La réforme territoriale,

La réforme territoriale, insuffisamment décentralisatrice ?

Les débats s’animent autour de la réforme territoriale de François Hollande. A l’Institut de la gouvernance territoriale et de la décentralisation, on critique un « réformisme acculé devant les contraintes financières » et on doute du pouvoir réglementaire qui sera effectivement accordé aux régions.

« Il s’agit de transformer pour plusieurs décennies l’architecture territoriale de la République », écrivait François Hollande, président de la République, dans sa tribune publiée dans la presse quotidienne régionale, le 3 juin dernier, pour présenter son projet de réforme. Réduction du nombre de régions, qui passerait de 22 à 14, changement d’échelle des intercommunalités, qui devront regrouper au moins 20 000 habitants à partir du1er janvier 2017, contre 5 000 aujourd’hui, disparition « à terme », du Conseil général… Présentée comme se situant dans la lignée des réformes décentralisatrices initiées en 1982, le projet suscite de nombreux questionnements et critiques, à l’IGTD , l’Institut de la gouvernance territoriale et de la décentralisation. Ce think tank, dédié à la réflexion sur la gouvernance publique par les territoires, est parrainé par de nombreuses associations d’élus locaux. Ce 11 juin, à Paris, la conférence de presse consacrée à la parution du cahier de l’Institut intitulé « Réussir la Région, au service du citoyen, de la croissance et de la République » et rédigé par Romain Pasquier, directeur de recherche au CNRS, a été l’occasion d’un débat sur la nouvelle réforme, avant sa présentation en Conseil des ministres, le 18 juin. A la base, la manière dont a été présenté le projet présidentiel constitue un signe qu’en France, « on n’a toujours pas choisi de trancher entre centralisation et décentralisation », analyse Michel Piron, député de Maine-et-Loire (UDI), co-président de l’IGTD. « Combien de rapports qui n’ont donné lieu qu’à des débuts semblants d’exécution… », rappelle le député. Mais pour Jean-Pierre Balligand (PS), co-président de l’ IGTD, cette fois-ci, le gouvernement n’a plus le choix et ce projet naît d’un « réformisme acculé devant les contraintes financières ».

Reformer l’état central aussi ?

Quant à la réforme proprement dite, elle pourra avoir du sens uniquement à une condition, pose Michel Piron : « qu’elle prenne en compte la gouvernance dans sa globalité du pays. La réforme de l’Etat est indispensable, sans elle, la réforme territoriale échouera. Les deux sont liées. Si on donne des pouvoirs aux régions, l’Etat doit accepter une certaine dépossession, oui ou non ? ». Par ailleurs, sur le point précis de l’attribution du pouvoir réglementaire d’adaptation de la loi attribué aux régions, prévu par le projet, l’élu craint d’éventuelles modalités d’application qui pourraient se révèler très restrictives, par rapport au principe posé. Autre critique portée à la réforme : l’élargissement prévu des intercommunalités. « Il ne faut pas se tromper de question entre élargissement ou approfondissement », estime Michel Piron, pour qui le premier peut nuire au second dans certaines configurations territoriales, dont il faut prendre en compte les spécificités. Jean-Pierre Balligand, lui, avance une comparaison avec le processus européen. Pour l’Europe, « le processus d’élargissement a été catastrophique du point de vue de l’intégration, et donc, il a généré un désir de dislocation. Je crains qu’on ne fasse la même chose avec l’élargissement du périmètre des intercommunalités ». En bref, la réforme pourrait éloigner encore plus les citoyens des institutions politiques. Or, d’après Michel Piron, dans cette réforme, « il y a des économies à faire avec une meilleure architecture, pour éviter les redondances(… ) Mais au-delà de ces questions financières, certes importantes, il y a un véritable enjeu démocratique ».

Le président de Conseil régional, cet illustre inconnu…

Moins de 30% des Français citent spontanément le nom de leur président de Région, d’après un sondage de 2009 cité par Romain Pasquier, dans son cahier de l’Institut. Mais les écarts sont très marqués, avec, à un extrême, Ségolène Royal pour le Poitou-Charentes, citée par 85% des personnes, et François Bonneau, pour la région Centre, par 7% des sondés.

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