Conventions de management

Conventions de management ou de direction intra-groupe : quand sonne le glas ?

La recherche de la rationalisation de la charge fiscale au sein du groupe et d’optimisation de la situation sociale des dirigeants se traduit fréquemment par la conclusion de conventions intra-groupe. De récents arrêts des juridictions commerciales comme fiscales sont venus ébranler la notion de convention de direction. Quelles précautions prendre aujourd’hui dans la rédaction et la mise en place de telles conventions ?

La Cour de Cassation a rendu, le 23 octobre 2012, un nouvel arrêt (Cass. Com. n°11-23.376) condamnant les conventions de prestations de services dites « de direction » visant à rémunérer des missions relevant, en tout ou partie, des fonctions de direction du dirigeant.

Un premier arrêt « Sorepla » (Cass. Com. 14/09/2010 n°09-16.084) avait déjà invalidé, pour absence de cause, une convention de direction dans la mesure où elle faisait double emploi avec l’exercice par le prestataire des fonctions de directeur général, au sein de la société bénéficiaire. La décision rendue en 2012 suit le même raisonnement, sur le fondement de l’absence de contrepartie réelle pour la bénéficiaire.

Dans les deux cas, la sanction est particulièrement lourde : la nullité de la convention sur le plan civil, à laquelle vient s’ajouter, sur le plan fiscal, le rejet de la charge, sans compter les risques encourus sur le plan pénal.

La déduction fiscale des redevances d’assistance qu’une filiale peut être amenée à verser à sa société mère est subordonnée à la production de justifications extra-comptables de la réalité et de l’étendue des services rendus, ainsi que du caractère non excessif du prix facturé. La charge de la preuve repose sur le contribuable.

L’application de ces principes par le juge fiscal fait écho à la jurisprudence commerciale. Il a été notamment jugé qu’une société, ayant pris la décision de gestion de ne pas rémunérer son Président-directeur général, personne physique, et qui rémunère une société tierce au titre d’une convention de prestations de services commet un acte anormal de gestion. Ce, dans la mesure où les services rendus par la société prestataire ne se distinguent pas, ou sont à tout le moins équivalents aux activités normalement inhérentes à la fonction de direction litigieuse. (Cour Administrative d’Appel de Nancy, 9 octobre 2003, “Gamlor” ; Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise, 23 septembre 2010, “Somfy SA”).

Eviter la confusion des genres

Pour rejeter la déductibilité de la charge, l’administration fiscale tire argument, dans ses propositions de rectification, non seulement de la jurisprudence fiscale fondée sur l’opposabilité de la décision de gestion de ne pas rémunérer les fonctions exercés par le mandataire social dans la filiale, mais également de la décision « Sorepla » de la Cour de cassation, qui invalide la convention en tant que telle. Outre les conséquences en matière d’impôt sur les sociétés, la société pourrait également se voir appliquer les majorations pour manquement délibéré et se voir refuser le droit de récupérer la TVA facturée par la société prestataire de services.

Les retours d’expérience laissent encore entrevoir de rares pistes pour réduire les risques ainsi mis en lumière. Dans certains cas, la nomination de la société prestataire aux fonctions de mandataire social sera privilégiée pour maintenir le statut fiscal et social du dirigeant, personne physique, en l’état. Dans d’autres hypothèses, l’articulation méticuleuse entre les pouvoirs des mandataires sociaux et le périmètre d’intervention de la convention permettra de ménager les enjeux, sans s’affranchir des compétences propres à chaque organe social découlant de la loi.

En toute hypothèse, les conventions de management mises en place dans les groupes par le passé doivent faire l’objet d’un examen minutieux au regard des dernières évolutions jurisprudentielles. La confusion des genres doit être évitée et les risques encourus appréciés très en amont, afin d’éviter les réactions en chaîne découlant de la nullité d’une convention. Les impacts pour le groupe peuvent, en effet, se cumuler avec les incidences patrimoniales au niveau des dirigeants.

Visuel : © Ryk Neethling

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