Caméras de surveillance à

Caméras de surveillance à l’école : quelles limites ?

La Cnil multiplie ses contrôles sur les dispositifs de vidéoprotection. Récemment, cinq établissements scolaires ont dû renoncer à leur système de caméras pour atteinte aux libertés des élèves et des enseignants. Revue des règles qui s’appliquent.

Avant même la rentrée scolaire, la Cnil (Commission nationale Informatique et Libertés) a été saisie, il y a quelques mois, par des associations de parents d’élèves ou d’enseignants concernant l’installation de caméras au sein même d’établissements scolaires, et non plus seulement sur la voie publique.

C’est pourquoi, la Commission a effectué des contrôles auprès de certains de ces établissements mis en cause, afin d’apprécier la régularité de ces dispositifs. Plusieurs d’entre eux ont été mis en demeure par le président de la Cnil, Alex Türk, de modifier leurs dispositifs de vidéosurveillance.

En effet, lors de ces vérifications, les agents de la Cnil ont constaté que les caméras installées par certains établissements scolaires filmaient en permanence des « lieux de vie » tels que la cour de récréation, le préau ou le foyer des élèves. Les élèves et les personnels étaient ainsi placés sous une « surveillance permanente ». Or, en application du principe de proportionnalité de la loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978, seules des circonstances exceptionnelles peuvent justifier la mise en place de dispositifs de « surveillance permanente » des personnes.

Procédures à respecter

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Lorsque la vidéoprotection est installée sur la voie publique, un lieu public ou ouvert au public, c’est la loi du 21 janvier 1995, modifiée par Loppsi 2 (Loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure) qui s’applique. Dans ce cas, le directeur de l’établissement doit obtenir une autorisation préfectorale avant la mise en œuvre de son dispositif.

En revanche, lorsque les systèmes de vidéo sont installés sur un lieu privé, non ouvert au public, comme l’intérieur d’un établissement scolaire, c’est la loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978 qui s’applique. Dans ce cas, le directeur de l’établissement doit effectuer une déclaration préalable auprès de la Cnil.

Toutefois, cette dichotomie des régimes juridiques relatifs aux systèmes de vidéoprotection, en fonction du lieu d’installation, souffre de quelques exceptions, dont les évolutions technologiques tendent à en faire la règle de droit commun.

Il en est notamment ainsi lorsque le dispositif de vidéoprotection sur la voie publique alimente un fichier, ou est couplé à un logiciel de reconnaissance faciale ou d’analyse comportementale. Dans ces hypothèses, la loi informatique et Libertés s’applique au système mis en œuvre sur la voie publique.

De plus, la Cnil est désormais compétente pour constater un manquement aux dispositions de Loppsi 2 en matière de vidéoprotection sur la voie publique. A ce titre, elle peut mettre en demeure le responsable du système de le faire cesser. Et, si ce dernier ne se conforme pas aux termes de la mise en demeure, elle peut prononcer un avertissement public à son égard. En dernier recours, la Commission peut demander au préfet d’ordonner la suspension ou la suppression du système de vidéoprotection. Elle informe alors le maire de la commune concernée de cette demande. Ces mesures ne sont pas exclusives des pouvoirs de sanctions conférés à la Cnil, dans le cadre de manquements constatés aux dispositions de la loi Informatique et Libertés.

Dans le cadre de son programme des contrôles pour l’année 2011, la Commission a d’ailleurs décidé de « mobiliser fortement ses ressources » sur ces dispositifs, en se fixant un objectif d’au moins 150 contrôles.
Sur ces contrôles, il est utile de préciser qu’en 2010, ayant constaté que plusieurs salariés d’une entreprise étaient filmés à leurs postes de travail de manière permanente par deux caméras, situées chacune à une extrémité de leur bureau commun, la Cnil avait, pour la première fois, prononcé l’interruption en urgence d’un système de vidéosurveillance.

Surveillance pour des finalités légitimes

Les caméras doivent être installées pour des finalités légitimes : protéger les biens ou les personnes, lutter contre la fugue ou le tabagisme, …Cependant, pour répondre à ces objectifs, elles ne peuvent filmer les lieux de vie des établissements scolaires, tels que les cours de récréation, les préaux, les jardins ou les foyers des élèves. La surveillance des personnes, élèves ou enseignants, serait alors « permanente » est donc disproportionnée par rapport au but recherché.

Pour la Cnil, la sécurisation des biens et des personnes peut être obtenue « par la mise en œuvre de moyens moins intrusifs : sécurisation renforcée des accès par exemple, ou configuration du dispositif de vidéosurveillance qui peut être limité aux seuls accès de l’établissement. Seules des circonstances exceptionnelles – établissements scolaires victimes d’actes de malveillance fréquents et répétés – peuvent justifier que des élèves et des enseignants soient filmés en continu ».

Au final, cinq des établissements contrôlés par la Cnil ont été mis en demeure de modifier leur système qui portait atteinte aux libertés des élèves et personnels de l’établissement scolaire, en les filmant en continu.

La Commission a également veillé à ce que les droits « Informatique et Libertés » des élèves, de leurs parents et des personnels soient parfaitement respectés. La loi impose, en effet, que les personnes soient informées de l’existence de ces dispositifs, de leur finalité, et des modalités pour exercer leur droit d’accès, « ce qui n’était pas toujours le cas ».

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