Bercy met en garde (...)

Bercy met en garde contre les montages fiscaux abusifs

Sous leur apparente légalité, certains montages fiscaux sont en fait abusifs : Bercy publie une liste informative de ces cas non conformes au droit. Une démarche qui s’inscrit dans le cadre de l’amélioration des relations entre les entreprises et l’administration.


Avis aux adeptes de la fiscalité fantaisiste et aux entrepreneurs qui se laissent séduire par des conseillers un peu trop audacieux : Bercy publie une liste de montages fiscaux abusifs, qui, sous une apparente légalité, dépassent en réalité les bornes de la loi, pouvant de ce fait entraîner un redressement pour l’entreprise qui les met en œuvre.

Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics et Christian Eckert, secrétaire d’Etat chargé du Budget, ont présenté quelques uns de ces montages, le 1er avril, lors d’une conférence de presse, à Paris. Parmi les exemples, figure la « fausse délocalisation de main d’œuvre » : concrètement, il s’agit pour une entreprise située en France de recourir à une société située à l’étranger, pour qu’elle mette à sa disposition une personne, alors que cette dernière réside en fait en France et a déjà été en relations commerciales, ou salariée de la première entreprise, située dans l’Hexagone. Avec ce montage, la main d’œuvre concernée ne respecte pas les obligations déclaratives qui lui incombent, et la société qui l’emploie indirectement en France accepte des « factures de complaisance » de l’entreprise étrangère, passibles d’une amende de 50%, avertit Bercy.

Autre montage signalé, celui qui consiste à dissimuler des prestations de services payées d’avance sous forme de prêts. Exemple : un club de loisirs peut être tenté de financer des investissements (machines pour faire des exercices physiques…) destinés à être mis à disposition régulière de sa clientèle en sollicitant cette dernière, sous forme de prêts. Le plus souvent, ces avances de fonds ne sont pas rémunérées mais proposées en l’échange d’une utilisation gratuite des installations ainsi financées. De cette manière, dans la comptabilité de l’entreprise, la valeur des prestations délivrées apparaît en déduction des sommes restant dues par l’entreprise à ses débiteurs/clients. Résultat sur le plan fiscal : la TVA n’est pas collectée sur ces services payés d’avance, comme le prévoit pourtant la loi. Ici aussi, le montage est susceptible d’être sanctionné : l’administration peut requalifier les prêts en prestations payées d’avance et réclamer la TVA sur ces sommes. Elle peut même aller jusqu’à appliquer des pénalités de 40% pour manquements délibérés, voire de 80% pour les manœuvres jugées frauduleuses.

Sanctions inchangées et nouveaux engagements de l’administration

L’ensemble de ces montages abusifs sont recensés et décrits sur le site Internet www. economie.gouv.fr/dgfip/contrôle-fiscal-et-lutte-contre-fraude. « Cette cartographie apportera une meilleure visibilité de leurs décisions fiscales aux entreprises », explique Christian Eckert. Toutefois, met en garde le secrétaire d’Etat, sur le plan des règles fiscales elles-mêmes, « cela ne change rien ». Partant, les règles de procédures fiscales continuent de s’appliquer. Et les pénalités susceptibles d’être appliquées aux montages abusifs, qui peuvent aller de 40 à 80% en fonction de l’appréciation de l’administration fiscale, demeurent. Car pour Bercy, cette initiative vise simplement à rendre les règles fiscales plus transparentes auprès des entreprises, afin d’améliorer leur environnement et leurs relations avec l’administration. « Cela s’ajoute à la procédure du rescrit, lequel permet de vérifier à l’avance avec l’administration de la légalité d’une pratique fiscale, et qui est trop peu pratiqué », signale Christian Eckert.

Dans la même optique d’amélioration de ses relations avec les entreprises, Michel Sapin a également annoncé une série de dix engagements destinés à rendre le contrôle fiscal auprès des entreprises plus « serein » : à la « Charte des droits et obligations du contribuable vérifié », existante depuis 1975, l’administration ajoute ce jour plusieurs autres engagements. Parmi eux, la préparation avec l’entreprise de la première intervention de contrôle, notamment pour préciser les documents attendus, une définition commune des modalités optimales du contrôle, comme son calendrier, ou encore une maîtrise des délais de la part de l’administration, pour adresser aux entreprises vérifiées les conclusions de la vérification, répondre à leurs observations et leur transmettre les conclusions de l’éventuel recours hiérarchique.

Déclarer un montage abusif ?

Les contribuables qui s’aperçoivent que le montage fiscal qu’ils ont mis en place est en réalité abusif peuvent régulariser leur situation via une déclaration rectificative.
« L’administration appréciera en fonction des circonstances propres à chaque dossier si des pénalités doivent être appliquées (40%, 80%). Sur ce terrain, une régularisation volontaire sera prise en compte », explique Bercy, dans un communiqué.

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