Ruptures conventionnelles

Ruptures conventionnelles : le déclin est amorcé

Plus d’un million de ruptures conventionnelles homologuées par
l’administration depuis août 2008 ! Alors que les chiffres parlent
d’eux-mêmes pour démontrer l’intérêt que portent les employeurs
et les salariés à la rupture conventionnelle, alors que ce mode de
rupture atypique de la relation de travail avait été imaginé à l’origine
par les partenaires sociaux dans un accord interprofessionnel
conclu le 11 janvier 2008, alors que, pour une fois, le système
retenu se révélait assez simple à mettre en oeuvre et accessible, il
faut bien constater que, tant le législateur que la Cour de Cassation,
semblent décidés à venir jouer les trouble-fête.

Le législateur d’abord !

L’article 21 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013
assujettit au forfait social de 20% les indemnités versées à l’occasion
de la rupture conventionnelle du contrat de travail. Cette mesure
s’applique depuis le 1er janvier 2013. Ce faisant, le législateur a
créé une différence substantielle de traitement avec les indemnités
conventionnelles de licenciement. Or, 20% c’est beaucoup… et c’est
surtout suffisamment significatif pour tenter certains de revenir à des
pratiques pas si lointaines de rupture négociée « camouflée » en licenciement doublé d’un accord transactionnel.

La Cour de Cassation ensuite !

Dans un arrêt du 30 janvier 2013, la Haute juridiction considère que dès lors que la salariée était, au moment de la signature de la rupture
conventionnelle, dans une situation de violence morale du fait d’un
harcèlement moral, l’acte de rupture conventionnelle est nul et produit
les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cet arrêt
fait suite à des décisions comparables rendues par certaines cours
d’appel (CA de Bordeaux du 8 novembre 2012 n° 12/00626 ou CA
de Poitiers du 26 septembre 2012 n° 11/04236).

Dans un second arrêt du 6 février 2013, la Cour de Cassation précise
que la rupture conventionnelle produit les effets d’un licenciement
sans cause réelle et sérieuse dès lors que l’employeur n’a pas remis
un exemplaire de la convention au salarié. Or, aucun texte propre à
la rupture conventionnelle ne prévoit expressément une telle remise.
Il est par contre exact, conformément à l’article 1325 du Code civil,
que les actes sous seing privé qui contiennent des conventions
synallagmatiques ne sont valables qu’autant qu’ils ont été faits en
autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intérêt distinct. Au
demeurant, la jurisprudence de la Chambre civile de la Cour de cassation,
considère que l’inobservation de l’article 1325 du Code civil
n’entraîne pas la nullité de la convention elle-même, mais prive seulement
l’écrit de sa force probante.
S’il faut naturellement accepter que la Cour de Cassation joue son
rôle, voilà qui ne manque cependant pas de générer pour les entreprises,
qui n’en avaient sans doute pas besoin, une nouvelle zone
d’insécurité juridique s’agissant de ce mode de rupture du contrat
de travail. En outre, le risque de voir se multiplier les contentieux à
l’initiative des salariés est réel, ce d’autant que la Cour de Cassation
devrait aussi se prononcer prochainement sur une autre question susceptible
d’affecter la validité de la rupture conventionnelle : l’absence
de tout litige entre l’employeur et le salarié concomitamment à sa
signature.

A quand la convention Unedic ?

ll ne manquerait plus que la prochaine convention UNEDIC, que
les partenaires sociaux doivent prochainement renégocier pour une
entrée en vigueur au 1er janvier 2014, vienne mettre en place un
régime d’indemnisation spécifique moins favorable pour les salariés
ayant rompu leur contrat dans le cadre d’une rupture conventionnelle
et il y a fort à parier que la rupture conventionnelle telle que nous la
pratiquons aujourd’hui, aura vécu !
En tout état de cause, il va falloir d’ores et déjà réfléchir à deux fois
avant de se lancer aveuglément sur le terrain de la rupture conventionnelle.
Une étude préalable sur le coût, le risque et d’une façon plus
générale, l’intérêt de recourir à ce mode de rupture, va dorénavant
s’imposer. Un conseil : n’hésitez pas à faire appel à votre avocat
conseil habituel !

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