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UCEJAM - LES VICES CACHÉS ET L’EXPERT DE JUSTICE - 1/4

Les Petites Affiches sont partenaires de l’UCEJAM 06 et à ce titre publient chaque année le compte-rendu complet des séances de formation à la Faculté de Nice de l’année écoulée.
Nous vous proposons de découvrir l’excellence de ces formations à compter de ce jeudi et pour quatre semaines. Vous trouverez ci-dessous la formation présentée par Anne Trescases sur les Vices cachés et l’expert judiciaire.

LES VICES CACHÉS ET L’EXPERT DE JUSTICE

- Exposé du 15/04/2014 de Madame Anne TRESCASES, Maître de conférences, Université Nice Sophia-Antipolis, GREDEG-CREDECO, UMR 7321

Le contractant déçu ou qui veut faire état d’un préjudice, dispose aujourd’hui d’un arsenal d’actions impressionnant, parfois difficile à distinguer dans la pratique.

Le chevauchement des obligations dues au contractant et des garanties à sa disposition rendent le travail de qualification du juge de plus en plus complexe.
Ainsi, distinguer le vice caché de la délivrance non conforme ou encore de l’erreur devient presque un exercice périlleux pour un juge, en l’absence de connaissances techniques suffisantes et ce, notamment, en raison de la complexification des biens.

L’expert est alors sollicité, pour tenter de lever les doutes sur le défaut affectant la chose vendue ou encore louée (1), afin de permettre au juge de l’aider à rendre une décision en droit conforme à une donnée de fait.

L’expert judiciaire est donc devenu au fil du temps un maillon essentiel dans la démonstration de ce vice, notamment en matière de contrat de vente, lequel concentre encore l’essentiel des problèmes en matière de vices cachés, même si d’autres contrats sont susceptibles d’être concernés.

Si sa désignation n’est pas indispensable (2), elle est cependant devenue courante pour optimiser le travail du juge lorsque celui-ci « considère qu’il ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer » et, plus particulièrement, lui fournir des renseignements techniques de nature à l’éclairer (3) sur un ou plusieurs points déterminés (4).
Ainsi, lorsqu’une ou plusieurs incertitudes d’ordre technique ou encore scientifique persistent, un expert est généralement désigné par le tribunal afin de contribuer à la manifestation de la vérité, laquelle est l’enjeu fondamental du procès.

En matière de vices cachés, spécificité française, le juge - qu’il soit civil ou administratif (5) - attend donc de l’expert qu’il conclue expressément à l’existence d’un vice de fabrication, caractérisant un vice caché, dans des termes qui doivent être à la fois clairs et précis.

Le rapport d’expertise qui sera remis au juge est alors destiné à lever toutes ambiguïtés sur ce point. Il n’est à aucun moment demandé à l’expert de se substituer au juge, il en est l’auxiliaire pour contribuer à faire connaître les défauts dans leurs causes et leur amplitude (6).

À ce titre, il devient un soldat de la preuve.

La figure du soldat n’a pas été choisie au hasard. Doté d’une expertise technique reconnue qui lui permet de prétendre au titre d’expert, ce dernier doit aussi s’armer progressivement sur le plan juridique pour accomplir au mieux les missions qui lui sont confiées. Sans vouloir transférer à l’expert le travail de qualification, défi qui relève sans discussion exclusivement des juges du fond, l’expert doit néanmoins posséder un « éclairage » juridique suffisant destiné à contribuer à l’optimisation de son travail en qualité de technicien. Cet éclairage est d’ailleurs peut-être la première raison d’être de la formation procédurale à laquelle est tenu l’ensemble des experts inscrits.

Dans la bataille judiciaire du vice caché, l’expert peut donc être présenté comme l’éclaireur du juge.

Dans l’armée, l’éclaireur est un soldat qui a pour mission de partir en reconnaissance pour observer le terrain et recueillir des informations qui seront utiles au reste du groupe.
Comme l’éclaireur qui est choisi par ses supérieurs en raison de son bon sens de l’observation et de sa bonne connaissance du terrain, l’expert est désigné par le juge en fonction de ses compétences pour l’aider à déceler si un défaut constitue ou non un vice caché.
Afin d’accomplir de manière optimale la mission qui lui a été confiée, l’expert devra procéder par étapes, tel un soldat qui avance prudemment sur une ligne de front.

L’expert possède tout d’abord un rôle primordial dans la découverte du vice (I).
Il peut ensuite avoir un positionnement stratégique dans le règlement de ses conséquences, lorsque sa mission le prévoit (II).

I. L’EXPERT EN PREMIÈRE LIGNE DANS LA DÉCOUVERTE DU VICE CACHÉ

La non conformité peut donner lieu à de nombreuses actions de la part du contractant.
Si les intérêts pratiques attachés à la distinction des différentes actions à la disposition du contractant sont nombreux, les frontières sont pourtant parfois difficiles à tracer et l’intervention de l’expert devient alors primordiale (A).

Le travail de l’expert est d’autant plus important aujourd’hui qu’après un flottement jurisprudentiel et doctrinal, qui admettait une option entre les différentes actions de l’acquéreur chaque fois que les qualifications paraissaient en concurrence, a finalement été retenu en grande majorité le caractère spécial et exclusif des actions en garantie.

En d’autres termes, en l’absence désormais d’une conception large de la non-conformité, l’erreur n’est plus permise entre les différentes actions. La marge de manoeuvre étant réduite, il convient ensuite de partir à la conquête des critères de définition du vice caché pour aider l’expert à remplir de manière optimale la mission qui lui aura été confiée par le juge (B).

A. Les frontières mal délimitées entre le vice caché et les autres défauts

Il est désormais admis que c’est généralement le rapport de l’expert qui fait apparaître le vice caché. Malheureusement, la question de savoir si un défaut constitue ou non un vice caché est toujours aussi difficile à trancher, raison pour laquelle le concours de l’expert est souvent requis afin d’éclairer le juge dans son travail de qualification, voire de requalification (7).

Il convient en effet de relever que les frontières entre le vice caché et les autres défauts ne sont pas toujours bien délimitées, ce qui ne va pas faciliter le travail de l’expert, dont la mission est pourtant primordiale puisque si l’arsenal des actions offertes à l’acheteur est imposant, ce dernier ne peut pas disposer à sa guise de toutes les armes possibles.

Les enjeux de la distinction sont en effet désormais décisifs - 1-, notamment lorsque l’indemnisation ne peut plus être recherchée que sur un seul terrain -2- .

1. La revue de l’arsenal des actions concurrentes offertes à l’acheteur.

Certains défauts résistent à l’exercice de la qualification comme en témoignent les nombreuses décisions jurisprudentielles en la matière. Il devient même périlleux de les classer sans discussion dans l’une des catégories proposées et les divergences jurisprudentielles en la matière renforcent ce sentiment de confusion.
La difficile distinction entre vice caché et défaut de conformité n’est qu’une partie d’un problème plus général, celui des nombreuses actions (8) dont dispose l’acquéreur insatisfait ou victime de dommages : sans prétendre à l’exhaustivité, le vice caché et le défaut de conformité mais aussi l’erreur sur les qualités substantielles (C.civ., art. 1110), le dol (C.civ., art. 1116) et le défaut de sécurité (C.civ., art. 1386-1 et s.) rendent urgente une réflexion d’ensemble.

L’observation du terrain miné de la querelle vice caché/défaut de conformité permet d’illustrer cette difficulté.

En théorie, la remise d’une chose qui n’est pas conforme aux stipulations contractuelles entraîne la résolution de la vente et parfois même la responsabilité contractuelle du vendeur, sans qu’il soit nécessaire de recourir aux conditions de la garantie.
A priori, il parait donc simple de différencier le défaut de conformité et le vice caché.

En pratique, l’utilisation du critère conceptuel lié à la destination de la chose ne rend pourtant pas toujours aisée cette distinction et les deux institutions sont susceptibles de se chevaucher, alors que les effets de la garantie et les sanctions de l’inexécution de l’obligation de délivrance ne sont pas identiques.

Face à ces difficultés de qualification et afin d’unifier la conformité et la garantie des vices cachés comme c’est le cas en droit international (9), une partie de la doctrine suivie par la jurisprudence avait un temps proposé d’élargir la notion de délivrance
conforme à la conformité fonctionnelle (10).
Après quelques années de confusion de ces notions et/ou de leurs domaines d’application (11), la jurisprudence est cependant revenue à la distinction traditionnelle entre non-conformité et vice caché (12).

En France, le pluralisme demeure donc le droit commun des effets de la vente. Ainsi, les défauts qui rendent la chose impropre à son usage normal seraient des vices cachés au sens de l’article 1641 du Code civil.

Le vice caché est donc un défaut objectif et absolu qui affecte l’usage de la chose, alors que le défaut de conformité lui est subjectif et relatif puisqu’il est défini par rapport à la destination contractuelle de la chose convenue par les parties.
Lorsqu’un vice de conception n’est pas décelable lors de la vente mais qu’il rend finalement la chose impropre à l’usage auquel elle était destinée, il ne peut donc être question que d’un vice caché pour les juges (13).

En simplifiant beaucoup les choses, il serait possible de dire que la non conformité s’analyserait au moment de la livraison de la chose alors que le vice caché prendrait le relais si le défaut apparaissait bien après la livraison.
Il ressort de ce qui précède que l’expert mandaté pour analyser le défaut en cause, doit obligatoirement s’intéresser aux stipulations contractuelles lorsqu’elles existent.
En effet, avec un peu de chance, ou plutôt de rigueur de la part de l’acheteur, ce dernier aura pris le soin de faire inclure dans le contrat les qualités évidentes qui sont attendues par lui de la chose. Et l’expert pourra alors se borner à regarder si le défaut allégué entrave une qualité essentielle que l’acheteur pouvait légitimement espérer.
Dans la majorité des cas cependant, le contenu du contrat est malheureusement sommaire (plus exactement, il ne contient pas de spécifications particulières sur ce point) ou encore, il ne repose sur aucun écrit.

Dans ces hypothèses, il incombera à l’expert de déterminer lui-même les qualités évidentes qui sont attendues de la chose pour permettre au juge de conclure à l’existence ou non d’un vice caché et d’admettre en conséquence la mise en jeu de la garantie correspondante sollicitée. Il a ainsi été décidé que la garantie des vices cachés est l’unique fondement possible de l’action, lorsque les désordres décrits par l’expert compromettent la solidité de l’immeuble et rendent les combles impropres à leur destination (14). De la même manière, les juges ont considéré que les malfaçons affectant un ouvrage étaient des vices de construction et non des défauts de conformité (15).

Ces deux exemples témoignent de la difficulté à tracer la frontière entre la garantie
des vices cachés et l’obligation de délivrance conforme et de l’importance du travail de l’expert pour aider les parties à s’orienter et au final le juge à la délimiter.

Le terrain de la querelle vice caché/défaut de conformité n’est cependant pas le seul à être miné. La multitude de fondements concurrents dont le contractant dispose pour obtenir la réparation de son préjudice peut en effet conduire l’expert sur la piste d’autres éléments.
Les vices du consentement, notamment le dol et l’erreur sont également souvent invoqués par l’acquéreur pour obtenir la nullité du contrat.
En apparence, aucune confusion n’est possible avec la garantie des vices cachés. En pratique, la distinction peut encore parfois se révéler extrêmement délicate, d’autant que les critères utilisés par la doctrine et la jurisprudence pour les distinguer sont multiples.

Ainsi, pour certains auteurs, l’erreur aurait un côté plus subjectif puisqu’elle porterait que les qualités que l’acheteur envisageait en achetant la chose, alors que le vice caché présenterait un caractère plus objectif puisqu’il concernerait uniquement les services rendus par la chose (16).
Il y aurait donc erreur lorsqu’un des attributs de la chose ferait défaut et vice lorsqu’est affecté l’usage qu’on en attend.

Plus simplement, il pourrait être admis que l’erreur s’apprécie au moment de la formation du contrat alors que le vice caché se situe obligatoirement après la délivrance.

À ce régime d’actions et de garanties déjà complexe, il convient encore de mentionner le régime spécial et optionnel de responsabilité mis en place par la loi n° 98-389 du 19 mai 1998 relative à la responsabilité de plein droit du fait des produits défectueux, insérée aux articles 1386-1 et suivants du Code civil qui permet à l’acquéreur d’agir contre les fabricants et vendeurs professionnels, si le produit acheté ne répond pas à l’attente légitime en matière de sécurité.

Cette action ne concerne donc pas l’inaptitude du produit à l’usage mais son défaut de sécurité. Son domaine est donc plus réduit que la garantie des vices cachés puisque la responsabilité du fait des produits défectueux ne s’occupe que des dommages causés par la chose aux personnes ou à leurs biens. Si le régime de la responsabilité des produits défectueux n’exclut pas l’application d’autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle reposant sur des fondements différents tels que la garantie des vices cachés ou la faute, il n’en n’est pas de même pour toutes les autres actions.

2. Le choix des armes partiellement resserré

Sans nier le chevauchement entre les différentes catégories de vices, la jurisprudence a majoritairement opté pour caractère spécial et exclusif des actions en garantie. L’acquéreur peut ainsi parfois se retrouver privé de l’action fondée sur le droit commun, même si elle lui est plus favorable que le régime de garantie.

Ainsi, dès l’instant où l’expert a pu considérer que les tuiles fournies dont la mauvaise qualité était avancée, étaient impropres à l’usage auquel elles étaient destinées, seule l’action en garantie des vices cachés soumise à l’époque au bref délai pouvait être intentée et non l’action en responsabilité contractuelle (17).

De manière plus générale, si le choix de l’action a été pendant un temps admis, tel n’est plus le cas aujourd’hui. La jurisprudence rejette le concours d’actions et considère que la garantie des vices cachés constitue désormais l’unique fondement de l’action exercée pour défaut de la chose vendue la rendant impropre à sa destination normale. La garantie édilicienne (18) Cass. 1ère civ., 5 mai 1993, pourvoi n° 90-18.331 ; Juris Data n° 1993-000889 ; JCP G 1993, I, 3727, n° 26, obs. G. Viney, D. 1993, p. 506, note A. Bénabent. devient ainsi l’unique fondement possible de l’action exercée (19), sauf en présence d’un dol (20).

En toute hypothèse, le chevauchement des qualifications et la confusion des actions constituent une importante source d’insécurité juridique pour les justiciables qui rend le travail de l’expert d’autant plus impérieux que le concours d’actions est aujourd’hui presque totalement impossible.
Lorsque la défaillance intéresse les qualités de la chose, les conclusions de l’expert deviennent ainsi primordiales pour orienter le juge dans son travail de qualification et lui permettre d’opter pour l’action en garantie prévue par les articles 1641 et suivants du Code civil.

B. À la conquête des critères de définition du vice caché

Le fait qu’aucune indication ne soit donnée, dans le Code civil aux articles 1641 et suivants concernant la nature de cette garantie héritée du droit romain, ne facilite par le travail du juge et a fortiori de l’expert mandaté pour analyser la défaillance du bien litigieux.
Le vice caché est en effet uniquement défini en fonction de ses conséquences. Selon l’article 1641 du Code civil, le vendeur est garant des défauts cachés qui rendent la chose vendue impropre à l’usage auquel elle était destinée ou qui en diminuent tellement celui-ci que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou n’en n’aurait donné qu’un prix moindre.

En termes différents, le vice ouvre droit à garantie lorsqu’il rend la chose impropre à sa destination normale, ce qui signifie que le défaut doit être suffisamment sérieux pour que l’usage habituel ou contractuel de la chose en soit affecté. En dehors de sa gravité, le vice doit être également occulte puisque le texte parle de « défauts cachés » et l’article 1642 exclut expressément de l’empire de la garantie les vices apparents dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même. Il faut encore un rattachement du vice à la chose vendue, ce qui revient à dire que le vice doit être non seulement inhérent à la chose vendue et antérieur ou concomitant à la conclusion du contrat.
Aux difficultés attachées à la réunion des conditions de fond pour mettre en oeuvre la garantie des vices cachés -1-, viennent se greffer des conditions procédurales -2-.

1. Les difficultés attachées aux conditions de fond du vice caché

La victoire d’une bataille dépend de la qualité de ses combattants mais aussi de leur armement. Étant admis que l’appréciation souveraine des juges se fonde essentiellement sur les données contenues dans le rapport d’expertise même si elles ne les lient pas, l’expert sera incontestablement une source précieuse d’approvisionnement pour les juges. Il reviendra ainsi à l’expert de rechercher si le défaut était caché et inconnu de l’acheteur, rattaché à la chose vendue et enfin s’il rendait la chose impropre à sa destination normale.
Les difficultés attachées au caractère caché des désordres ne peuvent pas être sous estimées comme en témoigne une jurisprudence foisonnante en la matière.
L’expert sera ainsi souvent mandaté pour rechercher si le vice était non apparent au moment de la conclusion du contrat. Cette démonstration est primordiale puisque le vendeur n’est tenu que des vices cachés.

Les vices visibles sont en effet exclus de la garantie mais également, par analogie, ceux qui ont été portés à la connaissance de l’acquéreur. À ce titre, un lourd devoir d’information pèse sur le vendeur (21), y compris non professionnel, puisque celui-ci est tenu de porter à la connaissance de l’acheteur tous les éléments de nature à déterminer son consentement. À défaut, il pourra être condamné à lui payer des dommages intérêts en plus de la restitution du prix et ce, comme le vendeur professionnel.
À ce titre, il est intéressant de constater que la jurisprudence apprécie très différemment la connaissance du vice par l’acquéreur.

Il a par exemple été admis que les vices étaient apparents lorsqu’ils étaient expressément mentionnés dans le rapport du contrôle technique remis à l’acquéreur avant la conclusion de la vente (22) et, qu’en conséquence, cette connaissance des vices fermait naturellement l’action prévue aux articles 1641 et suivants du Code civil. Les juges ont également débouté le demandeur de son action en garantie des vices cachés en considérant que l’état avancé de corrosion d’un véhicule est un vice qui pouvait être aperçu au moment de la conclusion du contrat (23).
De la même manière, l’acquéreur qui constate que l’immeuble est infesté de termites n’est ensuite pas fondé à invoquer la garantie des vices cachés dès lors qu’il a été clairement informé de la présence de termites lors de la passation de l’acte authentique, présence confirmée par un état parasitaire positif (24).
L’information donnée à l’acquéreur doit non seulement exister mais elle doit encore être pertinente.
Il a par exemple été jugé qu’il était impossible de reprocher à l’acquéreur, qui a été informé de travaux de remise en état antérieurs compte tenu de la présence de termites, de ne pas avoir soulevé la laine de verre qui recouvrait les bois de la charpente pour s’assurer du bon état de celle-ci au moment de la vente (25). De manière globale, la jurisprudence tend donc à considérer que le vice est apparent
lorsqu’il se révèle à l’acquéreur profane, à l’issue d’une vérification sommaire de la chose26, sans avoir recours à un technicien (27) ou à un expert (28) ou encore au démontage du bien vicié (29).

En résumé, est apparent ce dont l’acquéreur peut se convaincre lui-même, en étant moyennement attentif (30). Lui imposer le recours à une tierce compétence est impossible car cela reviendrait à rajouter à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas (31).
Un défaut apparent n’est pas seulement un défaut visible puisqu’ il a été jugé que le vice était toujours caché lorsqu’il apparaissait lors de la prise de possession mais qu’il ne se révélait que plus tard dans son étendue et sa gravité.

En d’autres termes, ce n’est plus le vice qui est caché mais sa gravité (32).

Ainsi, en présence de défauts plus ou moins visibles lors de la conclusion du contrat, l’expert devra également rapporter la preuve que la gravité véritable ne s’est révélée que postérieurement, après usage (33). Il devra donc rechercher la connaissance de l’amplitude et des conséquences du vice au jour de la vente (34).

Le vice doit non seulement être occulte mais encore inconnu de l’acheteur au moment de la conclusion du contrat.
Concernant ce critère, les juges se révèlent généralement toujours plus indulgents envers l’acheteur profane pour lequel les vices sont très souvent jugés indécelables (35).

Il a ainsi été jugé que le vice devait être considéré comme inconnu de l’acheteur lorsque, au jour de l’acquisition, la vérification élémentaire de l’état du bien opéré par l’acquéreur profane ne lui permettait pas de déceler les défectuosités apparues postérieurement (36) . Sa méconnaissance du vice doit être légitime en somme. Le statut de l’acheteur professionnel de même spécialité que le vendeur est beaucoup moins enviable puisque, dans cette hypothèse, la jurisprudence a été jusqu’à établir une présomption simple de connaissance des vices (37), qui ne cède que par la preuve du caractère indécelable du vice (38). La qualité des parties pourra difficilement être ignorée de l’expert dans la rédaction de ses conclusions.

L’expert devra encore prouver que le vice trouve sa cause dans le bien transmis. Le vice caché est en effet un défaut préexistant au moment de la vente mais qui apparaît après celle-ci. L’expert devra non seulement démontrer que le vice est inhérent à la chose (39) mais encore qu’il est antérieur ou concomitant à la vente. Dans cette idée, l’expert pourra être amené à écarter la responsabilité éventuelle de l’acheteur en démontrant que les désordres en cause ne relèvent ni de défauts d’utilisation, ni de défauts d’entretien de l’acheteur, défauts qui pourraient aboutir à exclure la responsabilité du vendeur. Il semble en effet logique que si le vice ou le dommage résultent d’un fait ou d’une faute de l’acheteur, ce dernier n’est pas fondé à s’en plaindre (40).
Lorsque la garantie joue, en l’absence de faute de l’acheteur, il faut encore faire la preuve du lien de causalité entre l’existence d’un vice caché au moment de la vente et le dommage subi. L’appréciation de l’expert est une nouvelle fois quasi indispensable pour établir ce lien de causalité et, plus précisément, pour rapporter la preuve de l’antériorité des vices par rapport à la vente, preuve qui sera d’autant plus difficile à rapporter que la vente est ancienne (41).

Ainsi, lorsque l’expert émet des doutes quant à l’existence d’un vice caché antérieur à la vente, l’action en garantie des vices cachés de l’acheteur sera généralement rejetée, même en présence d’un vice. C’est ce qu’a décidé la Cour de cassation dans une première affaire en date du 5 juin 2012 suite à l’achat d’un fonds de commerce de production d’énergie électrique.

Les défaillances de l’installation électrique postérieurement à la vente et les réparations qui en ont découlé ont notamment conduit à révéler un dysfonctionnement de la turbine. Malheureusement, l’action en garantie des vices cachés de l’acheteur n’a pas été accueillie dans la mesure où l’expert n’a émis que des hypothèses sur l’existence d’un vice caché antérieur à la vente, en s’appuyant sur un précédent rapport d’expertise qui recherchait les causes de la fatigue initiale et qui en déduisait qu’elle résultait probablement d’un mauvais alignement entre la turbine et le multiplicateur.
Cette absence de certitude concernant l’antériorité du vice par rapport à la vente a donc conduit les juges à rejeter le pourvoi formé par l’acheteur (42).

Dans une autre affaire encore plus récente qui concernait cette fois un véhicule d’occasion qui présentait des dysfonctionnements, les juges ont, par une appréciation souveraine, fondée sur le rapport de l’expert, considéré que les dysfonctionnements ne trouvaient pas leur origine dans des défauts antérieurs à la vente mais relevaient de la vétusté du véhicule (43).
Les seules conclusions techniques de l’expert peuvent ainsi parfaitement faire échec à l’action en garantie des vices cachés diligentée par l’acheteur. Elles se révèlent donc décisives même si en théorie, il convient une nouvelle fois de le rappeler, l’avis de l’expert ne lie pas le juge…

L’expert devra encore évaluer la gravité du vice dans la mesure où le vice doit être en outre rédhibitoire (44). L’importance du vice est un critère décisif qui revient dans de nombreuses décisions. Tel n’est pas le cas si le vice est peu important (45) ou s’il est facilement réparable.

En d’autres termes, l’expert devra indiquer si le bien litigieux est impropre à sa destination. Pour ce faire, l’expert devra considérer la destination normale de la chose vendue, ce qui peut se révéler plus ou moins compliqué selon la destination. Lorsque la destination est invariable, les difficultés sont réduites mais elle peut aussi
dépendre de la volonté des parties et dans ce cas, il conviendra que l’expert se reporte aux stipulations contractuelles pour savoir si le vendeur était informé de cet usage inhabituel, qui doit être prévu dans le champ contractuel. Ainsi, lorsque l’acheteur précise au vendeur l’usage particulier auquel il destine la chose et que celle-ci n’y satisfait pas, l’action qui est recevable n’est plus une action en garantie des vices cachés mais une action en responsabilité pour inexécution de l’obligation de délivrance.

Le vice allégué par l’acheteur doit, par exemple, être de nature à compromettre l’usage du véhicule, destiné à la conduite. L’expert devra donc s’attacher à rechercher si les défectuosités constatées ne sont pas le seul résultat de l’ancienneté du véhicule ou d’une usure normale car l’acquéreur est tenu de supporter l’aléa normal et les inconvénients ordinaires liés à l’utilisation d’un véhicule d’occasion (46).

Ainsi dans une autre affaire qui concernait toujours un véhicule automobile de collection, les juges ont considéré que le vice (qui consistait en une oxydation importante de la carrosserie et un compteur kilométrique erroné) n’était pas suffisant pour faire tomber la vente puisque le véhicule était apte à assurer le déplacement du conducteur (47). C’est à l’expert qu’il reviendra de rechercher quelle est la destination normale attendue d’une chose.

Au final, les juges ont par exemple considéré objectivement que la destination normale pour un bateau est de pouvoir naviguer, pour un brevet d’être exploité, pour un système d’alarme de se déclencher en cas d’intrusion, pour un appartement (ou une maison d’ailleurs) d’être habitable, pour un terrain constructible de ne pas être inconstructible, ou pollué par des hydrocarbures, etc.

En matière immobilière, il a été considéré en revanche que les dommages intermédiaires ne sont pas des vices cachés dès lors que ces défauts ne nuisent pas à la solidité de l’ouvrage, ne le rendent pas impropre à sa destination et ne portent pas atteinte à la solidité ou au bon fonctionnement de ses éléments d’équipement.
Tel est le cas des imperfections de l’immeuble comme des fissures sans gravité,
des défauts de planéité, des zones d’ombres sur une moquette qui peuvent se révéler en outre des défauts apparents, exclus donc de la garantie.

L’expert devra donc le plus souvent rapporter la preuve que le défaut rend la chose inutilisable ou en diminue fortement son utilité pour que la demande en garantie soit accueillie par les juges, étant précisé que ces derniers ont parfois élargi le champ d’application de la garantie des vices cachés en admettant le vice au regard de la loi, indépendamment de la destination et de l’usage de la chose vendue.
Ainsi, dans une affaire, ils ont considéré que l’illicéité de la chose, d’une installation en l’espèce, constituait un vice caché même si l’usage du bien n’en n’était pas altéré conduisant certains auteurs à évoquer la création d’un vice juridique (48). Le vendeur serait ainsi tenu de tous les vices cachés, y compris les vices juridiques.

2. Les conditions procédurales

En 2005 (49), la notion fluctuante du bref délai, relevant traditionnellement de l’appréciation souveraine des juges du fond, a laissé la place à la détermination d’un délai préfix destiné à renforcer la prévisibilité et la sécurité juridique. L’article 1648 alinéa 1er, du Code civil précise désormais que « L’action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. » (50).

Cette modification n’élude malheureusement pas les interrogations qui subsistent concernant le point de départ de ce délai d’une part, et sa durée d’autre part.
En effet, le point de départ de ce délai pourrait tout aussi bien résider dans la découverte du vice caché que dans la simple découverte du problème, du défaut non encore qualifié.
Dans le premier cas de figure, seul le rapport de l’expert permettrait d’acquérir la quasi-certitude que la chose est atteinte d’un vice caché mais alors reste en suspens
le point de savoir comment serait fixé le point de départ du délai lorsqu’aucune expertise n’a été diligentée ? Le point de départ du délai doit remonter à la découverte du problème et se pose alors une question de preuve. L’incidence des mesures d’expertise sur le délai préfix de deux ans est aussi source de débats. Le rapport d’expertise déposé fait courir le délai. La demande d’expertise est un acte interruptif de ce délai, ce qui suppose qu’un événement différent ait marqué son point de départ. Enfin, l’assignation aux fins d’expertise ferait courir la prescription de droit commun (51). En toute hypothèse, selon les dispositions de l’article 2224 du Code civil, l’action en réclamation contre le vendeur se prescrit au maximum au bout de cinq ans après la livraison.

En d’autres termes, l’acheteur qui ne découvre le vice qu’après ce délai perd le droit d’invoquer la garantie. Le délai processuel de deux ans éteignant la garantie
doit ainsi être clairement distingué du délai substantiel de cinq ans d’existence de la garantie.
Lorsque la lettre de mission le prévoit, le travail de l’expert ne s’arrête pas une fois le vice découvert. Il peut encore être amené à évaluer les conséquences de cette découverte.

II. LE POSITIONNEMENT DE L’EXPERT DANS L’ÉVALUATION DES CONSÉQUENCES DU VICE RÉVÉLÉ

Le rôle de l’expert ne se borne donc pas toujours à révéler le vice, sa mission peut se poursuivre une fois le vice découvert, pour en évaluer les conséquences, notamment
pécuniaires.

En effet, les conclusions du rapport d’expertise pourront également aider le juge à déterminer les sommes susceptibles d’être demandées par l’acquéreur victime. Le contenu de l’expertise peut ainsi permettre de fixer l’importance de la partie du prix à restituer à l’acquéreur lorsque l’acquéreur opte pour l’action estimatoire (A) mais aussi
le montant des préjudices indemnisables, à défaut de clause exclusive ou limitative de garantie et en présence d’un vendeur professionnel ou de mauvaise foi (B).

A. L’expert et la fixation de la diminution du prix

Aux termes de l’article 1644 du Code civil, la garantie des vices cachés peut donner lieu au libre choix de l’acquéreur (52 )soit à une action rédhibitoire entraînant la résolution de la vente, soit à une action estimatoire lui permettant de conserver la chose et d’obtenir la restitution d’une partie du prix payé.

Dans l’hypothèse où l’acquéreur devrait opter pour une action rédhibitoire, l’expert sera dispensé de procéder à l’évaluation de la dépréciation du bien suite, par exemple, à son utilisation par l’acquéreur pendant plusieurs mois dès lors que le vendeur n’est plus fondé à solliciter des dommages intérêts résultant de la dépréciation du bien (53). En effet, dans le cas de l’action rédhibitoire, le vendeur ne peut plus obtenir d’indemnité visant à compenser l’utilisation de la chose vendue ou l’usure en résultant (54).

Cette nouvelle position de la cour de cassation est d’ailleurs surprenante et vivement critiquée par certains auteurs qui considèrent que la solution ne tient pas compte des réalités économiques (55) et qu’il y aurait lieu pour les juges de statuer en équité en prévoyant une indemnité du fait de la jouissance du bien, ou de la vétusté du bien ou encore de l’usure résultant de son utilisation (56).
En revanche, lorsque l’acquéreur choisit une action estimatoire, il conserve la chose viciée en obtenant un réajustement du prix payé. Dans ce cas de figure, l’article 1644 du Code civil prévoit en théorie que la restitution du prix à laquelle l’acquéreur peut prétendre est normalement arbitrée par l’expert, ce que rappelle d’ailleurs régulièrement la Cour de cassation (57).

En pratique, les juges, confortés en ce sens par une partie de la doctrine, ne font pas toujours une interprétation littérale de ce texte puisqu’ils admettent, étonnamment, que l’acheteur puisse demander une réfaction du prix, en gardant la chose, sans passer par l’étape de la procédure d’expertise du prix (58).
Il peut tout d’abord sembler curieux d’éluder le concours de l’expert, qui est pourtant prévu expressément par un texte, à une période où son intervention est de plus en plus courante, même lorsqu’elle n’est pas imposée par un texte. Il peut ensuite paraître surprenant de laisser aux parties le soin de déterminer le montant du préjudice en raison des difficultés attachées à son évaluation (59).

Dans tous les cas, il convient de ne pas confondre la fixation (par expert ou non) de cette partie du prix correspondant à la perte d’une qualité attendue de la chose vendue en raison de la présence du vice, avec une indemnité de réparation du préjudice subi que l’expert peut également être amené à déterminer lorsque le vendeur est professionnel ou considéré comme de mauvaise foi.

B. L’expert et la fixation de l’indemnité de réparation du préjudice

Lorsque sa mission le prévoit, l’expert peut encore être amené à préciser le contenu des réparations auxquelles l’acquéreur victime d’un vice caché peut prétendre, dans l’hypothèse où le vendeur connaissait le vice (60).

Il reste encore à savoir quels sont les dommages dont l’acquéreur peut demander réparation au titre de l’article 1645 du Code civil, étant précisé que les dommages et intérêts dont est tenu le vendeur envers l’acheteur peuvent parfaitement excéder la valeur du prix de la chose. Le vendeur est tenu de réparer tous les dommages subis par l’acquéreur à l’occasion d’une action en garantie -1- mais aussi indépendamment -2-.

1. Les dommages indemnisables

Les dommages liés à l’obligation légale propre au vendeur de garantir l’acquéreur des vices cachés de la chose vendue ne sont pas les seuls à pouvoir faire l’objet d’une réparation (61). En effet, une interprétation large et communément admise de l’article 1645 du Code civil considère que les dommages consécutifs doivent être également indemnisés. Le vendeur professionnel est ainsi tenu, « outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur ». L’expert sera donc amené à distinguer les dommages causés à la chose, de ceux qui sont causés par la chose.

En dehors des dommages affectant la chose viciée et qui dépendent de la chose litigieuse, l’expert peut ainsi être amené à chiffrer le coût de la suppression du vice, c’est-à-dire le montant de la réparation. Afin d’orienter l’acheteur dans son choix, il est important que l’expert indique aussi si l’objet est réparable et dans l’affirmative qu’il chiffre le montant le plus exact possible des réparations. La réparation ne peut cependant pas être imposée à l’acheteur par le vendeur. Lorsque la réparation se révèle impossible, il semble opportun que l’expert fixe encore le coût du remplacement par le vendeur et ce même si cette possibilité n’est pas encore prévue dans les textes (62).

La réparation ne gomme pas tout le dommage souffert comme le soulignait déjà un auteur en 1998 (63). Les désordres qui ont affecté le bien acheté ont pu causer d’autres désordres, souvent beaucoup plus importants, que l’expert doit également s’attacher à évaluer.
Ces désordres peuvent être aussi bien matériels qu’immatériels. On peut imaginer sans mal que l’acquéreur ait pu subir des perturbations, des retards, des dommages économiques.

Les dommages consécutifs sont les préjudices que constituent la suite nécessaire ou l’accessoire du dommage principal.
Dans un arrêt rendu par la chambre commerciale le 19 mars 2013 (64), les juges ont admis le jeu de l’action de l’article 1645 du Code civil pour les pertes et surcoûts consécutifs à la défaillance de deux rotatives.

Dans le cadre d’un vice caché affectant un immeuble par exemple, l’expert peut aussi être amené à chiffrer les troubles de jouissance occasionnés par le vice, la perte de la valeur de l’immeuble liée au vice, le coût du prêt pour financer les travaux de remise en état du bien et plus généralement, de tous les effets dommageables attachés à la présence du vice tels que les pertes de loyers, des dommages causés au mobilier.
Dans le cadre d’une vente de véhicule en mauvais état, les juges ont été jusqu’à rendre le vendeur responsable du dépôt de bilan de l’acheteur (65).
L’interprétation large du texte complique incontestablement le travail de l’expert lorsque la mission rédigée par le juge a été formulée en termes généraux. Le préjudice réparable doit être entendu de manière large puisque le vendeur est par exemple tenu de supporter toutes les conséquences dommageables subies par l’acquéreur du véhicule affecté de vices cachés.

En matière de vice caché affectant un véhicule terrestre à moteur par exemple, l’expert devra évaluer le préjudice constitué par la privation de jouissance du véhicule.
Il conviendra également de ne pas omettre le remboursement des éventuels frais d’expertise amiable ou encore celui des travaux infructueux réalisés par un autre garagiste par exemple. L’expert doit ainsi penser à procéder à l’évaluation de tous les préjudices normalement prévisibles mais il ne doit vraisemblablement pas chiffrer ceux qui sont dus à l’enchainement de circonstances fortuites et exceptionnelles (66).
Cette interprétation présente l’intérêt de mieux protéger l’acquéreur contre les clauses limitatives insérées par le vendeur.

Elle est également de nature à faire perdre tout intérêt à l’action estimatoire puisque contrairement à l’article 1644 du Code civil qui ne prévoit qu’une réduction de prix, l’action en réparation de l’article 1645 du Code civil permet de prétendre à tous dommages et intérêts, qu’il s’agisse des réparations apportées à la chose viciée ou des préjudices d’exploitation ou autres découlant du vice.

2. L’autonomie de l’action en réparation du dommage

L’expert peut également être amené à évaluer les dommages subis par l’acquéreur indépendamment de toute action en garantie.
L’autonomie de l’action en responsabilité pour vices cachés a en effet été clairement consacrée par la jurisprudence, dans la mesure où les conditions de la responsabilité civile contractuelle du vendeur étaient réunies (67) et après discussion, il a été décidé que cette action relevait de la garantie des vices cachés (68). Elle est en conséquence enfermée dans le délai de deux ans de l’article 1648 du Code civil et les clauses limitatives de responsabilité figurant au contrat ne peuvent plus lui faire échec. Il semblerait que les contractants ne puissent donc plus se retrancher derrière des clauses de limitation de garantie pour réduire leur responsabilité (69), comme cela était possible avant, dès lors qu’elles étaient librement consenties par des parties au contrat qui étaient des professionnels de même spécialité (70) et à condition que le vendeur ait fourni une information exacte à l’acquéreur (71), en d’autres termes qu’il ait été de bonne foi.

En toute hypothèse, subsiste la possibilité pour le contractant de souscrire une assurance spécialement dédiée puisque l’assurance de responsabilité du vendeur n’a pas vocation à jouer, à défaut de responsabilité civile contractuelle ou délictuelle.
Dans ce contexte, la tâche de l’expert se révèle importante pour évaluer les différents postes de préjudice que l’assureur sera éventuellement amené à indemniser aux lieux et places de son assuré mis en cause.

Notes & références

1 La garantie légale des vices cachés ne concerne pas tous les contrats. Elle intéresse en effet essentiellement le contrat de vente de biens meubles (industriels ou naturels) mais aussi immeubles mais elle peut être aussi attachée à d’autres contrats relatifs à une chose, tel que le contrat de bail par exemple.

2 Le juge doit en effet limiter la chose de la mesure à ce qui est suffisant pour la solution du litige, en s’attachant à ce qui est le plus simple ou le moins onéreux.

3 Selon l’expression consacrée par l’article 232 du Code de procédure civile.

4 L’article 232 du Code de procédure civile indique précisément que l’expert est désigné par le juge pour l’éclairer sur une question de fait qui requiert les lumières d’un technicien.

5 Le juge administratif fait depuis 2005 une application directe des articles 1641 à 1648 du Code civil en se réappropriant l’interprétation qu’en a faite la jurisprudence judiciaire.

6 Le Code de procédure civile délimite les questions du technicien à une dimension purement technique en évoquant uniquement les questions de fait. L’expert ne doit donc pas céder à la tentation de s’immiscer dans l’appréciation du litige, tâche qui relève exclusivement de la juridiction qui l’a désigné. Toute la difficulté repose alors sur le fait de réfléchir à une question purement technique sans déborder sur la question du droit. Mais dès lors que les constatations techniques de l’expert pourront conforter la présence d’un vice caché ou encore fermer définitivement l’action au demandeur, il semble important que l’expert mesure les implications juridiques de ses conclusions techniques, sans pour autant se substituer au juge dans l’oeuvre de qualification.

7 Le juge n’est pas tenu de soulever d’office ou de requalifier les moyens de pur droit. En effet, « si parmi les principes directeurs du procès, l’article 12 du nouveau Code de procédure civile oblige le juge à donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions, il ne lui fait pas obligation, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement juridique de leurs demandes ; qu’ayant constaté, par motifs propres et adoptés, qu’elle était saisie d’une demande fondée sur l’existence d’un vice caché dont la preuve n’était pas rapportée, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de rechercher si cette action pouvait être fondée sur un manquement du vendeur à son obligation de délivrance d’un véhicule conforme aux stipulations contractuelles, a légalement justifié sa décision de ce chef », Cass. Ass. Plén., 21 décembre 2007, n° 06-11.343 ; Bull. civ. 2007 Ass. Plén, n° 10 ; Juris-Data n° 2007-042069.

8 Il est possible d’en référencer plus de quinze au total.

9 La convention de Vienne du 11 avril 1980 relative aux contrats de vente internationale de marchandises ne connait qu’une seule action dans les distinctions du droit français entre obligation de délivrance et garantie ou entre vice caché et défaut de conformité. Elle connait uniquement le défaut de conformité au contrat. Ainsi, le vendeur doit –il livrer des marchandises dont la quantité, la qualité et le type répondent à ceux qui sont prévus au contrat. L’ordonnance du 17 février 2005 qui a transposé la directive du 29 mai 1999 destinée à protéger les consommateurs dans le cadre d’une vente a également introduit une notion unique de garantie de conformité. Malheureusement, cette réforme est limitée aux seules ventes de meubles corporels aux consommateurs (C. consom. art., L. 211-1 à 211-18).

10 Sur cette question, Dalloz Action, Droit de la construction, n° 582.180 et s. et notamment G. Viney, Quel domaine assigner à la loi de transposition de la directive européenne sur la vente ?, JCP G 2002, I, 158.

11 Cass. 1ère civ., 16 juin 1993, D. 1994.210.

12 Cass. 1ère civ., 5 mai 1993, pourvoi n° 90-18.331 ; Juris Data n° 1993-000889 ; JCP G 1993, I, 3727, n° 26, obs. G. Viney, D. 1993, p. 506, note A. Bénabent.
13 V. en ce sens, Cas. 1ère civ., 23 mai 1995, Bull. civ. I, n° 217, RTDCom 1997.107 obs. B. Bouloc.

14 Cass. 1ère civ., 23 juin 2011, pourvoi n° 10-19.099, AJDJ 2011.730.

15 Cass. 3ème civ., 21 septembre 2011, pourvoi n° 09-69.933, RDI 2011, p. 568, O. Tournafond.

16 Planiol et Ripert, t.X, par Hamel, n° 126, p. 139.

17 Cass. 1ère civ., 5 mai 1993, pourvoi n° 90-18.331 ; Juris Data n° 1993-000889 ; JCP G 1993, I, 3727, n° 26, obs. G. Viney, D. 1993, p. 506, note A. Bénabent.

18 La garantie des vices cachés est dite aussi garantie édilicienne, dans la mesure où elle date des édiles curules romains.

19 J.Ghestin et Y.-M. Serinet, v° erreur, Rép. Civ. Dalloz, n° 87 et s.. Contra Cass. 3ème civ., 25 mars 2003, JCP G, 2003, I, 370, n° 6, obs. Y.-M. Serinet.

20 Cass. 3ème civ., 30 janvier 2008, n° 07-10.133, Juris Data n° 2008-042519 ; Bull. civ. III n° 21 ; RDC 2008, p. 1242, obs. F. Collart-Dutilleul.

21 Les diagnostics techniques permettent parfois aux vendeurs de s’exonérer de leur responsabilité dès lors qu’ils ont rempli leur obligation d’information. V. en ce sens, Cass. 3ème civ., 6 juillet 2011, pourvoi n° 10-18.882, RTDCiv. 2011.776, obs P.-Y. Gautier.

22 Toulouse, 25 avril 2001, Juris-Data n° 2001-152435.

23 Cass. 1ère civ., 1er juillet 2010, pourvoi n° 09-14.900.

24 Cass. 3ème civ., 30 janvier 2008, D. 2008.546.

25 Cass. 3ème civ., 17 décembre 2008, AJDI 2009.388, obs. Prigent ; Defrénois 2009.642, obs. Dargone-Labbé.

26 Cass. 1ère civ., 7 janvier 1982, Bull. civ. I, n° 8. Ainsi, un défaut d’étanchéité du moteur d’un navire de plaisance particulièrement évident constitue une anomalie détectable lors d’un examen minimal et superficiel et ferme donc la garantie des vices cachés à l’acquéreur.

27 Cass. 1ère civ., 7 juin 1995, Bull. civ. I, n° 250, RTDCom 1997.107 obs. B. Bouloc.

28 Cass. Ass. Plén. 27 octobre 2006, D. 2006.2812.

29 C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le diagnostiqueur en matière immobilière qui dresse un était parasitaire sans démontage d’éléments existants ne pourra pas voir par la suite sa responsabilité engagée par l’acquéreur par exemple.

30 Cass. 3ème civ., 17 décembre 2008, AJDI 2009.388, obs. Prigent ; Defrénois 2009.642, obs. Dargone-Labbé ; V. aussi Cass. 1ère civ., 26 septembre 2012, pourvoi n° 11-22.399 : dans cette affaire concernant la défectuosité d’un des moteurs d’un navire d’occasion, il a de la même manière été décidé que l’action en garantie des vices cachés ne saurait être écartée du fait que l’acheteur n’a pas procédé à un essai en mer en présence d’un technicien.

31 Cass. 3ème civ., 3 mai 1989 ; D. 1990.117, note O. Tournafond.

32 Cass. 1ère civ., 16 février 1983, Bull. civ. I, n° 65 ; Cass 3ème 14 juin 1989, Bull. civ. III, n° 140 qui nous dit que les vices ne sont cachés que s’ils ne sont pas connus dans leurs causes et leur amplitude ; Cass. 3ème civ., 15 mars 2011, AJDI 2011.398 où en présence d’infiltrations d’eau, la cour de cassation a retenu que « la présence d’humidité dans un immeuble ancien ne pouvant, pour des acheteurs normalement diligents, laisser présager la venue d’eau au sol à l’intérieur de la maison, la cour d’appel en a souverainement déduit l’existence d’un vice caché dès lors que les acquéreurs n’avaient pas eu connaissance du vice dans toute son ampleur ».

33 Cass. 3ème civ., 21 septembre 2011, pourvoi n° 09-69.933, D. 2011.2336 ; O. Tournafond, RDI 2011. 568. Dans cette affaire, les désordres concernant les défauts de menuiseries, les planches des lambris ou la ventilation mécanique avaient été signalés par les acquéreurs au moment de la prise en possession des lieux mais ce n’est que plus tard que ces vices s’étaient révélés de nature à porter atteinte à la destination de l’immeuble. C’est la raison pour laquelle la garantie décennale ne pouvait pas jouer pour ce type de désordres dont la gravité avait été cachée. À la lumière de cette interprétation très extensive de la notion de vice caché, ne semblent relever de la garantie des désordres apparents que les vices mineurs ou ceux dont les conséquences préjudiciables sont immédiatement visibles.

34 V. sur cette question, F. Cohet-Cordet, L’ampleur des vices cachés : une jurisprudence favorable à l’acquéreur, AJDI 2012.378.

35 Contra AJDI 2003.609 où des acquéreurs ont vu leur demande de garantie légale des vices cachés rejetée au motif qu’ils étaient informés de l’existence d’une manifestation de capricornes dans la charpente mais qui n’avaient pas mesuré l’amplitude du vice.

36 Rennes, 21 mars 2002, Juris-Data n° 2002-177937. V. aussi Cass. 1ère civ., 24 février 1964, Bull. civ. I, n° 105 : Dans une affaire maintenant ancienne mais topique les juges avaient considéré que l’infirmité du cheval lors de la vente (il était borgne) n’était pas apparente et ne pouvait donc être décelée que par un examen approfondi auquel un acheteur n’a pas coutume de se livrer en personne.

37 Cass. 1ère civ., 18 décembre 1962, Bull. civ. I, n° 554.

38 Bourges, 12 juin 2001, Juris-Data n° 2001-158024.

39 Cass. 1ère civ., 15 juillet 1999, D. 1999.218 : dans cette affaire, lorsque l’expert n’a pas retenu la mauvaise qualité des graines mais qu’il a relevé l’influence des facteurs climatiques régionaux sur la production, les juges en ont déduit souverainement l’absence de vice caché.

40 JCass. 3ème civ., 13 novembre 1970, Bull. civ. 1970, III, n° 599 : les exemples en matière de bail existent. Prenons celui d’un système de chauffage installé sans l’autorisation du bailleur dans une cheminée qui ne présentait pas les normes de sécurité pour cet usage et qui a causé la mort d’un occupant, victime d’une intoxication mortelle. Ici, l’installation du poêle a été considérée comme la cause déterminante de l’accident, même si les fissures non signalées par le bailleur ont certainement aidé à la propagation de ces émanations toxiques ; V. aussi Paris, 28 février 2007, AJDI 2007, p. 649 : Dans un autre registre, toujours concernant un contrat de bail, il a été relevé que le locataire avait commis une grave imprudence en pénétrant dans la cage d’ascenseur sans vérifier si la cabine était bien à l’étage. Ici, le caractère imprévisible et irrésistible de la faute de la victime, combinée à la détérioration de l’ascenseur par un tiers non identifié a permis aux juges du fond, dans le cadre de leur appréciation souveraine, d’exonérer le bailleur de sa responsabilité. La force majeure présente ici les caractéristiques classiques d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité. Il convient d’appuyer sur le fait que l’existence d’un vice caché ne peut être assimilée à un cas de force majeure, lequel a nécessairement une origine extérieure à la chose louée.

41 Cass. 1ère civ., 5 novembre 1996, RCA 1997, comm 27 ; Bull. civ. I, n° 386, somm. P. 348, obs. O. Tournafond : Lorsque la preuve sera impossible à rapporter, les juges se contentent parfois de relever l’absence d’autres causes possibles. Ainsi, les juges ont-ils considéré que preuve du vice était rapportée, lorsque l’incendie est intervenu pendant la période de garantie contractuelle et qu’il ne pouvait être dû à une cause extérieure au véhicule vendu, que donc seule une défaillance du système électrique pouvait l’expliquer ; Lyon, 20 janvier 2000, Juris-Data n° 2000-103158 : Dans la même idée, il a été jugé que l’accident ne pouvait être imputé qu’à un défaut de conformité du système de freinage en l’absence de traces de freinage.

42 Cass. Com. 5 juin 2012, pourvoi n° 11-17821, RTDCom. 2012, p. 838.

43 Cass. 1ère civ., 2 octobre 2013, RTDCom 2013.796, obs. B. Bouloc.

44 Paris, 6ème ch. sect. A, 8 décembre 1992, JurisData n° 1992-023765. Il est communément admis que le bailleur est non seulement responsable des vices de la chose principale mais aussi de ceux portant sur les accessoires de cette chose, lorsqu’ils sont de nature à en empêcher la jouissance. On peut ainsi parfaitement imaginer qu’un locataire qui ne peut plus avoir accès à un emplacement
de stationnement suite à la découverte d’un vice de construction par exemple, puisse obtenir la résiliation du bail aux torts du bailleur pour le trouble de jouissance subi. En matière de bail, il semble important de relever que les choses sont un peu différentes. En effet, le bailleur est garant des vices qui empêchent l’usage de la chose. Il n’est pas obligatoire que le vice rende l’usage de la chose complètement impossible. Il est seulement nécessaire qu’il entrave la jouissance du preneur et lui cause un trouble véritable. Ainsi, a-t-il été décidé que des infiltrations dues à une défaillance de l’étanchéité portaient atteinte à l’habitabilité des lieux loués sans les rendre inhabitables et qu’il convenait donc d’engager la responsabilité du bailleur.

45 Tel est le cas si le vice affecte seulement l’agrément ou encore les qualités secondaires du produit litigieux, avec la réserve concernant les produits de luxe cependant, dès lors qu’on n’attend pas le même usage d’un produit de luxe que d’un produit courant. La distinction entre ce qui relève de l’usage et de l’agrément est donc très relative.

46 Agen, 10 mars 1997, Juris-Data n° 1997-042853.

47 Cass. 1ère civ., 22 avril 1997, Bull. civ. I, n° 129.

48 D. 1994, 524, obs. C. Mascala.

49 Ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005.

50 Les ventes conclues avec un consommateur sont curieusement plus rigoureuses en la matière puisque si le délai est aussi de deux ans, il commence à courir à compter de la délivrance. Le consommateur pourra toujours opter pour les dispositions du Code civil…

51 Cass. 1ère civ. 21 octobre 1997, JCP 1998, II, 10063, note C. Mouloungui ; D. 1998, jurisp. 409, note M. Bruschi.

52 Dans le Code de la consommation, l’article L. 211-9 prévoit également que l’acheteur peut choisir entre la réparation et le remplacement du bien mais en respectant le principe de la hiérarchie des remèdes. En d’autres termes, ce n’est qu’en l’absence de réparation possible que la résolution viendra s’opérer.

53 Cass. 1ère civ., 21 mars 2006, pourvois n° 03-16.075, n° 03-16.307 et n° 03-16.407, RTDCom 2006.907, obs. B. Bouloc ; Cass. 1ère civ., 30 septembre 2008, pourvoi n° 07-16.876, RTDCom 2009.201, obs. B. Bouloc.

54 Il convient de relever qu’une indemnité de dépréciation de la chose en raison de son utilisation est prévue en matière de garantie de conformité dans le Code de la consommation. Ainsi, l’acheteur consommateur qui s’est servi de la chose devra rendre compte de sa dépréciation contrairement à l’acheteur classique.

55 V. en ce sens, J.-E. Chevallier, RTDCom. 2010.213.

56 Curieusement, il convient de relever que le vendeur d’une chose viciée est ainsi sanctionné plus sévèrement que celui d’une chose non conforme puisque dans le cas d’un défaut de non-conformité, le vendeur peut toujours obtenir l’indemnisation de la dépréciation du bien qui lui est restitué.

57 Cass. 3ème civ., 10 novembre 1999, pourvoi n° 98-10.909, Bull civ. III, n° 217, D. 1999.274 ; Cass. 1ère civ., 3 mai 2006, Bull. civ. I, n° 216 ; D.2006. IR.1405 ; RTD Com 2007.221, obs. B. Bouloc ; Cass. 3ème civ., 11 juin 2013, pourvoi n° 12.16392, inédit.

58 V. en ce sens, Aubry et Rau, Cours de droit civil, t. V, 6ème éd., par P. Esmein, §355 bis, p. 84.

59 Il convient en effet de préciser que le demandeur en garantie des vices cachés n’est pas fondé à obtenir une somme égale au coût des travaux nécessaires pour remédier au vice affectant la chose vendue et qu’il peut uniquement solliciter la restitution partielle du prix et des frais occasionnés par la vente (étant rappelé qu’il est indifférent ici que le vendeur soit de bonne ou de mauvaise foi). En d’autres termes, l’acheteur peut uniquement demander la restitution du prix de la perte de la valeur de la chose en conséquence du vice dont il est atteint. Eu égard à la difficulté attachée à cette évaluation, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi l’article 1644 du Code civil prévoit normalement le concours d’un expert…

60 A priori, le vendeur ne doit ignorer aucun vice de la chose vendue, ni ceux qui en altèrent l’usage, ni ceux qui résultent de l’inobservation des règles légales. Rappelons en effet que conformément aux dispositions des articles 1645 et 1646 du Code civil, seul le vendeur qui connaissait les vices de la chose vendue est tenu de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur et que le vendeur professionnel
est présumé connaître les vices. A contrario, le vendeur de bonne foi n’est pas tenu d’indemniser les acquéreurs des effets dommageables attachés à la présence du vice dénoncé. La bonne ou mauvaise foi du vendeur est donc déterminante ici et les conclusions de l’expert pourront, même incidemment, aider le juge à se faire une idée sur cette question. La mauvaise foi du vendeur peut par exemple se déduire du défaut d’autorisation de l’installation défectueuse. En effet, de ce défaut d’autorisation, les juges ont tiré la conclusion que les désordres étaient prévisibles par le vendeur et donc qu’il était de mauvaise foi . En toute hypothèse, lorsque le vendeur est professionnel ou de mauvaise foi, l’expert peut être amené à chiffrer les dommages.

61 Ce qui exclurait notamment les pertes d’exploitation qui relèvent de la responsabilité contractuelle de droit commun.

62 Ces solutions que constituent la remise en état du bien défectueux ou son remplacement ont été retenues dans le régime de la garantie de conformité aux articles L. 211-1 et suivants du Code de la consommation.

63 V. en ce sens P.-Y Gautier, Cass. 1ère civ., 2 décembre 1997, RTD Civ. 1998. 399.

64 Cass. Com., 19 juin 2013, pourvoi n° 11-26.566, D. 2013, 1947, obs. X. Delpech, note A. Hontebeyrie ; RTDCom 2013, 323, obs. B. Bouloc.

65 Cass. Com. 10 mai 2000, RJDA 2000.853.

66 L’idée de non réparation des dommages imprévisibles en matière contractuelle prévue par les articles 1150 et 1151 du Code civil n’est pas nouvelle.

67 Cass. Com. 19 juin 2012, pourvoi n° 11-13.176, JCP G 2012, 963, avis av. gén. L. Le Mesle ; RDI 2012.519, Ph. Malinvaud, RTDCiv. 2012.741, obs. P.-Y. Gautier, D. 2012.1737 et Cass. 1ère civ. 26 septembre 2012, n° 11-22.399, Bull. civ. I, n° 192, D. 2012.2306.

68 Cass. Com., 19 juin 2013, pourvoi n° 11-26.566, D. 2013, 1947, obs. X. Delpech, note A. Hontebeyrie ; RTDCom 2013, 323, obs. B. Bouloc.

69 À propos de la garantie des vices cachés pesant sur le vendeur, v. Cass. Com., 19 mars 2013, pourvoi n° 11-26566, D. 2013.835, obs. X. Delpech ; JCP 2013, 705, note G. Pillet ; JCP E 2013, 1309, note S. Le Gac-Pech, CCC 2013, comm. 129, note L. Leveneur.

70 La clause exclusive ou limitative de responsabilité ne peut être invoquée lorsque les professionnels sont de spécialités différentes ou lorsque l’une des parties a la qualité de consommateur. Dans cette dernière hypothèse, une telle clause serait réputée non écrite en raison de son caractère abusif, sur le fondement des articles L 132-1 et R 132-1 du Code de la consommation.

71 Montpellier, 8 août 2007, n° 06-4534, pub. serv. doc. Cour de cass., RDI 2008.256, F.-G. Trébulle.

Informations pratiques

Bureau 2015 de l’UCEJAM
Valérie DE BLECKER, Présidente
Patricia MANNARINI-SEURT, Vice-Présidente
Christian GUYON, Secrétaire général
François TALON, Trésorier

Siège social : « Le Minotaure », 34 avenue Henri Matisse, 06200 NICE
Tél. : 04 93 72 42 00 - Fax : 04 93 72 42 29
Email : [email protected]

La semaine prochaine : La responsabilité civile de l’expert judiciaire

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