Berger : le bonheur (...)

Berger : le bonheur est dans le pré

Il n’est pas tombé dans la marmite quand il était petit et rien ne prédisposait Philippe, né à Nice, à devenir berger dans les Alpes-Maritimes. Jusqu’au jour où, étudiant, il est parti avec des copains découvrir le vaste monde. Un voyage qui s’est avéré bien plus long que prévu et qui orienta toute sa vie, personnelle comme professionnelle, sur les sentiers d’une passion.

Afrique-du-Sud : ce fut son premier contact avec le métier. Il était venu y apprendre le travail de la laine. Il y a découvert la nature, les grands espaces, la vie auprès des animaux. "J’y suis resté deux ans. Des bergers m’ont pris sous leur aile et m’ont montré le métier. Ce fut une révélation. Dès lors, je ne me voyais plus aller au bureau chaque matin, j’avais besoin d’air et de campagne. Je me suis alors consacré à mettre mes envies en application. Ce ne fut pas facile".

Des débuts difficiles

Celui qui se décrit comme un "néo rural" - malgré une quarantaine d’années d’expérience auprès de son troupeau sur les hauteurs de Grasse - a beaucoup cravaché pour faire son trou. Pas évident lorsque l’on n’est pas du sérail ! Après un Brevet Professionnel Responsable d’Entreprise Agricole (BPREA) qui lui permit de s’installer, le voilà quelque part dans les Alpes-de-Haute-Provence. Une première expérience qu’il arrête assez rapidement, les conditions économiques - la location d’une ferme - ne lui permettant pas de vivre de son travail. "En plus, l’hiver était long : il fallait acheter beaucoup de fourrage, ce qui grévait encore plus la trésorerie" poursuit Philippe. Il cherche alors un nouveau lieu d’exploitation dans le 06 ou le 83, et le voici donc de retour dans les A-M., d’abord vers Gilette, ensuite sur des pâtures dans les collines grassoises où il s’est définitivement installé. Il y a trouvé les surfaces nécessaires et le climat adapté. Ses bêtes restent en plein air toute l’année.Il ne donne du fourrage complémentaire qu’au moment des agnelages. Avant d’en arriver-là, il lui fallut convaincre les propriétaires de lui céder des parcelles qui étaient depuis longtemps inexploitées. Des propriétaires qui, au départ, ne croyaient pas trop au projet de ce p’tit gars de la ville... Mais les difficultés des débuts s’oublient même si elles furent nombreuses : construire (et donc payer) un bâtiment, des loyers, des crédits... Ne reste que la satisfaction du travail bien fait, selon ses envies, ses attentes. "C’est un métier exigeant. J’ai été 360 jours par an auprès de mes bêtes pour les soigner".
Et maintenant pour les surveiller et les protéger, car le loup n’est jamais loin... "C’est un stress permanent, pour nous éleveurs, et pour le troupeau. Mais je suis heureux auprès de mes animaux. En m’organisant, je réussis maintenant à prendre 15 jours de vacances en été, pendant vingt ans je n’ai pas pu décrocher".

Le fiston prendra la suite

Philippe a la chance d’avoir un fiston qui va prendre la suite. Il se donne entre deux à quatre ans pour assurer la transition, pour lui mettre le pied à l’étrier. Un projet de GAEC (exploitation en commun) est en cours. La voie est toute tracée, même si la "draille" est abrupte.
En plus de son travail de berger, Philippe conduit ses bêtes à l’abattoir où la viande est débitée en colis. Il s’occupe de la vente directe, ce qui lui permet de valoriser sa production, car la vente sur pied classique ne lui permettrait pas de vivre.
Pour rien au monde il ne remettrait en cause son choix. "Le bonheur d’être avec son troupeau dans la nature, de voir le soleil se lever, cela n’a pas de prix et vaut bien des sacrifices !"

Photo de Une : illustration DR

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