Rupture conventionnelle

Rupture conventionnelle pour motif économique : une liberté sous contrôle…

L’employeur peut-il procéder à une rupture conventionnelle qui a une cause économique ? C’est à cette question que vient de répondre la Cour de cassation, dans un arrêt important , et attendu, le 9 mars dernier.

Il faut d’abord rappeler que le législateur n’exclut pas la possibilité de conclure des ruptures conventionnelles ayant une cause économique, en dehors des plans de sauvegarde de l’emploi (Code du travail, art 1237-16). Le ministère du Travail a d’ailleurs fait le point sur cette question, dans une instruction du 23 mars 2010, en des termes dépourvus de toute ambigüité : « la rupture conventionnelle résulte de la volonté des parties au contrat de travail, sans qu’il y ait lieu d’en rechercher le motif. En conséquence, une rupture conventionnelle peut intervenir alors même que l’entreprise rencontre des difficultés économiques qui l’amènent à se séparer de certains de ses salariés ». Toutefois, il incombe à l’administration, dans le cadre de ses vérifications, de contrôler que le consentement du salarié a été donné de manière libre et éclairé et qu’il a bénéficié de l’ensemble des informations sur l’étendue de ses droits.

Une position conforme à celle de l’administration

Ceci étant, il convient de s’interroger sur l’éventuelle prise en compte des ruptures conventionnelles dans les licenciements économiques pour le déclenchement d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Sur ce point, l’article 12 de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 dispose que “les ruptures conventionnelles ne doivent pas porter atteinte aux procédures de licenciements collectifs pour cause économique engagées par l’entreprise”. Autrement dit, la rupture conventionnelle ne peut donc être utilisée comme un moyen de contourner les règles du licenciement économique collectif et, de priver ainsi les salariés des garanties attachées aux accords de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC) et aux plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) (Instruction DGT n° 02, 23 mars 2010).
Cette position est consacrée par la chambre sociale de la Cour de cassation, dans son arrêt du 9 mars, en des termes clairs : « lorsqu’elles ont une cause économique et s’inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituent la ou l’une des modalités, les ruptures conventionnelles doivent être prises en compte pour déterminer la procédure d’information et de consultation des représentants du personnel applicable, ainsi que les obligations de l’employeur en matière de plan de sauvegarde de l’emploi ».

Pas d’action en nullité pour le CE

Enfin, la décision de la Haute jurdiction rappelle que le comité d’entreprise (CE) et les syndicats ne sont pas recevables, faute de qualité, à demander l’annulation de ces conventions de ruptures auxquelles ils ne sont pas parties, une telle action ne pouvant être exercée que par les salariés concernés. A contrario donc, une action individuelle de chaque salarié concerné serait recevable. Notons toutefois que « le recours juridictionnel doit être formé, à peine d’irrecevabilité, avant l’expiration d’un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention » (C. trav art L. 1237-14 al 4).

Par François TAQUET,
avocat,
conseil en droit social

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