Nicolas Bergé : "Rompre

Nicolas Bergé : "Rompre la solitude du travail à domicile"

Pionnier du coworking à Nice, Nicolas Bergé a fondé Les Satellites il y a plus de 10 ans. Il explique avec passion et lucidité pourquoi et comment il s’est lancé dans l’aventure.

Coworking ici, cotravail là-bas.
Nicolas Bergé a découvert le coworking pendant une année d’étude au Canada. Il est étudiant en école de commerce (HEC Paris) et a choisi l’entrepreneuriat en majeure, ne s’intéressant que très peu au marketing et à la finance. Mais il n’a pas encore une vision très nette de son avenir professionnel. "Tout a changé lorsqu’un professeur nous fait découvrir le coworking, alors naissant dans la ville de Montréal, en nous racontant qu’un lieu réunit des entrepreneurs, des indépendants, des personnes qui sont seules et qui mènent leur barque professionnellement", confie Nicolas Bergé. On est en 2009 et la fin des études approche. "Cela rime souvent avec la fin de la colocation, la fin des travaux de groupe, la fin des soirées étudiantes. En bref, la fin d’une vie collective qui me plaisait énormément. Et comme j’avais choisi l’entrepreneuriat, cela signifiait, d’un coup d’un seul, se retrouver seul. Ce qui m’horrifiait", se souvient l’entrepreneur. "Le coworking renverse un peu tout cela. Immédiatement, je comprends que je ne serai pas seul, que cela va m’aider et qu’en faisant cela, j’aiderai d’autres personnes qui sont dans la même situation que moi".

Nicolas Bergé ©S.G

Un monde s’ouvre alors à l’étudiant français. Comme une révélation, il trouve une réponse à ses interrogations : le coworking devient son mémoire de fin d’études et son projet pour le concours d’entrepreneuriat de l’école (qu’il remporte) en même temps qu’il ouvre son horizon professionnel. "L’inspiration vient de ce qui existait au Canada et aux États-Unis. Quand je reviens en France en 2011 et que je sais que c’est ce que je vais faire, il y a 10 projets en cours, pas plus. Mais ce n’est pas facile de se réunir avec d’autres confrères. Je sais que cela va être un long chemin, le coworking n’est pas forcément très connu et très compris".

"Construire sa communauté"

Lui le Cannois choisit Nice, où il a de la famille. "Nice m’a paru très évident, c’est la grande ville du département". Nicolas Bergé a le soutien de ses amis et de se famille, ce qui est "important pour démarrer une aventure entrepreneuriale". Et puis il y a ceux qu’il appelle ses "mentors", "les premières personnes auprès desquelles j’ai posé des questions et chercher à comprendre comment cela fonctionnait". Ses mentors lui donnent un conseil, qu’il donne à son tour aujourd’hui aux personnes souhaitant suivre sa voie : "Construire sa communauté avant de construire le lieu. On a tendance à croire qu’en ouvrant un lieu, les gens viendront immédiatement, ce qui est faux. C’est une règle très simple dans le monde de l’entreprise : il ne suffit pas de créer son service et d’attendre que les clients arrivent. Le conseil qu’on m’avait donné c’était ‘’Trouve tes 10 premiers membres’’. Les satellites ouvrent en décembre 2011 et pendant 11 mois, je n’ai fait que ça : aller chercher mes premiers membres et essayer de raconter ce que j’entends par coworking. Je vais aux événements qui réunissent les travailleurs indépendants, les entrepreneurs, les freelances car je sais que c’est à eux que le coworking s’adresse. Le premier jour d’ouverture des Satellites, je suis accompagné de six autres personnes pour qui c’était évident. C’était extrêmement long mais à l’époque cela correspondait au temps qu’il fallait pour concrétiser cette idée".

"Éxpérience sociale"

L’idée n’était pas simplement d’ouvrir un lieu. Le fondateur des Satellites, qui prend toujours le temps de la réflexion avant de répondre, souhaitait proposer une "expérience sociale". "Le point de départ, qui est commun à tout le monde, c’est de fuir ou rompre la solitude et l’isolement du travail à domicile. (…) Les personnes viennent d’abord pour sortir de chez elles et trouver un environnement de travail mais, ce qui est certain, c’est qu’elles reviennent pour les liens qu’elles ont créés avec les autres personnes. C’est sur cela qu’on construit : l’expérience sociale, les liens, le fait de mieux se connaître. Et ce qui décline de cela, c’est l’entraide, le partage, l’échange, la collaboration", avance Nicolas Bergé, qui gère aujourd’hui la structure avec Mélodie Becquet, membre des "Sats" à l’origine. "On aime aussi beaucoup la participation. S’impliquer et être curieux de ce que les autres font. On n’a jamais été concentré sur une activité, il y a énormément de métiers aux Satellites, avec des parcours différents, des origines différentes. Cela apporte de la richesse aux événements".

Les Satellites : près de 150 membres dans la communauté

"Ce chiffre n’a plus tellement bougé depuis trois, quatre ans", relève Nicolas Bergé. "C’est un chiffre un peu spécial car c’est un chiffre seuil au-dessus duquel généralement on perd la connaissance des relations interpersonnelles. Nous n’avons pas fait exprès de l’atteindre mais il se trouve qu’on a du mal à aller au-delà. Quand on va au-delà, à plus ou moins 10%, naturellement cela revient vers 150 parce qu’on n’a pas la capacité de maintenir les mêmes relations. Le lieu s’y prête également et la manière dont on fait les choses". Les Satellites ont connu trois lieux : à Riquier pour les débuts, dans un espace de 100 m2, puis rue du Congrès, de 2013 à 2015, avec une surface multipliée par deux, et avenue Georges Clémenceau depuis 2015, dans un espace de 400 m2, répartis sur plusieurs niveaux. "La configuration du lieu, avec des niveaux, des coins et des recoins différents, offrait quelque chose d’intéressant. Cela permet d’avoir des ambiances différentes. Jusque-là on était sur des plateaux uniques", souligne Nicolas Bergé.
La notion de communauté est très importante pour Les Satellites depuis le début. Et cela les a sans doute sauvés pendant les heures les plus compliquées de la crise sanitaire. "On a un abonnement, qu’on appelle l’abonnement communauté, qui permet aux membres de venir un jour par mois. On a toujours présenté cet abonnement comme la porte d’entrée dans la communauté des Satellites et il a toujours été l’abonnement le plus choisi. Cela a été un matelas pour passer les moments les plus difficiles".

Les Sats : plus de des bureaux


Comme tous les espaces de coworking, Les Satellitesproposent des bureaux, avec ordinateurs, imprimantes et connexion internet, et différentes salles de réunion.
Mais leur offre ne s’arrête pas là. Pour ceux qui le souhaitent, plusieurs événements professionnels sont organisés. Les membres peuvent ainsi se présenter lors des sessions "Zoom" (baptisées ainsi bien avant le succès de l’application pendant la crise sanitaire) organisées une fois par semaine. Il y a aussi les sessions "Galilée parle", organisées une fois par mois, au cours desquelles "un membre qui maîtrise une méthodologie, un savoir, une expertise, vient l’enseigner aux autres", indique Nicolas Bergé. Enfin, sont également organisées des séances de "brainstorming" (Les Agitateurs) pour aider un membre confronté à une problématique, en lui montrant d’autres approches, d’autres angles d’attaque à envisager. Parce qu’il n’y a pas que le travail dans la vie, les Satellites proposent aussi des sorties : "happy hour", randonnée du 14 juillet, week-end ski et week-end à la campagne.

Lire aussi :
- À Nice, le coworking a de beaux jours devant lui
- La Verrière : Un espace pour développer la "culture d’entreprise"
- Coworking : "Ne pas associer mon lieu de vie à mon lieu de travail"

Photo de Une : DR S.G

deconnecte