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Baux commerciaux : les réponses interprofessionnelles à vos questions

Cas pratique interprofessionnel #1 - Nous poursuivons nos rendez-vous interprofessionnels avec ce mois-ci un premier cas pratique sur les baux commerciaux. Ce qu’il faut savoir, comment chaque professionnel peut vous aiguiller, ce dossier pratique répondra à vos questions.

Vous êtes artisans ou commerçants et vous vous interrogez sur les changements apportés par la Loi Pinel. Vous vous demandez à quel moment faire appel à quel professionnel libéral pour votre bail commercial. Entre compétences croisées et complémentaires, nous avons réuni une équipe interprofessionnelle pour vous aider à y voir plus clair, au travers de ce dossier pratique pensé pour vous.

Repère d’actualité : le point sur la Loi Pinel

Concrètement, quelles sont les principales modifications apportées par la Loi Pinel pour le régime des baux commerciaux ?

« Cette loi va protéger d’abord le locataire et apporter des mesures pour inciter à maintenir les commerces en centre-ville », affirme Me Caminiti, Avocat à Nice.

Explications des principales modifications.

Le remplacement de l’ICC (Indice du Coût de la Construction) par l’ILC (Indice des Loyers Commerciaux) : « la révision triennale du loyer du bail sera fixé en fonction de l’ILC ou de l’ILAT, considérés comme des indices plus linéaires que l’ICC », explique Me Caminiti. L’ILC est calculé selon l’indice des prix à la consommation et l’indice du chiffre d’affaires du commerce de détail.

Le déplafonnement : « la loi organise un plafonnement du déplafonnement et limite à 10% d’augmentation du loyer d’une année sur l’autre. Auparavant, les loyers commerciaux pouvaient subir de fortes augmentations lors des renouvellements, les loyers déplafonnés étant fixés à la valeur locative.

Résiliation par le locataire en cours de bail  : « le locataire a la possibilité de mettre fin au bail à la fin de chaque période triennale. C’est désormais d’ordre public, ce qui signifie que l’on ne peut plus supprimer ce droit par une clause du bail commercial comme cela était le cas auparavant ». Cette résiliation (congé triennal) peut se faire sans motif particulier.

Les baux dérogatoires (de courte durée) : ils passent de 2 à 3 ans.

L’information du preneur : la loi Pinel impose au bailleur une obligation d’information du preneur, dès la rédaction du bail. Concrètement, les bailleurs devront communiquer (au plus tard à compter du 30 septembre 2015) l’état récapitulatif annuel des charges. Dans un délai de 2 mois à compter de chaque échéance triennale, le bailleur doit faire parvenir à son preneur l’état prévisionnel des travaux qu’il envisage de réaliser dans les trois années suivantes et le budget prévisionnel lié, mais aussi l’état récapitulatif des travaux réalisés dans les trois années précédentes et leurs coûts.

L’état des lieux contradictoire et amiable : « il devient obligatoire, alors qu’auparavant, il y avait présomption que le preneur ait pris le bien dans un état jugé d’emblée comme bon. »

Le congé  : il doit être donné avec un préavis de 6 mois pour faire cesser un bail, que ce soit par le bailleur ou par le locataire. Initialement réalisé obligatoirement par acte d’huissier, il peut aussi désormais se faire par lettre recommandée, avec demande d’avis de réception (la date du congé étant celle de la première présentation de la lettre).

La garantie du cédant : « lors de la cession du droit au bail, le bailleur ne peut désormais se prévaloir de la clause de garantie solidaire que pour une durée de 3 ans maximum. »

Le droit de préemption  : la loi Pinel instaure un droit de priorité au bénéfice du locataire, au cas où le propriétaire envisage de céder son local commercial ou artisanal. Ce droit n’est cependant pas d’ordre public, ce qui signifie que les parties peuvent y déroger par une clause spéciale.

Baux commerciaux : quand faire appel à un Avocat ?

L’Avocat peut intervenir à chaque étape, de la rédaction du bail à la gestion des contentieux. Il saura se positionner entre le respect du cadre obligatoire et la rédaction des conditions particulières qui peuvent encore être négociées entre le preneur et le propriétaire.

Commerçants et artisans : faites-vous accompagner dans vos démarches

Les professionnels libéraux ont des compétences croisées, connexes ou complémentaires pour traiter ce qui a trait aux baux commerciaux.

Comme l’évoque Me Caspar, Notaire à Beaulieu-sur-Mer, « c’est là que l’interprofessionnalité peut être intéressante. Souvent, nous travaillons en duo avec des Avocats, nous nous soumettons des projets comme on peut le faire dans d’autres dossiers. Je remarque que du point de vue de la gestion de leur patrimoine immobilier, les bailleurs ont le réflexe de venir voir le notaire. A l’inverse, d’un point de vue commercial, là où l’avocat est plus présent au quotidien, les preneurs vont avoir davantage tendance à aller vers eux. »

La rédaction d’un bail notarié est conseillée pour faire valoir sa force exécutoire du point de vue du bailleur, mais aussi pour garantir les droits du preneur, car cela confère une date certaine au bail (la date du bail notarié est fixée au jour de la signature du bail) et en garantit son contenu.
Cela confère une force juridique au bail commercial et permet notamment au bailleur de s’adresser directement à un huissier de justice pour faire saisir les biens du locataire en cas de non-paiement des loyers, sans avoir besoin de saisir un juge.

A savoir  : le plus souvent, les frais de rédaction du bail ainsi que les frais d’état des lieux sont mis à la charge du locataire.

Il est cependant tout à fait possible de rédiger un bail commercial sans recourir à un professionnel. Il est alors conclu sous seing privé. Il se doit alors d’être rédigé en deux exemplaires, à répartir entre le bailleur et le locataire. Il est conseillé de l’enregistrer à la recette des impôts, pour lui donner une « date certaine », afin d’éviter toute contestation de la conclusion du bail.

Baux commerciaux : quand faire appel à un Notaire ?

Pour les baux commerciaux portant sur un débit de boissons ou sur des locaux où sont entreposées les boissons du débitant (cave, cellier), le bail notarié est obligatoire. Cela permet d’éviter l’application de pénalités fiscales à l’encontre du propriétaire, qui pourrait être poursuivi pour recel de débit de boissons par exemple.

A savoir : un bail d’une durée supérieure à 12 ans (rédigé par un notaire ou à déposer au rang des minutes du notaire) doit obligatoirement être publié au bureau des hypothèques pour être opposable aux tiers.

Comme évoqué précédemment, l’Huissier de justice peut de son côté intervenir sur plusieurs aspects liés aux baux commerciaux.

Explications avec Romain Ghiandai, Huissier de justice à Menton.

Défaut de paiement  : « nous pouvons intervenir avec le commandement de payer les loyers visant la clause résolutoire, afin de faire respecter les clauses insérées dans le bail (article L145-41 du Code du Commerce) », précise-t-il.

Le congé : le principe en est posé par l’article L 145-4 du Code du commerce. La loi Pinel permet de ne plus passer obligatoirement par l’huissier.

Le renouvellement : « il s’agit d’un acte extrajudiciaire obligatoire, régi par l’article L145-10 du Code du Commerce ». Un bail commercial ne prend fin que par l’effet d’un congé donné par le bailleur ou le locataire, ou d’une demande de renouvellement de la part du locataire. A l’expiration du bail, soit le bailleur notifie un congé, soit le locataire notifie une demande de renouvellement, soit personne ne prend d’initiative et le bail se poursuit alors par tacite prolongation.

La demande de déspécialisation : si le locataire souhaite changer d’activité ou la compléter par une autre, il doit obtenir l’accord préalable du bailleur et lui demander la déspécialisation de son bail. Qu’elle soit partielle ou plénière, la demande de déspécialisation doit être notifiée par acte d’huissier.

Baux commerciaux : quand faire appel à un Huissier ?

Etat des lieux d’entrée et de sortie, révision triennale du loyer, sous-location du local commercial, expulsion, règlement définitif des charges, s’ajoutent aux compétences mentionnées ci-dessus.

A savoir  : les huissiers de justice sont également compétents pour rédiger les baux commerciaux.

Baux commerciaux : et les rôles de l’expert-comptable ?

« Nous sommes le garant, que ce soit pour le locataire ou le bailleur, de la bonne application du contrat », rappelle Alexandre Poletti, Président du Club des Jeunes Experts-Comptables et Commissaires aux Comptes pour la section Côte d’Azur-Corse. « Si le cabinet d’expertise-comptable auquel vous faites appel a sa propre cellule juridique, la rédaction du bail peut lui être confiée. Globalement, l’expert-comptable vous épaulera évidemment sur la partie chiffrée (frais, charges applicables et régularisation, TVA, indexation des loyers). »

Pour les baux commerciaux, vous avez donc les éléments en main pour choisir le professionnel qui pourra vous conseiller (là où leurs compétences se croisent) et pour vous adresser au bon interlocuteur en cas de besoin particulier.

Photo de Une : La dynamique équipe interprofessionnelle répond à vos questions. De gauche à droite : Pasquale Caminiti (Avocat), Alexandre Poletti (Expert-comptable), Jeanne Caspar (Notaire) et Romain Ghiandai (Huissier de justice) ©CM

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