de paiements.

- Adrien Verrier : Et même s’ils sont en état de cessation de paiements, il y a encore plein de possibilités qui leur permettent de pouvoir continuer à exercer, en rééchelonnant les dettes, en se mettant sous procédure d’observation. On a vraiment un devoir de vigilance par rapport à eux pour vérifier qu’il n’y ait pas de situations anormales qui se dessinent. Si c’est le cas, immédiatement on va vers eux et on leur demande si on peut les aider, les accompagner. Nous recevons régulièrement des collègues pour les écouter et les orienter le mieux possible.

Le Conseil de l’Ordre 2022-2023. ©Barreau de Nice

Avec qui travaillez-vous pour mener toutes vos actions ?

- Adrien Verrier  : Il y a le personnel administratif de l’Ordre et de la CARPA. Il y a en tout 14 salariés, qui gèrent le quotidien.
Ensuite nous avons des commissions, composées de présidents et des membres du Conseil de l’Ordre, ou pas, et qui agissent en délégations sur la base des orientations que l’on veut donner à notre mandat.
Nous avons des thématiques sur lesquelles nous voulons travailler et nous leur donnons un cahier des charges qu’ils mettent en
musique. Par exemple, dans le cadre de la commission culture, on a décidé de créer un prix littéraire du Barreau de Nice. On a regroupé tous les avocats écrivains ou particulièrement intéressés par la chose littéraire pour pouvoir construire ce prix avec nous et faire en sorte que l’on puisse le décerner, pour la première fois, à la fin de l’année.

- Cécile Schwal : En complément, toujours sur cette commission, on organisera une manifestation "Nos confrères ont du talent" parce qu’on a beaucoup de confrères qui sont très doués, en peinture par exemple. Cette manifestation donnera une autre image du Barreau. C’est une vitrine et c’est positif. 

Quelle devrait être selon vous la priorité pour la justice de la campagne à l’élection présidentielle ?

- Cécile Schwal : Il faut plus d’argent. Il y a un manque de moyens criant. On nous dit qu’on ne peut pas tout faire, qu’on a déjà fait beaucoup, qu’on hérite de situations du passé. Pour autant ce n’est pas satisfaisant.
Ce n’est pas satisfaisant que les justiciables soient jugés ainsi.
Et qu’on ne nous fasse pas croire qu’il n’y a pas derrière une volonté de privatisation de la justice. (…) On a l’impression qu’il y a une volonté aujourd’hui de détruire tous les services publics. On l’a vu avec le service public hospitalier, de la justice et de l’enseignement. Il faut que l’on soit tous vigilants, on ne peut pas démanteler tous les services publics.

Propos recueillis par Sébastien Guiné

Les principales commissions, détaillées par le bâtonnier

De nombreuses commissions ont été mises en place, en plus des commissions Culture, Prévention des difficultés et procédure collective et Communication, déjà évoquées dans l’entretien.
- Commission Relations avocats et justiciables  : Cela concerne "toutes les contestations et les réclamations par un justiciable à l’encontre des avocats".
- Groupe de défense pénale : "C’est toute notre machine pénale de désignation des avocats commis d’office. Cette commission est composée de permanenciers qui s’occupent d’exécuter les missions, d’avocats coordinateurs qui reçoivent les appels et d’un président de commission, jour et nuit. On désigne 17 avocats par jour pour pouvoir remplir toutes les missions de garde à vue, d’audiences correctionnelles, d’étrangers en situation irrégulière, de mineurs…".
- Groupe de défense des victimes : "C’est le pendant du groupe de défense pénale. Nous avons des permanenciers par tranche de 24 heures pour assister les victimes, à tous les niveaux (violences conjugales, victimes de violences classiques, de vols…) devant le tribunal correctionnel, devant le juge aux affaires familiales…  ".
- Commission Exercice du droit : "On va à la chasse à toutes les personnes qui exercent de façon irrégulière le métier d’avocat. Les consultations juridiques sont possibles dans certains domaines mais à titre accessoire, pas à titre principal et permanent".
- Commission MARD : "Les modes alternatifs de règlement des différends. C’est un nouveau concept, avec un nouveau regard sur le contentieux, basé sur le collaboratif". Cécile Schwal précise que malgré "de la bonne volonté, cela ne prend pas pour l’instant". Pour autant Adrien Verrier estime "qu’en termes de résultats, on aboutit à énormément de succès, avec une baisse du temps de traitement du litige, avec une satisfaction beaucoup plus importante dans la décision rendue et cela coûte moins cher. On a créé une commission pour que cela puisse prendre une dynamique".
- Commission Droits de l’homme : "On a organisé la venue d’un avocat turc qui a parlé de la situation des avocats en Turquie, certains étant accusés de terrorisme à tort".
- Commission Prévoyance et de secours : "En cas de problèmes financiers des avocats, on peut les aider".

Photo de Une S.G

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