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E-réputation : tout propos n’est pas bon à tenir sur la Toile

A travers les exemples de Twitter et Dailymotion, il est possible d’entrevoir un aperçu de l’étendue des contentieux qui peuvent naître sur Internet.

Le développement des sites communautaires, des réseaux sociaux, des forums de discussions ou encore des blogs a entraîné une nette augmentation des contentieux relatifs à Internet. L’internaute n’hésite pas à s’exprimer en ligne, au risque de commettre des infractions. Si la liberté d’expression est applicable aux publications en ligne, tout propos n’est pas bon à tenir sur la Toile...

Sur Twitter

Les réseaux sociaux, et particulièrement le site Twitter, apparaissent en effet régulièrement, et de plus en plus, au cœur de l’actualité juridique et judiciaire. Quoi de plus facile et de plus rapide que de poster un commentaire (un « tweet ») sur ce formidable outil de communication instantanée, pour partager une réaction face à l’actualité, une critique face à une personnalité, ou encore toute sorte d’avis personnel sur le sujet de son choix. En quelque sorte, l’internaute supplante le journaliste. Mais, tout comme dans un journal, ou sur tout autre support de communication, ce tweet ne doit pas porter atteinte aux droits des tiers et constituer un propos illicite.

Toutes sortes d’infractions peuvent être commises via Twitter... et la chanteuse anglaise Sophie Ellis-Bextor l’a appris à ses dépens. En « tweetant », le 21 juin dernier qu’elle allait se produire dans un show produit par la BBC, elle a contrarié la chaîne avec laquelle elle avait signé un contrat. En conséquence, la BBC a déclaré réfléchir à l’idée d’étendre la clause de confidentialité qui la lie à l’artiste aux réseaux sociaux, et notamment à Twitter, afin d’éviter ce genre de désagréments. Nous serions bien inspirés de réfléchir, à cette occasion, à nos propres pratiques rédactionnelles.

En Grande-Bretagne encore, un footballeur professionnel a également eu à faire face au célèbre site de micro-blogging, mais cette fois, la publication du tweet n’était pas de son fait. Cherchant à protéger sa liaison avec une sulfureuse star de télé-réalité, il avait, sous couvert d’anonymat, obtenu de la Haute cour de Londres une « super injonction » pour que les tabloïds britanniques ne révèlent pas son « secret ». Cette procédure, propre à la Grande-Bretagne, permet, en effet, aux tribunaux d’empêcher les médias, à la demande d’une personnalité, de publier des informations (« the injonction ») ou de révéler l’existence d’une procédure en cours (« the super injonction ») la concernant. Mais c’était sans compter sur Twitter, puisque un internaute, via un compte intitulé « Superinjonction », a révélé l’identité de ce celèbre joueur, enfreignant ainsi la décision de la Cour britannique. Ce dernier a alors décidé d’attaquer directement en justice le site Twitter, ainsi que tous les internautes ayant tweeté l’information.

Toutefois, ses chances d’obtenir gain de cause paraissent assez minces : en raison de la nationalité américaine de la société Twitter, le demandeur britannique risque de se heurter à un problème de loi applicable et de tribunaux compétents. Et il est probable que si Twitter réagit, le site se réfugiera derrière le principe de la liberté d’expression, protégé par le célèbre 1er amendement de la Constitution américaine.

Les conséquences d’un « tweet » peuvent être lourdes. Ainsi, le PDG d’une entreprise avait dénigré un prestataire sur son Twitter personnel ; le tribunal de commerce de Paris a, le 26 juillet dernier, condamné directement la société et non son dirigeant, considérant que ce dernier avait été en contact avec le prestataire à titre professionnel, et non personnel.

Sur Dailymotion

Publier une vidéo sur Dailymotion est tout aussi facile pour l’internaute mais peut s’avérer tout aussi risqué. Nombreuses sont les décisions juridiques qui ont eu à trancher de contentieux mettant en cause la responsabilité du célèbre site de partage de vidéo quant à la diffusion de contenus protégés. Toute la problématique, dans ces affaires, est de déterminer si Dailymotion est hébergeur ou non du contenu, ce qui a un impact considérable sur sa responsabilité.

Par exemple, les célèbres humoristes Omar et Fred, ainsi que leurs sociétés de production, ont notifié à Dailymotion la présence sur son site de partage de vidéos de quatre séquences de l’un de leur spectacle, lui demandant de retirer ce contenu portant atteinte à leurs droits. Constatant que le contenu litigieux était cependant resté en ligne, les demandeurs ont ensuite assigné Dailymotion en contrefaçon (CA Paris, Pôle 5, Ch. 1, 14 avril 2010, n°2008/08604). Dans une affaire similaire, l’humoriste Roland Magdane et ses producteurs avaient agi pour des faits identiques (CA Paris, Pôle 5, Ch. 1, 13 octobre 2010).

Crédit photo : Photos Libres

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