Les péages à fond la (...)

Les péages à fond la caisse

Or donc, chers amis, nous voici depuis lundi à rouler au mieux à 90 kilomètres à l’heure sur notre chère A8 entre Cagnes-sur-Mer et Saint Laurent-du-Var.
Cette fois, on ne nous refait pas, au nom de la sécurité, le coup du 80 sur les routes secondaires, décision autoritaire d’Édouard Philippe, dont même son (ex) ministre de l’Intérieur considère que c’est une belle "sonnerie".
Non, nous devons ralentir parce que le concessionnaire n’a pas voulu installer à ses frais des panneaux "dynamiques" et lumineux qui auraient permis de fluidifier la circulation en fonction de l’état réel et instantané du trafic.
Et pourquoi ce refus de Vinci Autoroute - Escota ? Sûrement pas parce que la société n’aurait pas les moyens d’investir les 3 M€ dans ces équipements que les milliers d’automobilistes empruntant ce tronçon auraient vite remboursé et amorti en passant au péage. Non, et la raison du refus n’échappera pas aux spécialistes du droit : cet équipement n’étant pas expressément prévu dans le contrat, le concessionnaire s’en dispense, nonobstant les injonctions du préfet, les demandes réitérées des politiques, et les usagers en colère à force de passer à la caisse.
Car nous sommes, ici et maintenant, la seule grande ville à ne pas bénéficier d’une gratuité autoroutière pour contourner l’agglomération. Partout ailleurs en France, on roule gratis sur des dizaines de kilomètres d’autoroute. Et on ne bouchonne pas aux péages, l’une des raisons des ralentissements du
matin et de la fin d’après-midi.
L’État étant chroniquement à la recherche de rentrées pour boucler ses fins de mois, l’idée lumineuse prise au début des années 2000 a consisté à vendre les bijoux de famille en concédant le réseau autoroutier contre monnaie sonnante et trébuchante. L’affaire est tellement rentable sur le dos des usagers que l’autorité de la concurrence a souligné "le rapport de force très largement déséquilibré entre les sociétés d’autoroute et l’État", mettant en évidence "la rentabilité exceptionnelle" de ces sociétés.
Et voilà pourquoi Vinci - Escota aujourd’hui ne peut pas financer nos pauvres panneaux sur l’A8.
On nous dira que le réseau autoroutier est bien entretenu, ce qui est vrai. Mais c’est bien le moins quand on s’acquitte d’un péage atteignant jusqu’à 54 centimes du kilomètre (sur l’A14 en région parisienne)... Puisque les contrats de concession sont si "déséquilibrés" sur le dos des usagers payants, rien n’empêche Bercy de ponctionner un tantinet ceux qui, tels les GAFA, abusent d’une position dominante. Après tout, cela remettrait un peu de justice, soulagerait les classes moyennes qui pour aller au travail prennent l’autoroute parce qu’elles n’ont pas le choix.

Je suis prêt à parier qu’il n’y aurait pas grand monde à descendre dans la rue pour défendre les concessionnaires contre... un petit péage.

J.-M. CHEVALIER

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