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DOSSIER - COMMANDE PUBLIQUE DES ALPES-MARITIMES - LES GRANDES TENDANCES 2017

En 2017, la commande publique a retrouvé de la vigueur

Les sociétés d’autoroute passent des appels d’offres pour moderniser leurs infrastructures. (JMC)

Nonobstant les contraintes budgétaires qui touchent en particulier les collectivités territoriales, le baromètre de la commande publique mis en place par l’Assemblée des communautés de France (ADCF) et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) a enregistré une progression de +3,% du volume des achats au 3ème trimestre 2017. Une tendance positive qui se confirme alors même que l’année précédente ces mêmes achats avaient reculé de -5,7%. Mais si les chiffres sont bien orientés, on n’a pas encore retrouvé les niveaux de 2012...
Au niveau national, cela représente tout de même 57,2 milliards d’euros investis sur les trois premiers trimestres 2017. Collectivités, état, bailleurs sociaux, hôpitaux et tous les opérateurs publics ont donc à leur manière soutenu l’activité économique en passant des commandes qui font vivre les entreprises et leurs employés. Les collectivités locales - communes, communautés d’agglo, métropoles, conseils départementaux et régionaux - représentent 54% de la commande publique, contre 18% pour l’État.

Pour les Alpes-Maritimes, le chantier du tramway à Nice est l’un des plus gros prescripteurs. Le démarrage de la ligne 3 vient de démarrer entre le T2 de l’aéroport et le quartier de Saint Isidore qui abrite déjà l’Allianz Riviera et devrait recevoir Ikea, lorsque le géant suédois de l’ameublement et de la décoration aura purgé les recours contre son projet.
L’aménagement de Nice-Ouest et de quartiers dans plusieurs villes du département - voirie, VRD - ainsi que l’autoroute constituent d’autres pôles importants d’activités. Qui égrainent des marchés, petits ou gros, lesquels irriguent le tissu local.
Si les chiffres apparaissent flatteurs, ils interviennent après cinq années de baisse continue, ce qui relativise la performance.
Seul vrai sujet d’inquiétude : les bailleurs sociaux qui sont en baisse constante (de 10 milliards en 2012 à 7,5 milliards en 2017).
Les marchés de travaux et de renouvellement sont à la traîne et ce n’est pas la loi de Finances 2018 avec la baisse des APL et des loyers, ainsi que les incertitudes sur leur financement dans les prochaines années qui va améliorer rapidement le tableau. À se promener dans certains quartiers et en constatant l’état d’immeubles anciens, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a tout de même dans ce secteur du pain sur la planche...

Des moyens mis en place pour faciliter l’accès aux marchés

Les collectivités territoriales n’ont bien sûr pas attendu d’être le dos au mur pour se préparer à la dématérialisation. Le Conseil départemental 06 a même largement anticipé les échéances pour être en capacité de répondre puisque ses marchés sont tous passés par la voie numérique depuis... le mois de février de cette année.
"Pour nous, c’est une nouvelle organisation qu’il a fallu mettre en place, un changement total dans les habitudes professionnelles" commente Stéphane Gomez, chef du service des marchés. Autrefois, les dossiers étaient "papier" et nous avions nos méthodes pour le classement. Maintenant, c’est très différent, nous avons trouvé nos marques dans ce nouvel environnement".

Signature électronique

La Métropole a édité un livret pratique, tandis que le Conseil départemental a mis en ligne un vademecum de l’accès à ses marchés. (JMC)

Pour faciliter l’accès à ses marchés publics, le Conseil départemental ainsi installé des onglets dédiés sur son site externe (www.cgo6.fr) qui expliquent la marche à suivre. Pratique, précis. "Une personne est également disponible au téléphone pour aider au dépôt des plis" précise le chef de service. C’est utile, surtout pour les TPE et PME qui n’ont pas (encore mais plus pour longtemps) une grande habitude de la dématérialisation. Toujours pour fluidifier l’accès aux marchés, le CD 06 n’exige la signature électronique qu’auprès du seul attributaire. Ce qui permet à toutes les entreprises de soumissionner sans avoir à "investir" entre 300 et 400 euros pour une formalité qui deviendrait inutile si la proposition n’était pas retenue.
De même, les entreprises peuvent candidater en ne fournissant que leur numéro SIRET qui donnera ensuite tous renseignements utiles pour le dossier en allant les chercher numériquement sur des sites sécurisés.
Enfin, pour les petites communes du département qui n’auraient pas de "compétences informatiques" parmi leur personnel, le SICTIAM (Syndicat d’Ingénierie pour les Collectivités et Territoires Innovants des Alpes et de la Méditerranée) est là pour donner le coup de main.

La Ville de Nice, son CCAS et la Métropole ont aussi pris soin de faciliter l’accès aux marchés publics aux TPE et PME pour qu’elles soient à égalité avec les grands groupes davantage rompus à l’exercice : en douze pages, le "Livre bleu de l’achat public" donne tous les tuyaux pour être dans les clous.
Un livre de chevet, qui aide à l’endormissement, mais qui constitue pour les entrepreneurs le mode d’emploi indispensable pour accéder aux marchés.

La Métropole Nice Côte d’Azur grande donneuse d’ordres

Sans surprise, la Ville de Nice et la Métropole qui regroupe quarante-neuf communes sont les plus grandes donneuses d’ordre sur les Alpes-Maritimes, 285,5 M€ au total. La première intervient pour les intérêts de 342 000 habitants, la seconde pour 550 000 personnes dont les besoins sont extrêmement variés, depuis la voirie, les travaux, les aménagements, les loisirs etc...
Le plus gros chantier est toujours celui du tramway. L’an dernier, 32 M€ ont été investis pour du génie civil et des aménagements de surface dans le secteur ouest, vers le Cadam et l’aéroport notamment.
"La plupart des marchés ont déjà été attribués et sont en cours d’exécution" précise Christian Girard, Directeur Général Adjoint affaires juridiques, et contrats publics. Effectivement, dans le courant juillet, le tronçon entre le Cadam et Magnan sera mis en circulation en attendant l’ouverture totale des trois lignes, programmée pour la fin 2019. Les nouvelles rames sont déjà arrivées, on peut les voir stockées près du quartier des Moulins.
La Métropole, qui a passé 380 marchés l’an dernier, investit aussi dans le lit du Paillon pour des travaux d’assainissement d’un montant de 2,9 M€. Elle passe 57% de ses marchés avec des entreprises des A-M, 42% avec des
entreprises nationales et 1% avec des entreprises étrangères. La Ville de Nice n’est pas en reste avec 392 marchés signés l’an passé. Le plus significatif est la rénovation totale du groupe scolaire de la Corniche fleurie, facturé 3,7 M€, dont du désamiantage. La commune passe 64% de ses marchés avec des entreprises des AM, 34% avec des sociétés nationales et 2% avec des entreprises étrangères.

Conseil départemental : 150 M€ signés par an pour ses besoins

Entre 420 et 450 marchés sont passés par le Conseil départemental 06. Ce qui représente une enveloppe globale de 150 M€ environ, se répartissant pour moitié en investissement et pour moitié en fonctionnement.
Les domaines d’intervention sont très large, mais les plus importants concernent l’aide sociale, les routes et les collèges. Depuis la rénovation de locaux, comme à Victor Dury à Nice, ou la construction d’une extension à Saint Martin du Var. Ou récemment, après l’attentat du 14 juillet, la pose de portiques de sécurité et de caméras.
"Nos services techniques définissent leurs besoins et le service des marchés réalise toute la procédure de l’information aux entreprises" explique Stéphane Gomez.
Les marchés représentent environ 10% du budget total de la collectivité. Ils concernent aussi des secteurs inattendus, comme le festival C pas classique et les Estivales, qui font l"objet de marchés négociés avec les artistes ou leurs agents. Contrairement à une idée répandue, le Conseil départemental signe peu avec des entreprises étrangères puisque nous disposons sur notre territoire de (presque) tous les fournisseurs de matériels et services dont la
collectivité a besoin. Les deux-tiers du volume sont ainsi attribués à des entreprises installées dans les Alpes-Maritimes, le "gros" du reste à des sociétés de Paca, et marginalement à des boîtes battant pavillon étranger (et essentiellement monégasque).

Chiffres
- 5,6 M€ pour les travaux d’extension du collège Ludovic Bréa
à Saint Martin-du-Var.
- 2,4 M€ pour des travaux de génie climatique et de performance énergétique au CADAM.
- 2,6 M€ pour des travaux d’entretiens routiers dans le secteur Menton - Bévéra.
- 3,2 M€ pour la déviation Vallauris - Golfe Juan.
- 0,8 M€ pour des travaux acrobatiques de mise en sécurité des falaises.

Roquefort les Pins : 400 000€ annuels pour ses marchés publics

La commune de Roquefort-les-Pins a notamment aménagé un centre de vie. (JMC)

Avec une population en constante augmentation (5 250 habitants en 2000 et presque 7 000 aujourd’hui), la commune de Roquefort-les-Pins poursuit son aménagement pour répondre aux besoins de sa population.
Située à moins de vingt kilomètres de l’aéroport de Nice, près du parc de Sophia Antipolis, elle attire une population de cadres qui apprécient de pouvoir vivre dans un environnement protégé, à proximité de l’entrée de l’autoroute qui dessert la Côte d’Azur. Roquefort-les-Pins passe entre dix et quinze marchés publics chaque année. Ils représentent une dépense comprise entre 300 000 et 400 000 euros. Les principaux postes de dépense concernent les travaux et l’entretien de l’espace public, des bâtiments communaux.
L’appartenance de Roquefort à la CASA n’impacte pas les marchés publics, la ville ne déléguant pas ses prérogatives à la communauté d’agglomération de Sophia Antipolis à laquelle elle appartient.
Contrairement aux grandes villes, cette commune de taille moyenne - qui se situe vers la trentième place des plus peuplées dans les A-M - ne dispose pas de "gros" moyens techniques et financiers pour ce poste mais bénéficie toutefois d’un service dédié en interne.L’échéance du 1er octobre et de la numérisation va changer les habitudes. Au début, cela ne va certainement pas faciliter les choses - le temps de prendre de nouvelles habitudes - et les petites entreprises qui soumissionnent devront rapidement s’adapter en se mettant, pour certaines, sérieusement à l’informatique...Quant au service municipal des marchés publics, il se familiarisera très vite à ces nouvelles procédures. Il n’a pas le choix.

Saint Laurent-du-Var : 40 marchés l’an passé, le double prévu en 2018

3 M€ pour la rénovation de la piscine municipale. (JMC)

Avec 30 000 habitants, Saint Laurent-du-Var est l’une des communes les plus peuplées des A-M. Elle passe entre 10 et 12 millions euros HT de marchés publics par an. Un volume qui, dans la durée, évolue avec le mandat municipal, lorsque les projets initiés se traduisent dans la réalité. L’an dernier, Saint Laurent-du-Var a passé une quarantaine de marchés
tandis qu’en cette fin mars 2018, vingt-trois ont déjà été signés.
Les marchés publics sont souvent "récurrents", pour la fourniture de matériels et de services (entretien des haies, fournitures de bureau etc.) Ou plus exceptionnels, et qui concernent surtout l’investissement, comme la rénovation de la piscine municipale (3M€ l’an passé) qui datait de 1975 pour des travaux d’isolation, de reprise d’étanchéité, de rénovation du bassin etc.
Les affaires scolaires sont également un poste important. Avec, pour les cantines, une orientation "bio" pour les fruits et légumes, la viande, les pâtes... bref ce que le marché local est en capacité de fournir. Cinq personnes travaillent dans le service laurentin des marchés publics. Toutes ont été formées à la dématérialisation, qui est déjà opérationnelle pour les entreprises soumissionnaires qui le souhaitent.

Bon à savoir

Dématérialisation, le contexte change du tout au tout

Simplifier et améliorer la performance de l’achat, renforcer la transparence : tels sont les principaux objectifs de la dématérialisation de la commande publique. Dès 2001, le Code des marchés publics introduisait les premières dispositions autorisant leur dématérialisation, à égalité de valeur des procédures papier. Les directives européennes de 2014 ont donné un nouvel élan à la dématérialisation prise en compte par la réforme du droit de la commande publique entrée en vigueur au 1er avril 2016. Le Plan de transformation numérique de la commande publique adopté en décembre 2017 a prévu qu’à partir de ce 1er avril 2018 les acheteurs auront l’obligation d’accepter le Document Unique de Marché Européen (DUME) électronique.

Digitalisation : et ce n’est qu’un début...

Le Premier ministre a précisé le 1er février la feuille de route du plan Action Publique 2022. Avec un objectif : "100% des
démarches administratives accessibles en ligne, y compris par le mobile". Il a donné quatre ans pour parvenir à ouvrir les services en ligne. Avec un rythme soutenu dès cette année 2018.
Un tableau de bord des téléservices disponibles sera mis à disposition des citoyens, qui pourront signaler des dysfonctionnements, fonctionnalité s’inscrivant dans la volonté gouvernementale d’évaluer la performance des administrations en publiant des indicateurs de résultats et de qualité de service. Le secteur éducatif a été le premier concerné par la dématérialisation dès la rentrée puisque les formalités étaient accessibles par un portail et une application. Les marchés publics sont systématiquement prévus pour une réponse en ligne des entreprises dès cette fin octobre. Fin novembre, ce sera le tour des demandes de permis de construire.

Aide juridictionnelle
L’aide juridictionnelle et les demandes CMU-complémentaire seront accessibles en fin d’année. La numérisation des services s’étendra en janvier 2019 aux demandes de subvention des associations culturelles, au 1er janvier 2020 aux déclarations d’emploi des travailleurs handicapés et au 31 décembre 2020 aux demandes de financement des logements sociaux par les maîtres d’ouvrage HLM (après une période d’expérimentation cette année). Abordant de nombreux canaux de l’action publique, ces téléservices seront simplifiés, les formulaires de parfois 10 pages devant faire l’objet d’une contraction permise par l’identification FRANCEConnect. Cet outil sécurisé, basé sur une plateforme informatique distribuant l’information aux interfaces de téléservices labellisées, répond au principe “Dites-le-nous une (seule) fois” permettant aux usagers d’utiliser un identifiant unique pour se connecter à l’ensemble des services publics en ligne d’ici le 31 décembre 2020.
Cet outil sera mis à disposition des entreprises souhaitant y recourir. Il est aussi prévu une version hautement sécurisée pour traiter les informations sensibles (dépôts de plainte ou demande de procuration). La digitalisation est sur les rails, en aller simple, sans billet de retour possible..

La simplification
Le décret n°2016-360 du 25 mars simplifie les démarches.
Les candidats ne sont plus obligés de fournir documents et renseignements que la collectivité peut obtenir par un système électronique de mise
à disposition géré par un organisme officiel.

Le DUME

Depuis avril 2016, il existe un formulaire type élaboré par la Commission Européenne. Il s’agit du "DUME" (Document Unique du Marché Européen) qui permet de candidater aux marchés publics. Il regroupe en un document unique les informations demandées pour la candidature et tous les certificats
à fournir pour les marchés. Il est disponible sur le site www.ec.europa.eu
Le DUME est obligatoire pour les procédures formalisées et reste à l’appréciation des acheteurs pour les MAPA. Attention : sa version papier est valable jusqu’au 18 avril de cette année...

Marchés publics : les seuils 2018

Au 1er janvier, les seuils des marchés publics et des contrats de concession ont augmenté :
- Jusqu’à 25 000€ HT, pas d’obligation légale précise.
- 144 000 € HT pour les marchés publics de fournitures et de services de l’État.
– Jusqu’à 221 000 € HT pour les marchés de fournitures et de services des collectivités territoriales. Ils sont passés dans le cadre d’une procédure adaptée (Mapa).
– Jusqu’à 443 000 € HT pour les marchés publics de fournitures et de services des entités adjudicatrices.
– Jusqu’à 5 548 000 € HT pour les marchés publics de travaux et pour les contrats de concessions. Ils sont passés dans le cadre d’une procédure adaptée (Mapa).
- Au delà de ces seuils, trois types de procédures formalisées : l’appel d’offres, la procédure concurrentielle avec négociation, le dialogue compétitif.
Références : JORF n°0305 du 31 décembre 2017 (texte n° 171) et www.eur-lex.europa.eu/legal-content/FR

Photo de Une : le chantier du Tram à Nice représente de nombreux marchés publics. JMC

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