Les lourdes conséquences

Les lourdes conséquences de la crise en Chine

Le ralentissement de l’activité en Chine, le krach sur le marché des actions et la dépréciation du Renminbi confirment que la Chine s’enfonce dans une grave crise, qui ne manquera pas d’avoir de lourdes conséquences…

Bien que la croissance de l’économie chinoise soit officiellement de 7 %, il est fort probable que celle-ci ne dépasse pas en réalité 3 %, comme le laisse penser le recul de la production d’électricité, la chute du fret ferroviaire ou la faiblesse des importations. Cela révèle par conséquent un essoufflement du modèle économique chinois, qui se traduit par une stagnation de l’industrie traditionnelle à forte intensité de main-d’œuvre et d’énergie, un recul de l’investissement et des sorties de capitaux.

Un rééquilibrage qui prend du temps

Les autorités chinoises cherchent à rééquilibrer leur modèle économique, pour l’instant basé essentiellement sur les exportations, en donnant plus d’importance à la demande intérieure, en particulier la consommation des ménages qui reste l’une des plus faibles au monde (35 % du PIB). D’où les augmentations de salaires, l’ébauche d’un système de protection sociale et les diverses incitations à monter en gamme, afin de ne plus dépendre de la seule compétitivité-coût, qui s’est beaucoup dégradée ces dernières années.

Hélas, ce changement de modèle prend du temps, et pour l’instant la demande intérieure est encore loin d’avoir pris le relai des exportations. Les investisseurs commencent donc à douter de la solidité économique de la Chine, d’autant que plane la menace d’une explosion de la gigantesque bulle immobilière, financée par une hausse phénoménale du crédit bancaire accordé par des structures financières privées opaques (shadow banking).

Vers une guerre des monnaies ?

Pour faire face à cette chute de l’activité, la Chine a renoué au mois d’août avec la dépréciation de sa monnaie pour relancer ses exportations. Pourtant, l’objectif affiché était une libre convertibilité du Renminbi, afin d’intégrer au plus vite le cercle des grandes monnaies qui font référence au FMI, ce qui ne peut se faire qu’en internationalisant le Renminbi et en le laissant librement flotter.

On risque donc d’assister à une guerre des monnaies, c’est-à-dire des dépréciations non coordonnées des taux de change, dans le but de gagner en compétitivité-prix. Or, à ce jeu tout le monde y perdra, ne serait-ce qu’en raison du renchérissement des importations qu’une telle dépréciation induit. Dans ce contexte, l’euro pourrait aussi s’apprécier par rapport aux diverses monnaies des pays émergents, ce qui contribuerait bien entendu à affaiblir la valeur des exportations de la zone euro vers ces pays, et partant, la croissance européenne.

Commerce mondial en berne

Le recul marqué des importations de la Chine conduit à un ralentissement du commerce avec ses voisins directs comme la Malaisie, la Thaïlande ou le Japon, mais aussi à une baisse des exportations en volume de la zone euro vers ce pays, l’Allemagne étant le pays le plus touché, car ses exportations vers la Chine représentent 2,5 % de son PIB. Par ailleurs, le commerce entre la zone euro et les régions du monde très dépendantes de la croissance chinoise subira inévitablement un affaiblissement. Ainsi, à terme, c’est l’ensemble du commerce mondial qui sera en berne si la crise chinoise se prolongeait.

De plus, le ralentissement de l’activité en Chine réduit sa demande de matières premières, avec pour conséquence, eu égard à son poids dans la demande mondiale, une baisse des prix de la plupart des matières premières, à l’instar du cuivre qui vient d’atteindre son plus bas niveau depuis six ans. Avec d’un côté pour conséquence positive la baisse du coût des importations de matières premières comme le pétrole, mais de l’autre un effet négatif sur les pays exportateurs, qui s’enfoncent dès lors eux-aussi dans une crise.

Des cours boursiers en baisse

Après une progression de 150 % entre juin 2014 et juin 2015, le marché des actions en Chine s’est brutalement retourné le 15 juin, avec une chute moyenne de plus 30 % en trois semaines ! Le 24 août fut d’ailleurs un lundi noir sur les bourses mondiales, la plupart des places financières ayant essuyé de lourdes pertes. Celles-ci n’ont pas tant résulté d’un phénomène de contagion, que de la prise de conscience de la fragilité d’une économie chinoise dans laquelle tous les pays du monde ont investi des capitaux. Le danger est que l’on pourrait alors assister à un effet de richesse négatif en Europe, c’est-à-dire une chute de la demande intérieure en raison de la baisse des portefeuilles boursiers.

En définitive, la crise chinoise, si elle devait durer, pourrait avoir un fort effet dépressif sur l’économie mondiale.

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