Immobilier : focus sur Paris

L’EDHEC et l’OLAP ont réuni leurs moyens d’analyse pour ausculter le marché immobilier de l’ancien à Paris, sur une décennie s’achevant en 2007 . L’étude comporte un nombre important de données utiles à qui s’intéresse à ce marché. Mais elle ne permet pas vraiment à l’investisseur d’anticiper efficacement les rendements à attendre.

L’intérêt pour le marché immobilier demeure au centre des préoccupations des Français. Qu’il s’agisse d’acquérir la résidence principale au lieu de la louer, ou bien de réaliser un investissement locatif. Il n’est pas certain que les critères de décision relèvent, chez nous, d’un raisonnement exclusivement rationnel. D’abord, être propriétaire de son logement constitue une ambition très largement partagée, que les ménages assouvissent ordinairement dès qu’ils en ont l’opportunité, à savoir dès qu’ils estiment avoir les moyens d’assumer le remboursement du crédit nécessaire à l’acquisition. Le couple prix du marché/taux d’intérêt constitue ainsi un paramètre décisif dans le déclenchement de l’acte d’achat. En l’absence de perturbation majeure (chômage prolongé, divorce, déménagement dicté par des nécessités professionnelles), susceptible de provoquer une vente rapide à une phase du cycle des prix qui n’est pas nécessairement favorable, les ménages se félicitent toujours d’être propriétaire : ils ont accumulé un capital au moyen de l’épargne forcée du crédit, qu’ils n’auraient probablement pas pu constituer sous une forme volontaire. Dans ce contexte, le rendement de leur investissement importe peu : sur une longue période, par l’effet conjugué de l’érosion monétaire, même faible, et de la raréfaction foncière, automatique avec une population en constante augmentation, l’opération fait apparaître un bilan très positif. Ce n’est pas par hasard que les gouvernements encouragent sans relâche l’accession à la propriété, véritable pilier de la classe moyenne. Au prix de quelques dérapages, comme en témoignent les fameux subprime américains : pour enrichir les ménages grâce au crédit, il faut quand même qu’ils dégagent les ressources appropriées au remboursement de leurs dettes…

Sur le terrain de l’investissement locatif, l’approche est différente, ou à tout le moins devrait l’être : la décision d’achat est alors dictée par la performance escomptée, face aux placements alternatifs. Une étude récente(1) vient apporter un éclairage supplémentaire à cette question complexe, car il n’est véritablement possible de calculer le rendement d’un actif immobilier que lorsqu’il est vendu. C’est-à-dire lorsque son propriétaire s’en est dessaisi. Un rendement ex post, pour reprendre le jargon financier, qui peut différer très sensiblement du rendement ex ante, celui espéré par l’investisseur au moment de l’achat.

Des confirmations

L’étude précitée se concentre sur l’immobilier résidentiel ancien en Ile-de-France, dont le marché est profond, ce qui permet accessoirement d’éviter le parasitage des incitations fiscales accordées à l’achat du neuf. Grâce à l’utilisation de riches séries statistiques, tant sur la composition des biens que leur localisation, l’étude délivre une photographie précise de la situation du marché entre 1996 et 2007, correspondant approximativement à la dernière vague haussière du cycle des prix. On y voit confirmées quelques convictions bien établies et quelques prémonitions consensuelles. A savoir une sensible disparité dans les prix d’achat et de location suivant les zones, ce qui ne surprendra personne, et des écarts élevés sur ces mêmes prix en fonction de la taille du logement (les plus petits étant plus chers). Plus éclairante est l’évolution du rendement locatif sur la période, même si les résultats sont obtenus par modélisation : pour les logements à turn-over élevé, l’ajustement des loyers aux conditions de marché se réalise très souvent ; pour les plus grands logements offrant une meilleur stabilité du locataire, le loyer suit l’évolution de l’indice de référence. A noter toutefois que l’étude intègre le risque de vacance, ce qui améliore la précision du résultat. Ainsi, le rendement locatif moyen dans Paris intra muros, par exemple, passe d’environ 5% en 1996 à un peu plus de 2% en 2004. Mais le rendement en capital, résultant de l’appréciation de la valeur vénale du bien, permet d’obtenir une performance globale élevée (environ 11,5% en moyenne sur la période, pour Paris-Centre).

L’étude relève que dans une phase de baisse des rendements locatifs, les investisseurs se reportent sur les zones plus rentables, ce qui a pour effet de provoquer un net rattrapage des prix. Ainsi, sur les dernières années du cycle de hausse, les régions de la Petite Couronne réputées les moins prisées ont connu un rendement global très élevé (se référer à l’étude pour les données détaillées). En comparant les rendements financiers et immobiliers, les auteurs concluent à la supériorité écrasante des immeubles. Mais la référence est la période… 1996-2004. Ce qui est un peu réducteur, vu qu’est intervenu en 1999-2000 le krach boursier des valeurs « new-tech », qui était indépendant de la situation générale de l’économie. Certes, la volatilité des prix immobiliers est, chez nous, plus faible que celle des actions. Mais ces deux formes d’investissement sont sensibles aux taux d’intérêt et les variations de leurs prix respectifs sont nettement corrélées. En tout cas, l’étude confirme qu’un rendement locatif dérisoire témoigne d’un prix excessif du bien, et donc d’un retournement probable. D’autant que les rendements dont il est fait état sont calculés avant imposition (impôt sur le revenu et plus-values). Et un rendement de 2% avant impôts, ce n’est pas bésef. Même quand le loyer de l’argent est faible.

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