L'histoire sans fin (...)

L’histoire sans fin de la simplification administrative

Déjà considérée comme un enjeu par le précédent gouvernement, la simplification administrative pour les entreprises est aujourd’hui portée par une structure, le Conseil de la simplification, qui lui est spécifiquement dédié. Le point sur la méthode et les résultats.

« Si on s’attend à ce que l’on divise par deux le Code du travail, on sera déçu », prévient Emmanuel Jessua, directeur du Programme de Simplification pour les entreprises au Secrétariat général du gouvernement.

C’était le 11 décembre dernier, à Paris, lors d’un débat « Simplification : au-delà des annonces, quelles priorités et urgences pour les PME ? », organisée par l’AJMPE, l’association des journalistes spécialisés dans les PME. Participait également Richard Thiriet, président national du CJD, le Centre des jeunes dirigeants d’entreprise.

Le « choc de simplification » avait été annoncé par le président de la République en personne, le 28 mars 2013. Quatre mois plus tard, le gouvernement présentait les 200 mesures de son programme destiné à simplifier la vie des Français et des entreprises. Aujourd’hui, c’est le Conseil de la simplification, sous la direction du secrétaire d’Etat Thierry Mandon, placé sous l’autorité directe du Premier ministre, qui est à la manœuvre. « L’idée n’est pas de supprimer des pans entiers de la réglementation, mais de réduire les complexités auxquelles font face les entreprises au quotidien, sans mettre en cause les grandes protections », rappelle Emmanuel Jessua. Quant aux procédures de mise en œuvre, « le choc de simplification est en réalité un mouvement dans la durée », précise-t-il. Des nouvelles annonces sont prévues tous les six mois. Et, récemment une série de mesures ont été intégrées au projet de loi Macron, notamment sur la justice prudhommale et la construction. Elles portent, par exemple, sur la réduction des délais de construction afin que les autorisations en matière d’urbanisme soient délivrées en cinq mois maximum. Ces mesures impactent des droits connexes, comme celui de l’environnement et du patrimoine.

Petites mesures pour petites entreprises ?

Les petites entreprises sont spécifiquement visées par une nouvelle mesure de simplification : les obligations de réponses aux enquêtes statistiques sont allégées, pour les sociétés qui comptent moins de 10 salariés : « Pas plus d’une enquête pendant l’année », promet Emmanuel Jessua ( sauf pour des cas très spécifiques ). « La complexité peut jouer comme une barrière à l’entrée pour de petits entrants », note-t-il. Partant, la simplification devrait se révéler particulièrement bénéfique pour les entreprises de taille plus réduite, moins outillées pour faire face à la complexité administrative. Mais certains se montrent très critiques, quant aux résultats réellement obtenus par le gouvernement. Jean-Marc Jaumouillé, directeur des techniques professionnelles de Fiducial, société de conseil auprès des PME, évoque des « tentatives d’hypnose avec le sujet de simplification » sur son site Internet. « Le temps de l’entreprise et le temps politique ne sont pas les mêmes. Il faut faire avec… », estime pour sa part Richard Thiriet. Le CJD participe à diverses commissions du Conseil de la simplification. D’après son représentant, la politique du « pas à pas », adoptée à travers les vagues de propositions successives, est positive. Et certaines mesures sont particulièrement bienvenues, comme celle de la simplification de la fiche de paie, même si, derrière la simplification visuelle, demeure une complexité de traitement. Pour autant, au niveau global, et en particulier, sur le dialogue social, « l’environnement reste très contraignant », constate Richard Thiriet. Sur le Code du travail, « il y a énormément à faire. Il n’y a pas un chef d’entreprise qui ne fasse pas une erreur sociale par an », poursuit-il.

Autre souci majeur pour le président du CJD, la complexité du nouveau compte pénibilité, « c’est bien de vider la baignoire, mais il faudrait penser à fermer le robinet… ».

Au total à en suivre Fiducial, quinze lois, 38 ordonnances et plusieurs milliers de décrets ont été émis en France depuis le 1er janvier 2014. « Il faut un vrai changement de culture dans la production de normes nouvelles », admet Emmanuel Jessua, pour qui le compte pénibilité constitue un « exemple problématique(…)Le conseil de la simplification avait pris position pour dire que les mécanismes étaient probablement trop complexes », explique-t-il. Manifestement, il n’a pas été entendu. Le chantier de la qualité de la production normative reste ouvert.

par Anne DAUBREE

deconnecte