Covid-19 et dons : (...)

Covid-19 et dons : quelles réductions d’impôt ?

Par élan de solidarité nationale voire internationale, beaucoup d’entreprises et de particuliers sont aujourd’hui désireux de contribuer à la lutte contre le virus au travers de dons en numéraire ou en nature. Le point sur le traitement fiscal de ces dons.
Les dons en numéraire ou en nature, qu’ils soient réalisés par des entreprises ou des particuliers, ouvrent droit à des réductions d’impôt sur les sociétés, d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur la fortune immobilière (IFI), à condition toutefois d’être réalisés au bénéfice d’organismes d’intérêt général limitativement énumérés.

Par le cabinet d’avocats CMS Francis Lefebvre Avocats mobilisé pour apporter son expertise sur les mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire actuelle.

La réduction d’impôt mécénat

Les dons réalisés au bénéfice de certains organismes d’intérêt général par les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu (industrielles, commerciales, non-commerciales, artisanales ou agricoles) ou à l’impôt sur les sociétés ouvrent droit à une réduction dite « réduction d’impôt mécénat ».

Cette réduction s’impute sur l’impôt dû au titre de l’exercice au cours duquel les versements ont été effectués. Elle est égale à 60 % du montant des dons, dans la limite de 10 000 € ou de 0,5 % du chiffre d’affaires de l’entreprise si ce dernier montant est plus élevé. Au-delà de cette limite, l’excédent est reporté sur les cinq exercices suivants et ouvre droit à réduction d’impôt dans les mêmes conditions.

Pour les versements effectués au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2020
– ce qui devrait donc concerner la majorité des entreprises effectuant en ce moment des dons – le taux de la réduction d’impôt est réduit à 40 % pour la fraction des dons supérieure à 2 millions d’euros. Les dons versés au profit d’organismes sans but lucratif d’aide aux personnes en difficulté (fourniture gratuite de repas, soins, meubles et produits de première nécessité, aide au logement) ne sont néanmoins pas concernés par cette restriction et le taux de 60 % s’applique donc pleinement. Par ailleurs, les versements sont désormais retenus dans la limite de 20 000 € ou de 0,5 % du chiffre d’affaires de l’entreprise si ce dernier montant est plus élevé.

Les versements effectués au titre du mécénat doivent être réintégrés extra-comptablement car le ce cumul de la réduction d’impôt avec une déduction fiscale du don n’est pas possible.

Cette règle s’applique également lorsque les dons sont effectués en nature. Dans ce dernier cas, le don sera valorisé au coût de revient du bien concerné ou de la prestation de service. S’il s’agit d’une immobilisation toutefois, le bien devra être valorisé à sa valeur de cession.

Les dons éligibles sont ceux réalisés au bénéfice d’organismes d’intérêt général limitativement énumérés par la loi, aux rangs desquels notamment :
- les œuvres ou organismes d’intérêt général, les fondations ou associations reconnues d’utilité publique, et les fonds de dotation, ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
- les établissements d’enseignement supérieur ou d’enseignement artistique publics ou privés, d’intérêt général, à but non lucratif ;
- les sociétés ou organismes publics ou privés de recherche scientifique et technique agréés ;
- les organismes publics ou privés, dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale la présentation au public d’œuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques et de cirque ou l’organisation d’expositions d’art contemporain.

La Fondation de l’AP-HP pour la Recherche, l’Institut Pasteur ou la Fondation Abbé Pierre font par exemple partie des organismes éligibles.

Les organismes situés dans l’Espace économique européen (c’est-à-dire les États membres de l’Union européenne, la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein) sont également éligibles à condition qu’ils poursuivent des objectifs et présentent des caractéristiques similaires, tant par leur forme que par leur objet, à ceux des organismes éligibles français.

En outre, l’organisme bénéficiant du don doit nécessairement mener ses actions en France ou dans l’Espace économique européen, sauf s’il s’agit d’actions humanitaires, concourant au rayonnement de la France, environnementales ou scientifiques.

Par exception, les dons versés à certaines organisations internationales auxquelles la France est partie sont éligibles. Il s’agit notamment des institutions spécialisées et fonds de l’ONU (Unesco, Unicef, etc.) et des programmes des Nations-Unies.

Pour bénéficier de la réduction, les entreprises doivent indiquer leurs dons sur la déclaration des réductions et crédits d’impôt (n° 2069-RCI-SD) déposée dans les mêmes délais que la déclaration de résultat. Si leurs dons excèdent 10 000 € au cours d’un exercice, elles doivent y préciser le montant et la date des dons, l’identité des bénéficiaires et, le cas échéant, la valeur des contreparties reçues.

Les reçus fiscaux délivrés par l’organisme bénéficiaire permettent à l’entreprise mécène de justifier de sa bonne foi. Ils certifient que l’organisme remplit et respecte les conditions d’éligibilité. L’entreprise devrait donc s’assurer de les obtenir.

Enfin, précisons que l’association du nom de l’entreprise aux opérations de l’organisme bénéficiaire ne fait pas obstacle à la réduction d’impôt. Cependant, le Conseil d’Etat a récemment jugé à ce titre que la valorisation du nom de l’entreprise ne doit représenter, pour cette dernière, qu’une contrepartie très inférieure au montant du versement accordé, traduisant ainsi une disproportion marquée entre le montant du don et la contrepartie.

La réduction d’impôt sur le revenu

La réduction d’impôt sur le revenu est ouverte tant aux particuliers qu’aux contribuables exploitant une entreprise relevant de l’impôt sur le revenu (ces derniers ont le choix entre cette réduction d’impôt ou la réduction d’impôt mécénat évoquée ci-avant).

Seuls les versements en numéraire ouvrent droit à réduction, par versements directs ou abandons exprès de revenus (par ex. des loyers).

La réduction d’impôt est égale à 66 % des sommes versées dans la limite de 20 % du revenu imposable. Au-delà, l’excédent est reporté sur les cinq années suivantes et ouvre droit à réduction d’impôt dans les mêmes conditions. Par exception, la réduction est portée à 75 % pour les dons consentis aux organismes d’aide aux personnes en difficulté (repas, soins gratuits, aide au logement) ou aux victimes de violence domestique dans une limite forfaitaire fixée à 552 € pour l’imposition des revenus de 2020. Au-delà, l’excédent ouvre droit à la réduction de droit commun de 66 %, dans la limite de 20 % du revenu imposable.

Les dons éligibles sont ceux versés au bénéfice d’organismes d’intérêt général limitativement énumérés. Cette liste diffère peu de celle des organismes éligibles à la réduction d’impôt mécénat, on y trouve notamment ceux que nous avons indiqués plus haut dans cet article. Sont par exemple éligibles, la Fondation de France (réduction de 66 %) ou encore la Croix Rouge française et les Restos du Cœur (réduction de 75 %).

La réduction, enfin, ne s’applique qu’à condition pour le donateur d’être en mesure de présenter à l’administration un reçu délivré par l’organisme bénéficiaire.

La réduction d’IFI

Les dons en numéraire ainsi que les dons en pleine propriété de titres admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger permettent aux particuliers de réduire le montant de leur IFI.

Ces dons peuvent être imputé sur le montant de l’IFI à hauteur de 75 % de leur montant. L’avantage fiscal est plafonné à 50 000 € par an et ne se cumule pas avec la réduction d’impôt sur le revenu pour dons.

Les dons doivent être réalisés au profit d’organismes limitativement énumérés, dont notamment :
- les établissements de recherche ou d’enseignement supérieur d’intérêt général, à but non lucratif ;
- les fondations reconnues d’utilité publique (mais non les associations reconnues d’utilité publique sauf certaines ayant pour objet le financement et l’accompagnement de la création et de la reprise d’entreprises) ;
- l’Agence nationale de la recherche.
La réduction n’est possible qu’à condition de pouvoir présenter à l’administration un reçu que l’organisme bénéficiaire est par ailleurs tenu de délivrer.

Enfin, notons qu’en cas de gain net constaté sur les titres donnés, celui-ci sera imposé à l’impôt sur le revenu.

Les actions solidaires qui se multiplient dans le contexte actuel peuvent donc ouvrir droit à avantages fiscaux. Cependant, ces dispositifs restent très encadrés. Il convient donc d’être vigilant, les tentatives d’escroquerie étant nombreuses, tout particulièrement en période de crise.

Visuel de Une (illustration DR)

deconnecte