La voie étroite des (...)

La voie étroite des investissements européens

Le programme européen d’investissements vise à booster la croissance, en déclenchant des investissements privés et publics. Il pourrait susciter 120 milliards d’euros par an en se concentrant dans les domaines du numérique, de l’énergie et des transports. A condition que les projets soient choisis avec soin et que le contexte favorise l’investissement privé.

1,3 million d’emplois supplémentaires d’ici fin 2017, entre 300 et 400 milliards d’euros ajoutés à la richesse de l’Union, soit 2,3% de croissance du PIB en plus : c’est l’ambition de la mobilisation de 315 milliards d’euros d’investissements annoncée par Jean-Claude Juncker, le nouveau président de la Commission Européenne, en juillet dernier et précisé en novembre.

Concrètement, le plan de relance des investissements prend la forme d’un fonds confié à la BEI, Banque européenne d’investissement, et doté de 21 milliards de fonds propres. C’est sur cette base que Jean-Claude Juncker entend lever des fonds privés et publics. Une nécessité, puisque depuis la crise de 2007, les investissements en Europe ont chuté, avec des trajectoires diverses selon les pays, les secteurs, ou s’il s’agit d’investisseurs privés ou publics. D’après la « Note » de novembre 2014, publiée par France Stratégie, organe de réflexion du Premier ministre, la stratégie européenne d’investissement pourrait déclencher des investissements supplémentaires à hauteur de 120 milliards d’euros par an, soit plus que prévu par les experts. Mais cette prévision optimiste suppose la mise en œuvre d’une politique énergie climat ambitieuse.

Pour les auteurs de l’étude, Lionel Janin et Pierre Douillard, trois secteurs cibles pourraient être envisagés : l’énergie, les transports et les communications électroniques. Dans ces trois domaines, les infrastructures représentent un objectif privilégié des investissements. En 2012, déjà, le secteur de l’énergie en Europe a investi environ 100 milliards d’euros, celui des transports, 200 milliards, et les télécommunications, 50 milliards, estime Eurostat. C’est dans les transports que la part de l’investissement public est la plus forte (30%) alors qu’elle est plus limitée dans l’énergie et les télécommunications, où elle est évaluée à 5%. Pour ces trois secteurs confondus, la part du public s’élève à 20% des investissements totaux. Coté transport, au niveau européen, l’investissement dans ces infrastructures est principalement soutenu par le dispositif du « Mécanisme pour l’interconnexion en Europe » (MIE), rappelle la note. Le programme est doté de 33,2 milliards d’euros pour la période 2014-2020, soit moins de 5 milliards d’euros par an. Objectif du dispositif, précisent les analystes, « des effets de levier importants », en suscitant l’apport de financements publics des Etats membres et privés, via divers instruments financiers. Le MIE table sur un effet levier sur les financements des Etats membres de 5, et sur ceux des opérateurs privés, de 20. Pour le secteur de l’énergie, début 2014, la Commission européenne a proposé un cadre pour les politiques « climat et énergie », complété par des réflexions sur l’efficacité énergétique et ses effets potentiels sur la réduction de la facture de gaz et les importations de pétrole. Là aussi, les investissements dans la rénovation énergétique pourraient engendrer d’importants bénéfices macro-économiques. S’ils sont réalisés, il s’agirait alors de quelque 90 milliards d’euros d’investissements par an, dont une grande partie dans la rénovation énergétique des bâtiments. Mieux, pour le parc des logements européens, le montant d’investissement pourrait même doubler, dans le cadre d’une dynamique d’amélioration de l’efficacité énergétique.

Une stratégie délicate à mettre en œuvre

Mais ces dynamiques potentielles d’investissement ne pourront s’enclencher que si des conditions bien précises sont réunies, précisent Lionel Janin et Pierre Douillard qui soulignent la nécessité de sélectionner soigneusement les investissements, étant donné les contraintes budgétaires actuelles. « Il convient en particulier de ne pas se laisser leurrer par les niveaux extrêmement faibles des taux d’intérêt qui laisseraient croire que tout projet peut être financé », précisent-ils. Et les évaluations des projets devront prendre en compte leurs externalités environnementales et leur potentiel de croissance à moyen et long terme : « Ne pas céder à la tentation de réaliser des infrastructures dont les coûts d’entretien à l’avenir sont susceptibles de grever davantage encore les marges de manœuvre budgétaire », ajoutent les auteurs. Autre risque souligné, « la volonté politique d’engager rapidement ces investissements peut aussi aboutir à miser sur une mauvaise technologie, si cette dernière évolue rapidement. Un des enjeux est notamment d’appréhender au mieux l’incertitude technologique dans des secteurs en mutation ». Par ailleurs, en ces temps de budgets publics resserrés, les décideurs politiques ont devant eux un vaste chantier qui consiste à lever les obstacles à l’investissement privé et à l’encourager. « Un bon usage des signaux prix (carbone), des normes (bâtiment pollution) et des garanties publiques déclencheraient massivement des investissements dans les différents secteurs, sans nécessairement accroître le recours au financement public », plaident Lionel Janin et Pierre Douillard.

750 millions d’euros pour le numérique

750 millions d’euros destinés à déployer des infrastructures numériques à haut débit dans les territoires français. Tel est l’objet du protocole d’accord signé par La BEI, la Banque Européenne d’Investissement avec la BPCE, le Crédit Agricole, le Crédit Mutuel, la Banque Postale, la Société générale et la Caisse des Dépôts et de Consignations, le 19 décembre à Bercy. « Cette initiative illustre le rôle que doivent jouer les puissances publiques et l’Europe, via la BEI, au service de l’investissement et de la croissance », explique le communiqué du ministère de l’Economie

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