Les collectivités publique

Les collectivités publiques sont propriétaires des murs situés à l’aplomb d’une voie publique dès lors que ces murs permettent d’éviter la chute de matériaux.

La question de la propriété des murs séparant la voie publique des résidences privées soulève de nombreuses interrogations. La réponse à cette question n’est pas anecdotique puisque le propriétaire du mur de séparation entre la voie publique et le fonds privé doit, bien entendu, en assumer l’entretien. Un arrêt récent du Conseil d’Etat vient de rappeler aux collectivités publiques qu’elles sont présumées propriétaires de ces murs de soutènement et qu’il n’est pas simple de renverser cette présomption.

Les faits de l’espèce sont classiques de ce type de dossier. Un mur bordant une partie de l’avenue Jules Issac à Aix-en-Provence (Département des Bouches du Rhône) et la propriété d’un riverain n’était pas entretenu depuis de nombreuses années. Des pierres et des matériaux tombaient régulièrement sur la voie publique.

La Commune, considérant que ce mur de soutènement appartenait au riverain a mis ce dernier en demeure de réaliser les travaux nécessaires pour éviter la chute de pierres et de matériaux sur la voie publique. Face au refus du propriétaire, le maire d’Aix-en-Provence lui a, par arrêté municipal, enjoint de prendre les mesures provisoires pour garantir la sécurité publique menacée par l’état du mur de soutènement. Estimant que ce mur ne lui appartenait pas, le propriétaire a, alors, saisi le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté son recours. La juridiction de première instance a, en effet, jugé que la Commune avait, à juste droit, considéré que le mur de soutènement appartenait au riverain dans la mesure où la fonction de ce mur était de maintenir les terres de ce dernier. Saisi en cassation, le Conseil d’Etat va censurer le raisonnement du tribunal administratif en considérant que les murs situés à l’aplomb de la voie publique, même s’ils permettent de soutenir les terres des riverains, ont pour principale fonction d’éviter la chute de matériaux sur la voie publique. Dès lors, selon la Haute Juridiction administrative, ces murs de soutènement constituent un accessoire de la voie publique et relèvent donc de la propriété de la collectivité publique. Le Conseil d’Etat annule, donc, l’arrêté municipal, ce qui oblige la Commune d’Aix-en-Provence à financer et réaliser les travaux nécessaires à sécuriser le mur de soutènement.

Cet arrêt du Conseil d’Etat fournit une « grille de lecture à jour » pour déterminer si un mur de soutènement appartient au riverain ou à la collectivité publique.

Tout d’abord, lorsque le juge est confronté à une question de propriété d’un mur jouxtant une propriété privée et une route communale, avant même de s’intéresser à la fonction du mur, il vérifie les titres de propriété permettant de déterminer si ce mur appartient à la personne privée ou à la collectivité. Lorsque les titres de propriété sont silencieux sur la propriété du mur, le juge va examiner le rôle joué par le mur litigieux pour déterminer si ce dernier appartient à la collectivité publique ou au riverain. Utilisant la méthode du « faisceau d’indices », le juge présume que le mur de soutènement appartient à la collectivité publique. La personne publique ne peut renverser cette présomption que si elle arrive à démontrer que la fonction du mur est de soutenir les terres privées, et non de soutenir les « terres publiques ». C’est cet état du droit qui a conduit le tribunal administratif de Marseille à considérer, dans le cas d’espèce, que le mur appartenait au riverain puisque sa fonction est de soutenir les terres du fonds privé.

Le Conseil d’Etat va, toutefois, dans l’arrêt commenté, apporter une importante dérogation à cet état du droit qui semblait stabilisé.

Constatant que le fonds privé se trouve en aplomb de la voie publique, le juge va, en effet, prendre en compte le fait que le mur litigieux permet d’éviter la chute de pierres et de matériaux sur la voirie communale. Le mur litigieux joue, dès lors, un rôle essentiel dans la préservation de la sécurité des passants et des automobilistes, et devient, à ce titre, un accessoire de la voirie communale. Le mur litigieux devient, dans ces conditions, une dépendance du domaine public communal et son entretien relève de la seule responsabilité de la Commune. L’apport essentiel de cet arrêt est d’indiquer clairement que les murs de soutènement qui permettent d’assurer la sécurité des usagers de la voirie publique appartiennent aux personnes publiques, et ce même s’ils permettent, également, de soutenir les terres privées.

Les collectivités publiques ne peuvent plus renverser la « présomption de propriété » qui pèsent sur elles en se contentant de démontrer que le mur litigieux a pour fonction de soutenir les terres des riverains.

Elles doivent, désormais, également démontrer que ces murs n’ont pas objet d’éviter la chute de pierres ou de matériaux sur la voie publique.

Cette démonstration va s’avérer des plus difficiles lorsque, comme dans le cas d’espèce, les murs ont été construits en bordure d’une voie publique creusée dans une colline ou une falaise.

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