Sécheresse : état d'alerte

Sécheresse : état d’alerte pour les Alpes-Maritimes

Le département est au régime sec. Le préfet a pris des arrêtés pour limiter les conséquences de l’absence de précipitations sur les Alpes-Maritimes. Explications

En matière de pluie, le ciel ne s’est pas montré généreux avec les Azuréens sur la période allant d’octobre 2021 à mars dernier : le niveau des précipations a été inférieur de 50% en moyenne sur le département, davantage par endroits, par rapport à une année normale. Ce furent même l’automne et le printemps les plus secs depuis ... 1959 ! Cette absence de précipitations se voit de façon évidente sur des cours d’eau à bas étiage, sur la végétation avec des arbres assoiffés et déjà en avance sur l’automne avec des feuilles jaunies.
Une situation suffisamment préoccupante pour que Bernard Gonzalez le préfet des Alpes-Maritimes déclenche dès mars dernier (!) une "vigilance sécheresse" sur l’ensemble du 06. On n’en est plus là : depuis, plusieurs arrêtés préfectoraux ont été pris pour limiter les usages non-indispensables de l’eau. Plus question d’arroser les jardins même de nuit, réduction de 60% du volume accordé à l’industrie, etc. Il s’agit de "garantir des usages prioritaires, et plus particulièrement (pour) la santé, la sécurité civile, l’approvisionnement en eau potable et les préservations des écosystèmes aquatiques" justifie le représentant de l’état.

"Des comportements responsables"

Le préfet Bernard Gonzalez a pris de nombreux arrêtés "sécheresse" dès le mois de mars ©S.G

Si en surface la situation est "visiblement" préoccupante, elle ne l’est pas moins sous terre, avec des nappes phréatiques qui n’ont pu se reconstituer à l’hiver et au printemps. Et ce ne sont pas les orages, même violents comme celui de la fin juin, qui pourront inverser la tendance. En conséquence, les vallées de la Siagne, du Loup, de l’Artuby, de la Brague, de l’Esteron, des Paillons sont placées sous étroite surveillance, avec des restrictions d’usage pour leurs habitants.
La préfecture alerte  : "Ces mesures pourront être durcies ou prolongées, en fonction de l’évolution de la situation. Il est rappelé que les services de l’État procèdent à des contrôles réguliers, qui ne sont pas seulement à vocation pédagogique mais peuvent donner lieu à des rapports de manquement administratifs ainsi que des procès-verbaux. Au-delà des suites administratives, tout contrevenant s’expose à une contravention de cinquième classe (1 500 euros d’amende par infraction constatée)".
Elle recommande donc "des gestes appropriés et des comportements responsables qui permettent d’économiser l’eau". 25% de la consommation relève de la sphère domestique. Il faut donc "privilégier les douches, installer des équipements sanitaires économes en eau, faire fonctionner les appareils de lavage à plein, réutiliser l’eau de pluie..."

Qui dit sécheresse, dit aussi risque de feux de forêts

La situation des eaux de surface au 25 juillet : en orange, "alerte renforcée", en rouge "crise", en gris "vigilance" et en jaune "alerte simple". Un tableau d’ensemble assez inquiétant. © Ministère de la Transition écologique

"Nous faisons face à des phénomènes climatiques extrêmes qui nécessitent une vigilance et une mobilisation de tous les instants" alerte de son côté Charles-Ange Ginésy, président du Conseil départemental et à ce titre "patron" du SDIS. "Plus tôt que les années précédentes, j’ai demandé que tout le département entre en alerte feux de forêt avec une mobilisation totale des sapeurs-pompiers et des agents de FORCE 06", explique-t-il. Ainsi 365 hommes sont mobilisés dans les casernes et prêts à intervenir, les guets terrestres ont été armés dès la mi juin avec quinze jours d’avance, une quinzaine de patrouilles "prépositionnées" sont à pied d’œuvre dans les massifs forestiers, l’hélicoptère bombardier d’eau paré à décoller depuis sa base de Valbonne et des rondes effectuées sur les massifs boisés par des drones...

Faire "feu de tout bois" pour éviter les conséquences néfastes de la sécheresse, préparer l’avenir en prenant en compte la réalité météo qui a déjà vu le nombre des catastrophes naturelles d’origine climatique ou hydrologique être multiplié par cinq au cours des 50 dernières années. Le nouveau rapport du GIEC nous promet des phénomènes extrêmes et des épisodes de sécheresse en intensification...

Face à ces menaces, l’action individuelle sera prédominante.
Mais les collectivités ont aussi leur rôle à jouer.

Ci-dessous, quelques initiatives prises dans les Alpes-Maritimes

- 1. Christian Estrosi a demandé à Elisabeth Borne de pouvoir réutiliser les eaux usées préalablement traitées pour le nettoyage des voiries et l’alimentation des fontaines décoratives. "En utilisant 7% de nos eaux usées, nous économiserions 5 millions de mètres cubes par an et pourrions alimenter l’intégralité des besoins en eau brute de la collectivité".
En attente de
réponse.
- 2. Il est nécessaire de rénover/remplacer des milliers de kilomètres de canalisations, dans les villes et villages, comme en rase campagne. Ces réseaux anciens laissent perdre par des fuites un volume d’eau important qu’il devient nécessaire d’économiser dans le contexte de réchauffement et de sécheresse actuel.
L’aide de l’état sera indispensable aux côtés des collectivités pour financer ces travaux.
- 3. La Métropole NCA a réalisé des investissements importants (143 M€ en huit ans) pour sécuriser l’alimentation en eau potable. Elle annonce que 99,7% de la population est ainsi "garantie". Par ailleurs, elle a distribué aux communes des "kits" permettant d’économiser la ressource (de l’ordre de 20%).
- 4. En marge des économies d’eau, la Métropole NCA annonce vouloir "accélérer la végétalisation de son territoire" et privilégier l’utilisation de revêtements clairs dans les nouveaux projets d’aménagements pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, absorber la chaleur par la chaussée et lutter contre les îlots de chaleur.
- 5. Les collectivités territoriales, des usagers et des acteurs socio économiques, les services de l’État et les financeurs se réunissent au sein de la Commission Locale de l’Eau (CLE) pour élaborer le schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Parmi les objectifs, celui de limiter les coûts d’entretien et de favoriser les échanges entre le fleuve et la nappe souterraine pour préserver la ressource en valorisant les milieux naturels de la basse vallée du Var. Il s’agit aussi, c’est paradoxal, de limiter les effets des crues qui peuvent être dévastatrices.

Photo de Une : la végétation souffre du manque d’eau ©VN

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