
Rapport CGLPL - Conditions de détention à la maison d’arrêt de Grasse : surpopulation, insalubrité et manque de moyens humains
- Par Valérie Noriega --
- le 5 mars 2025
La Contrôleure générale et une équipe de huit contrôleurs ont visité la maison d’arrêt (MA) de Grasse, située dans le département des Alpes-Maritimes (06), du 5 au 15 février 2024. Cette mission constituait une troisième visite, la dernière datant de 2014. Entre surpopulation, vétusté des infrastructures, manque de personnel et carences dans l’accès aux soins, la situation des détenus reste préoccupante pointe le rapport publié le 26 février.
Une surpopulation chronique, mais en baisse
Lors de la visite effectuée du 5 au 15 février 2024, les contrôleurs ont relevé un taux d’occupation de 126,8 %. Un chiffre en légère amélioration par rapport à 2014 (143,4 %), mais qui demeure bien au-delà des capacités théoriques de l’établissement. Cette surpopulation concerne particulièrement le quartier des hommes (QMAH), où les cellules sont souvent partagées par plusieurs détenus. Le quartier des mineurs (QM), déjà critiqué en 2014, continue de souffrir d’un manque d’équipements et de la proximité avec le quartier des hommes entraînant tensions et incidents.
Des conditions matérielles très dégradées
Le rapport souligne une dégradation avancée des infrastructures. Dans les cellules, sols encrassés, murs détériorés, sanitaires vétustes et mobilier insuffisant sont le quotidien des détenus. Les douches collectives, quant à elles, sont qualifiées d’« insalubres », avec des plafonds moisis, des robinets entartrés et des évacuations défectueuses. Cafards et souris prolifèrent, aggravant encore les conditions de détention. Les cours de promenade, en particulier celles du quartier des mineurs, sont dans un état de délabrement avancé et ne disposent d’aucun équipement.
Un personnel pénitentiaire en sous-effectif
Autre point noir du rapport : un manque criant de personnel. 35 % des surveillants sont encore en formation, ce qui affecte directement la gestion des mouvements de détenus. Résultat : des attroupements réguliers aux grilles, des retards pour l’accès à l’école ou aux activités, et un climat de tension permanent. Le greffe pénitentiaire est également en difficulté, avec 140 dossiers en attente de vérification. Ce manque de moyens humains entraîne des erreurs dans les notifications judiciaires, compromettant les droits des détenus.
Des perspectives limitées pour la réinsertion
Malgré l’existence de locaux adaptés, la formation professionnelle est à l’arrêt, faute d’organisation et de formateurs. L’accès au travail reste lui aussi très limité : seuls 20 % des détenus en bénéficient, tandis que 400 autres attendent un emploi. La restauration, bien que jugée correcte sur la qualité, est insuffisante en quantité, et les horaires de distribution des repas ne respectent pas les cycles alimentaires recommandés.
Un accès aux soins entravé et un risque suicidaire alarmant
L’offre de soins somatiques repose sur trois médecins libéraux tournants, mais les soins psychiatriques sont insuffisants, avec des délais d’attente importants. Aucun pédopsychiatre n’intervient auprès des mineurs. Le rapport dénonce également des pratiques attentatoires à la dignité, comme l’usage systématique des moyens de contrainte lors des consultations médicales et même en bloc opératoire, en violation du secret médical. Le risque suicidaire est particulièrement préoccupant : le nombre de suicides sur les deux dernières années est le double de la moyenne nationale. Lors de la visite, quatre tentatives ont eu lieu en une semaine, dont deux nécessitant une hospitalisation. L’absence de suivi pluridisciplinaire et de mesures individualisées de prévention renforce ce danger.
Pour prendre connaissance du Rapport complet de visite 5 au 15 février 2024 et des recommendations établies – 3ème visite Maison d’arrêt de Grasse, cliquez ici.