JEAN-PHILIPPE VOUILLON «

JEAN-PHILIPPE VOUILLON « Les taxes sont un frein pour le logement »

Les notaires ont enregistré une reprise des transactions au second semestre dans les Alpes-Maritimes. Mais le neuf reste encore à la traîne...

- Le produit des droits de mutation a augmenté en 2015. Est-ce le signe du redémarrage ?
Il y a deux ans, le gouverne- ment a offert, à titre provisoire, la possibilité d’augmenter la taxe départementale de + 0,7% en la passant de 3,8% à 4,5%. De nombreux conseils généraux, dont celui des Alpes-Maritimes, ont voté cette augmentation. Mais, comme on le subit trop souvent, le provisoire est devenu définitif par inscription dans la loi de finances.

- Ces + 0,7% expliquent-ils la hausse des droits de mutation encaissés par le département ?
En partie seulement. Ils représentent en fait une hausse de + 18,4% des droits de mutation perçus par le département. Mais il y a effectivement eu davantage d’activité immobilière l’année dernière, d’où une recette de + 15% pour la collectivité.

- Ces taxes sont très élevées. Elles pèsent sans doute sur les intentions d’achat...
Les taxes départementales, communales et de frais d’assiette sont de 5,80% aujourd’hui. Effectivement, c’est beaucoup. Les gens appelés à déménager régulièrement, pour des raisons professionnelles par exemple, y regardent à deux fois...

- Comment se porte le marché immobilier dans les Alpes-Maritimes ?
La crise de 2008/2009 a généré une instabilité du marché. On le constate aux prix pratiqués. Nos statistiques montrent au- jourd’hui une augmentation du nombre des mutations. Ce phénomène a d’abord concerné l’ancien mais a aussi profité au neuf.

- Pourtant, il y a peu d’ouvertures de nouveaux programmes...
Pour qu’un nouveau programme soit livrable, il faut entre 18 et 24 mois, période où il peut y avoir des retour-nements de marché... Les terrains à bâtir sont chers dans les Alpes-Maritimes. En plus, ils sont rares, malgré la tenta- tive de la loi SRU de permettre de nouvelles constructions en densifiant les secteurs déjà ur- banisés. Mais il se trouve que les habitants déjà installés n’ont pas envie d’avoir une tour de 30 étages en face de chez eux...

- Le foncier est donc le principal problème pour le neuf ?
Le niveau des prix complique le travail des promoteurs qui doivent aussi rentabiliser leurs opérations. Comme les banques qui les accompagnent, il leur faut de la visibilité avant de pouvoir s’engager. Mais à l’avenir, si l’on veut économiser les terres agricoles, la seule solution sera d’augmenter le nombre de mètres carrés construits dans les zones déjà urbanisées.

- D’autres contraintes ?
Il y a beaucoup de législation. Comme avertir les gens des dangers (comme les PPR inondation, incendie... ndlr) dans le but de les informer et de sécuriser leur achat. Et les collectivités - mairies en particulier – considèrent qu’accueillir de nouveaux habitants engendre aussi des inconvénients qu’il faut antici- per : la circulation, le traitement des eaux, la collecte des déchets ménagers, etc. Il leur faut donc trouver la parfaite adéquation entre le financement des investissements à réaliser et l’arrivée de ces nouveaux habitants.

- Les dispositifs comme Sellier ou Pinel favorisant l’investissement locatif n’ont-ils pas pollué le marché en le saturant ?
Cela arrive quand les dispositions législatives imposent des produits qui ne sont pas ceux que le marché attend. Ce n’est pas le cas dans les Alpes-Mari- times. Actuellement, pour le logement des actifs, les investisseurs sont essentiellement les bailleurs sociaux.

- Mais les promoteurs privés intègrent aussi des logements sociaux dans leurs programmes...
Oui, mais les contraintes de prix au mètre carré sont fortes pour le logement social. Dans un même programme mixte, c’est le privé qui subventionne le social. Au- trement dit cela contribue à faire monter le prix du neuf.

- Enfin, comment jugez-vous les prix ?
Objectivement, le marché fait le tri entre les produits. Ceux qui sont de qualité trouvent preneurs après négociation à un niveau estimé raisonnable et accessible par l’acheteur. Dans ce cas, ils sont vendus rapidement. Les autres, restent longtemps sur le marché.

Le notariat
Le notaire est un officier public exerçant dans un cadre libéral. Il intervient dans l’ensemble des domaines du droit : famille, immobilier, patrimoine, entreprises, rural, collectivités locales... Agissant pour le compte de l’Etat, nommé par le ministre de la justice, il confère aux actes qu’il rédige un gage d’authenticité.

Photo : JMC
Maître Jean-Philippe Vouillon, vice-président de la chambre des notaires-06

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