Un rapport d'expertise

Un rapport d’expertise judiciaire déposé en l’état non inerte de potentialité juridique en droit de la construction

Une piscine à Vence affectée de larges fissurations.

L’expert judiciaire désigné en référé dépose au greffe son rapport "en l’état" selon la formule consacrée du fait du défaut de consignation complémentaire par le maître d’ouvrage.

Il avait été simplement décrit les désordres avec formulation d’hypothèses sur leur origine faute de sondages sur les fondations ayant pu être déployés.

Le maître d’ouvrage assigne au fond ses vendeurs sur la garantie légale des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil ainsi que l’assurance de garantie décennale du constructeur de la piscine placé dans l’intervalle en liquidation judiciaire.
Le TGI de Grasse l’en déboute visant une prescription de l’action judiciaire non exercée à bref délai à compter de la découverte des fissurations.

La Cour d’Aix-en-Provence par arrêt du 29 octobre 2015 (3ème chambre B - RG n°13/13432) infirme par substitution de motifs en accueillant la mobilisation de la garantie décennale tant du chef des vendeurs réputés constructeurs par l’article 1792-1 du Code civil que de celui de l’assureur de l’entrepreneur.

Il est considéré que le rapport d’expertise judiciaire fût-il incomplet contient de façon suffisante la description de fissures profondes affectant sa solidité, peu importe leur origine.

La présomption légale de responsabilité s’applique dès caractérisation de désordres de cette nature.

La détermination des causes sert plutôt l’intérêt des coobligés à la dette judiciaire dans leurs actions récursoires respectives en fonction de l’importance des fautes de chacun.

Les défendeurs avaient opposé une cause étrangère normalement exonératoire tenant en la survenance 1 an avant l’expertise de pluies et coulées de boue classées en phénomène de catastrophe naturelle ayant forcément déstabilisé le terrain d’assise d’implantation du bassin.

La Cour balaye l’argument estimant qu’il n’était pas démontré l’impact néfaste de tels événements par quelconque expert.

Pour mauvaise cause étant donné que le demandeur avait arrêté par sa carence le cours de l’expertise judiciaire en ne consignant pas davantage.

L’approche est dans ces conditions singulière.

Elle l’est encore lorsqu’il est dit que sur les 20 dernières années 5 arrêtés ministériels pour des phénomènes naturels similaires avaient été publiés au Journal Officiel en sorte que vis-à-vis des réputés constructeurs (les vendeurs) et le constructeur lui-même (et son assureur) le dernier arrêté CAT NAT ne constituerait pas à leur égard une cause étrangère imprévisible ; le syllogisme a de quoi décontenancer.

Il en résulte encore la validation de devis unilatéraux de plus de 100 000 euros au titre de la reconstruction de la piscine sinistrée rassemblés par le demandeur hors et après expertise parce que ne serait pas prouvé leur caractère disproportionné.
Comment procéder ainsi quand les défendeurs n’ont plus accès aux lieux litigieux consécutivement à des opérations expertales avortées ?

Cette décision a, quoi qu’il en soit, le mérite d’inviter à la plus grande circonspection à l’endroit de rapports d’expertise judiciaire qualifiés en l’état qui ne sont nullement inexploitables et à inciter tout intéressé à une reprise des investigations techniques en vue de la fixation des causes exactes des désordres permettant de cerner les responsabilités et les éventuelles causes étrangères exonératoires en prenant alors l’initiative de leur financement pour compte de qui il appartiendra.

Par Maître Pierre-Alain RAVOT Avocat au Barreau de Grasse, membre de l’AARPI LEXWELL Avocats, Square Carnot - 9 rue Masséna 06110 LE CANNET - Tel 04 92 99 12 60 - Fax 04 92 99 12 61

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