Laure Carladous : une

Laure Carladous : une femme à la barre de la fédération du BTP-06

Après une solide formation en France et aux États-Unis, elle est revenue diriger l’entreprise familiale Spada. Elle succède maintenant à Philippe Gautier à la présidence de la FBTP-06.

Ne lui dites pas "présidente", mais "président". Pour cette fonction à la tête de la FTBP-06, Laure Carladous revendique en effet le masculin, pour être considérée en stricte égalité avec ceux qui l’ont précédée à ce poste et avec ses collègues du métier. Elle remplace Philippe Gautier, arrivé au terme de son mandat, et fait partie des huit femmes seulement qui, en France, ont atteint ce niveau de responsabilité. Elle est la première en Paca, et espère bien ouvrir la voie à d’autres prêtes comme elle à s’engager...

5 000 entreprises dans les Alpes-Maritimes

"J’appartiens à la troisième génération familiale dans le bâtiment. Quand Philippe Gautier m’a proposé de me présenter à la tête de la Fédération, j’ai d’abord dit non. Puis, après réflexion, j’ai fini par penser qu’il était temps de me mettre au service de la profession après quarante années passées dans le métier, et me voilà". En devenant la figure de proue d’un secteur représentant 22 300 emplois et 5 000 entreprises réalisant un chiffre d’affaires de trois milliards d’euros, Laure Carladous est loin de tomber dans un monde inconnu. À la "Fédé", elle faisait déjà partie du bureau, au poste de secrétaire, et connaît donc parfaitement les rouages de la maison.

Le retour sur la Côte

Son curriculum vitae fait de son élection à la présidence une évidence : classe prépa au Lycée Masséna, diplôme d’ingénieur option travaux publics à Centrale-Paris, complété par un MIT en géotechnique aux États-Unis où elle s’est installée un temps. "Pour travailler, une femme doit avoir plus de bagage qu’un homme" prévient-elle celles qui voudraient entrer dans la carrière. Justement, sa carrière, elle la mènera depuis 1988 en France, sur la Côte d’Azur, au sein de l’entreprise familiale Spada, qu’elle codirige avec son frère Pierre Noiray, occupant des postes d’ingénieur d’études et de contrôleur de gestion dans cette société de soixante dix personnes spécialisée en travaux publics, construction, génie civil.

Interview : "il nous faut restaurer les marges"

Quelles seront les priorités de votre mandat ?

  • D’abord, le retour aux marges pour nos entreprises : pour garder de l’activité pendant les années de crise, elles ont fait de gros efforts mais, aujourd’hui, pour leur pérennité, il faut leur assurer une activité dans des conditions saines. Pour les appels d’offres, je défendrai le principe du "mieux disant" et ma détermination sera absolue contre toute concurrence déloyale. Je travaillerai aussi pour le respect des délais de paiement, qui est de 45 jours... en principe, mais souvent largement dépassé. Je discuterai donc avec nos différents partenaires pour améliorer cette situation où les entreprises font la banque en payant en temps et heures les matériaux, les salaires, etc. mais qui sont, elles, réglées avec retard.

Quel sera le rôle de la Fédération ?

  • Elle doit être une force de propositions pour que nos entreprises puissent travailler dans un cadre légal adapté. Nous irons donc à la rencontre des parlementaires pour leur expliquer nos besoins. Et notre Fédération doit être un lieu coopératif de l’acte de bâtir : nous devons nous parler entre nous, être plus ouverts à nos difficultés.

Vous allez mettre l’accent sur la formation ?

  • On ne doit laisser personne à la traîne. Nos entreprises doivent acquérir les nouvelles technologies, s’adapter à une réglementation de plus en plus complexe. Pour cela, il faut réaliser des efforts sur la formation, domaine qui restera l’une des priorités. Dans ce département, nous cherchons à employer des compétences mais on ne trouve pas, alors qu’il y a 7 000 personnes de nos métiers inscrites à Pôle Emploi : il y a quelque chose qui ne va pas...

La loi ELAN ?

  • On en attend beaucoup, évidemment. Nous espérons qu’elle apportera de la simplification dans les procédures pour des mises en chantier plus rapides.

La situation s’est améliorée depuis trois ans...

  • Sans doute, mais les chiffres sont trompeurs puisque l’on partait de très bas. Il y a dix ans, nous employions 27 000 personnes contre22 000 aujourd’hui. On observe depuis quelques mois un tassement du nombre des mises en chantier. Dans le résidentiel, il y a actuellement 450 000 mètres carrés autorisés, mais à peine plus de la moitié qui démarrent. Quant au marché de la rénovation, il est orienté principalement sur la rénovation énergétique, mais reste encore modéré malgré le crédit d’impôts.

Quelle est la situation des Travaux Publics ?

  • Malgré la baisse des dotations de l’État, ce marché est resté soutenu grâce à deux gros chantiers : le tramway à Nice et le bus en site propre. Nos entreprises ont tout de même perdu 25% de chiffre d’affaires depuis 2008. Elles devront faire des réformes structurelles. Elles s’intéressent à de nouveaux marchés : dans le Var, à Monaco, sur de nouveaux créneaux comme le traitement des déchets.

Justement, les déchets...

  • C’est une activité très réglementée et les entreprises font ce qu’elles peuvent... Les maîtres d’ouvrage doivent comprendre qu’il faut accepter un certain pourcentage de matériaux recyclés dans les travaux de terrassement, et il faut inclure cette clause dans les appels d’offres. Cela résoudra une partie du problème. Pour le reste, les entreprises seules n’y peuvent rien et tout le monde doit se mettre autour de la table pour trouver des solutions.
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