Maître Vouillon : "Notre

Maître Vouillon : "Notre profession s’adapte à un nouvel environnement"

Loi de modernisation de l’économie, Justice pour le 21ème siècle, création de nouvelles études, divorce, négociation immobilière... Le point sur l’actualité du notariat dans les Alpes Maritimes.

La négociation immobilière, une nouvelle activité pour les notaires ?

Pas vraiment. En 1982, un arrêté de Pierre Mauroy réaffirmait déjà que l’activité immobilière fait bien partie de notre activité traditionnelle. On ne s’en est pas aperçu dans cette région car, depuis la fin de la dernière guerre, elle n’a été pratiquée qu’au nord de la Loire. Au milieu des années 90, la Chancellerie a confirmé à deux reprises qu’elle est bien compatible avec le notariat car elle n’est pas une activité commerciale pleine et entière mais seulement une activité accessoire de nos offices.

Ne craignez-vous pas d’entrer en concurrence avec les agences immobilières traditionnelles ?

Non, car la négociation immobilière notariale est codifiée par notre déontologie professionnelle. Notre méthode est différente de celle des agences immobilières classiques, qui ont la possibilité de faire du démarchage, de la publicité générale, bref d’avoir une attitude commerciale. Pour nous, c’est différent : notre travail repose sur l’évaluation du bien par étude comparative, notre service ne peut être proposé que si le client consent à négocier sur la base de cette évaluation, nous ne pouvons pas faire de la publicité, etc. Nous œuvrons comme si la vente devait être réalisée le lendemain : autrement dit, s’il y a des difficultés techniques ou juridiques, nous les déminons à l’avance par analyse du dossier. C’est donc une sécurisation pour l’acquéreur et le vendeur, et même pour les agences immobilières qui passent par nous.

La loi "croissance" crée de nouvelles études. Comment réagissez-vous ?

Jusqu’alors, il existait une commission de localisation des offices qui étudiait les endroits où il paraissait raisonnable d’en créer de nouveaux. Ils étaient attribués au mérite, sur concours. Maintenant, ils n’ont rien trouvé de mieux à la Chancellerie que de désigner ces nouveaux offices par... tirage au sort. C’est tout de même surprenant comme méthode. Pour les Alpes-Maritimes, cela représente 53 créations pour 85 déjà existants, soit + 62% ! Pour notre département, le tirage au sort devrait être organisé en septembre à Paris.

La création d’autant de nouveaux offices est-elle justifiée ?

Non. La particularité de notre métier, c’est d’assurer la sécurité juridique du contrat. Il faut donc que nous ayons en mains des justificatifs écrits émanant des mairies, des Départements, des préfectures, etc. Quand tout est réuni, on peut alors proposer aux gens un rendez-vous pour signer. Actuellement, l’inflation législative réglementaire fait que le temps de réunion de ces pièces est devenu de plus en plus long. Mais ce n’est pas du fait du notaire ! Car si quelqu’un a besoin d’un rendez-vous, c’est dans nos études l’affaire de quelques jours, et pas de mois, comme malheureusement dans certaines spécialités médicales.

Ces créations vont-elles provoquer des difficultés aux études déjà existantes ?

C’est bien possible. Augmenter d’un seul coup de 62% le nombre d’offices, cela aura forcément un impact. Mais cela sera vrai aussi pour ceux qui vont être créés. C’est une illusion que de faire croire aux jeunes qu’ils vont tout de suite pouvoir tourner à plein régime quand ils auront à côté des études implantées depuis très longtemps, qui font un travail correct, avec une clientèle fidèle. Cela dit, nous ferons tout pour bien les accueillir.
On a cru comprendre que le divorce par consentement mutuel vous a
opposé aux avocats...
Je veux d’abord dire que, eux et nous, partageons une conception commune : nous sommes des professions libérales. Opposer nos deux professions, c’est entrer dans le jeu de l’exécutif qui veut nous raboter. J’ai le sentiment, comme d’autres, d’être dans cette affaire un bouc émissaire. Cela dit, il n’y a pas de concurrence avec les avocats, chacun est dans son rôle, et s’il doit y avoir des difficultés, ce sera de façon très marginale.

Quel est le rôle du notaire dans ce nouveau divorce ?

Il intervient sur les enjeux patrimoniaux et, comme officier public, pour "essentialiser" le contrat conclu par les avocats. La vraie problématique, c’est que l’État a voulu déjudiciairiser le divorce pour faire des économies. Car le budget de la justice n’a pas été assez augmenté pour assurer son bon fonctionnement.

Les notaires investissent aussi le domaine du conseil aux entreprises...

En région parisienne, en raison de l’éco-système, des avocats, des experts-comptables et des notaires travaillent déjà depuis longtemps avec les entreprises pour les conseiller. Nous, notaires, sommes des spécialistes du droit civil, du patrimoine de l’immobilier et nous sommes donc fréquemment interrogés par des chefs d’entreprise sur ces sujets. Il n’y a pas de concurrence ou de nouveau marché : nous sommes très légitimes sur ces questions.

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