Immobilier : la filière

Immobilier : la filière veut s’attaquer à la pénurie de logements neufs

"Il faut accélérer la production de logements neufs. C’est essentiel au plan économique et pour l’attractivité du territoire". Selon Jean-Marie Ebel, président de l’Observatoire immobilier d’habitat de la CCI Nice Côte d’Azur, le salut de la filière ne pourra venir, dans les Alpes-Maritimes, que d’une significative augmentation de l’offre. Un défi pour ses différents acteurs englués, en la matière, dans un marasme qui perdure.

L’année 2020 en est la plus flagrante illustration. Le 10 février, au moment de dresser le bilan de ce millésime tristement mémorable, les différents partenaires de l’observatoire se sont logiquement adonnés à un récital de mauvaises nouvelles que seule la voix du président départemental de la FNAIM est parvenue à modérer. "La clientèle est là et souhaite investir massivement", a déclaré Cyril Messika, en évoquant les taux d’intérêt historiquement bas qui portent le marché de l’existant. Sans oublier de préciser que cette relative bonne santé est aussi une conséquence des carences observées dans le neuf.
Les chiffres présentés par Muriel Fernand ne laissent place à aucun débat d’interprétation. "L’offre nouvelle a chuté de 40%", a indiqué la responsable de l’immobilier à la CCI. Seulement 2 402 logements ont ainsi été mis en vente l’an dernier, contre 3 998 en 2019. "C’est le niveau le plus bas depuis dix ans". Pour les commercialisations comme pour le stock disponible, la tendance est identique : respectivement - 25% et - 23%. Le délai d’écoulement est toujours de huit mois, "ce qui est extrêmement faible". Et la preuve "d’un marché de pénurie". Avec de tels résultats, l’habitat neuf est loin de répondre au besoin annuel, qui est estimé à 5 000 biens dans les Alpes-Maritimes.

L’écueil des permis de construire

Les causes du décalage très criant en 2020 sont connues. L’année a d’abord été marquée par la mise en place du PLU métropolitain, qui a pu constituer un frein. Mais elle a aussi été électorale, une particularité synonyme d’un habituel ralentissement administratif que la crise sanitaire et le confinement ont accentué. "Les premières décisions en matière de permis de construire ont été prises en octobre. Une année a quasiment été perdue", a déploré Jean-Marie Ebel. Dans ce domaine, la filière se dit en souffrance. "1 000 autorisations ont été refusées", selon le comptage de Marc Raspor, président de la Fédération des promoteurs immobiliers de la Côte d’Azur et de la Corse. "Il y a une vraie crispation sur la délivrance des permis. Il faut 36 mois pour sortir une opération, c’est un cycle long". Et de s’inquiéter également du discours grandissant, dans les collectivités et chez les élus, selon lequel "on a trop construit".

Un manifeste pour alerter les élus et l’État

"La crise est devant nous", a prédit Marc Raspor, en rappelant que la construction d’un logement équivaut à deux emplois. Ce n’est pas la Fédération départementale du BTP, représentée par son secrétaire Lionel Dolciani, qui le contredira, elle qui a peiné à maintenir en poste ses 23 000 salariés en 2020. Et qui table déjà, en dépit d’un manque de visibilité, sur un recul de 10% de son activité en 2021.
L’année sera à nouveau caractérisée par "une compression combinée de l’offre et de la demande qui va pénaliser la production", selon Jean-
Marie Ebel, qui a cependant apporté une note positive : "il y a un intérêt marqué des investisseurs institutionnels pour le marché de l’habitat face au marché des bureaux qui est plus incertain et moins rémunérateur". La Caisse des dépôts et Action Logement ont en effet prévu de s’engager sur 50 000 logements en 2021.
Autre motif d’optimisme : les différents acteurs de l’immobilier et de l’acte de bâtir, qui représentent 11% du PIB départemental, entendent se mobiliser. "La filière doit être unie", a martelé Jean-Pierre Savarino, président de la CCI, qui a annoncé que ses réflexions vont se concrétiser dans les prochains mois par la production d’un manifeste rédigé collectivement. "Il détaillera les points de blocage que nous avons identifiés et sera le reflet des actions de la filière". C’est grâce à ce genre d’outil et par le dialogue avec les élus et l’ État qu’elle compte faire ériger le logement, et la revitalisation de la production neuve, au rang de "priorité régionale".

Photo de Une : En 2020, les mises en vente de logements neufs ont chuté de 40% dans les Alpes-Maritimes. DR J.P

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