Commerces : un grain (...)

Commerces : un grain de sable dans la machine à confiner

Fortement fragilisée par la crise du coronavirus, l’économie française avait plutôt bien rebondi au troisième trimestre, avec une hausse du PIB de 18,2% selon les données publiées par l’Insee la semaine dernière. Et puis la deuxième vague de Covid-19 a pris de la hauteur. Au point que le pays se retrouve à nouveau contraint à un confinement qui, bien qu’édulcoré par rapport à la version printanière, engendre un inévitable coup de frein pour l’activité des entreprises.

En se basant sur les chiffres de la fréquentation des transports et de l’adhésion au télétravail, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a déclaré, le 3 novembre, que le confinement était bien respecté par la population. Une façon de dire que le plan de lutte contre le virus élaboré par le gouvernement était accepté par les Français. C’est sans doute vrai, notamment parce que l’école et l’économie ne sont pas, cette fois, mises à l’arrêt. Mais c’est aussi faux, tant la fermeture des petits commerces dits "non essentiels" a généré une contestation qui fait office de grain de sable dans la mécanique du confinement.

Un secteur sacrifié ?


Tison de la polémiq
ue : l’inégalité de traitement entre les boutiques de proximité et la grande distribution. Plusieurs maires de France l’ont allumé en prenant des arrêtés municipaux pour autoriser les commerçants à garder leurs portes ouvertes. Dans les Alpes-Maritimes, le premier magistrat de Villeneuve-Loubet, Lionnel Luca, a été l’instigateur de la rébellion. Si sa démarche s’est vite retrouvée devant le juge du tribunal administratif à la demande du préfet, elle a eu le mérite de mettre la pression sur le gouvernement, qui a entendu l’incompréhension en annonçant la fermeture des rayons des supermarchés en concurrence avec les commerces privés de clients. Un arbitrage salué jusque dans les rangs des artisans : "La vente de produits considérés comme "non-essentiels" par les grandes surfaces, injuste et injustifiable, devait être interdite", a notamment réagi Jean-Pierre Galvez, président de la Chambre de métier et de l’artisanat PACA. Mais une décision insuffisante pour les organisations représentatives des commerçants.
"Ils refusent d’être sacrifiés". C’est ainsi qu’une vingtaine de fédérations, soutenues par la CPME et le Medef, ont résumé leur position en ces temps de confinement. "Commerces de l’habillement, de la chaussure, de la culture, de l’électroménager, du multimédia, du meuble, du sport, du jouet, de l’optique, de la beauté, de la parfumerie, de la bijouterie-horlogerie, des arts de la table, de fleurs, de la coiffure..., ce sont plusieurs centaines de milliers de points de vente à travers la France et plus de 1,2 millions d’emplois salariés et d’indépendants qui sont aujourd’hui menacés", ont-elles rappelé dans un communiqué commun. Et de dénoncer une situation "injuste, inéquitable et lourde de conséquences économiques". Premier argument : "les commerces ont, depuis le 11 mai dernier, mis en place toutes les mesures permettant d’assurer la sécurité des collaborateurs et des consommateurs. Masque, gel, distanciation sociale, limitation du nombre du clients, isolement des produits..., grâce à ces efforts, nous savons que nos commerces ne sont aujourd’hui pas responsables de la propagation du virus".

Une requête : rouvrir le 13 novembre

Deuxième considération : le confinement, "en privant le commerce physique de sa pleine activité, laisse le champ libre à la seule vente à distance et fait des géants internationaux les grands gagnants de cette crise". Selon la Fédération nationale de l’habillement, le Rassemblement des opticiens de France, la Fédération des enseignes de la chaussure, l’Union sport et cycle, la Fédération française du négoce de l’ameublement et de l’équipement de la maison ainsi que les autres organisations signataires, "les ventes en ligne ne représentent en moyenne que 10% de l’activité des commerces de détail. Par conséquent, les solutions alternatives mises en place (click and collect, prise de rendez-vous, livraison) permettront seulement de maintenir une part résiduelle de l’activité des points de vente mais en aucun cas elles n’assureront la survie des commerces".
D’où la demande à l’adresse du gouvernement d’une extension des mesures de soutien déjà actées, sans distinction de tailles des entreprises et de secteurs, afin qu’il n’y ait plus d’exclus des dispositifs existants.
Un appel à la rescousse des banques et des assurances, qui "doivent prendre également toute leur part à cette crise", est également lancé. En même temps qu’une requête plus audacieuse : "rouvrir tous les commerces dès le 13 novembre", avec l’espoir que le chiffre d’affaires des fêtes de Noël soit en partie sauvé.
C’est en effet à la veille de cette date que l’exécutif doit faire un premier bilan d’étape du reconfinement, au regard des chiffres de l’épidémie. Pour l’heure, leur évolution est encore alarmiste, mais prudence et patience restent de mise. La concernant, la Covid-19 nous a appris à ne jamais tirer de conclusions hâtives...

Toutes ces façons de soutenir les commerçants

Pas simple de concilier la maîtrise de l’épidémie et le maintien d’une respiration économique. C’est à ce numéro d’équilibriste que s’adonne le gouvernement. Avec un mouvement contesté à l’égard des petits commerces. Depuis l’annonce du reconfinement, ils bénéficient d’une multitude de soutiens, qui ont des formes diverses dans les communes des Alpes-Maritimes.
Sans prétention exhaustive, citons les arrêtés municipaux des maires de Villeneuve-Loubet et de Vence, plus destinés à faire bouger les lignes qu’à permettre réellement aux intéressés de commercer en toute légalité.
À Nice, Christian Estrosi a notamment annoncé la création d’un système de livraison pris en charge par la Ville pour favoriser les démarches de livraison à domicile (en collaboration avec les quatre entreprises de vélos-taxis conventionnées), un plan de digitalisation ou encore une exonération des loyers pour les commerçants locataires du patrimoine de la Ville.
À Mougins, Richard Galy, maire et médecin, propose la réouverture des boutiques via une charte sanitaire dont les élus pourraient contrôler l’application.
Aussi, à La Colle-sur-Loup, la municipalité et l’office de tourisme ont fait preuve d’inventivité. Logiquement absents, les touristes sont momentanément oubliés. L’énergie de l’office est désormais consacrée à l’organisation de la vente en ligne des commerçants du cru. Et ses locaux sont dédiés au "click and collect".

Photo de Une : Fermés pour cause de confinement, nombre de petits commerces sont en grande difficulté. DR J.P

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