
Surendettement : Le retour des mauvais jours ?
- Par Jean-Michel Chevalier --
- Par Sébastien Guiné --
- le 28 février 2025
Même si on est encore loin des plus de 230 000 dossiers de 2014, le surendettement a connu en 2024 une nouvelle augmentation, de près de 11 %, après celle de 8 % en 2023.
Il y a eu, selon la Banque de France, 134 803 dépôts de dossiers de surendettement en 2024, 13 186 de plus qu’en 2023 (+ 10,8 %). Les personnes inscrites au Fichier national des incidents de remboursement de crédits aux particuliers (FICP) au titre du surendettement étaient 574 000 fin 2024. Dans une enquête typologique sur le surendettement des ménages en 2024, l’institution souligne que « cette progression récente résulte principalement d’un effet retardé de l’inflation sur le budget des ménages les plus fragiles financièrement ». Elle précise aussi que « le nombre de dépôts en 2024 demeure toutefois sensiblement inférieur à celui de la période prépandémique (- 6 % par rapport à 2019) et très en-deçà du niveau de dix ans auparavant (- 42 % par rapport à 2014). Cette tendance à la baisse sur le long terme procède surtout d’un encadrement plus strict des conditions de commercialisation des crédits à la consommation, d’une diminution du chômage sur cette période et d’une procédure de traitement des dossiers plus efficace ». Toujours selon la Banque de France, il y a trois grands types de situation conduisant au surendettement : « des ménages confrontés à plusieurs fragilités structurelles : individuelles, familiales, sociales et économiques » ; « des ménages aux ressources limitées qui, sans forcément se trouver en situation de pauvreté, voient l’équilibre de leur budget remis en cause par des événements imprévus, qui peuvent se cumuler » comme la perte d’emploi, une séparation ou des problèmes de santé ; et « des ménages aux comportements budgétaires imprudents ou qui maîtrisent insuffisamment leur consommation ».
4,5 milliards de dettes

Les employés et les ouvriers sont largement surreprésentés : 31 % pour les premiers (contre 15 % de la population française) et 22 % pour les seconds (11 % de la population). Il est précisé dans l’enquête de la Banque de France que « les entrepreneurs individuels (artisans, commerçants, chefs d’entreprise et autres travailleurs indépendants) sont devenus éligibles à la procédure de traitement de surendettement des particuliers pour leurs dettes personnelles en 2022. En 2024, en métropole, les commissions du surendettement (…) ont reçu 743 dossiers dans ce nouveau cadre législatif, après 311 en 2023 ». Les personnes dont les comptes ont viré au rouge vif l’année dernière ont accumulé 4,5 milliards d’euros de dettes, en progression de 6,2 % sur un an mais en baisse de 22 % par rapport à 2019 et en recul de 46 % par rapport à 2014. Hors immobilier, l’endettement médian s’établit à 17 447 euros et l’endettement moyen à 30 315 euros. Les solutions apportées par les commissions de surendettement métropolitaines à ces dossiers ont donné lieu dans 43 % des cas « en des mesures imposées de remboursement partiel ou total, entre mesures pérennes -réaménagement de dettes avec échéancier de règlement- et moratoires ». Dans près de 35 % des cas, elles se sont traduites par une « décision de rétablissement personnel » au terme de laquelle les ménages concernés ont vu leurs dettes intégralement effacées et 15,8 % ont donné lieu à « des décisions d’irrecevabilité, de clôture et de déchéance de procédure ».
Jean-Michel CHEVALIER et Sébastien GUINÉ
Les obligations des prêteurs
L’organisme prêteur doit examiner avec soin la situation de l’emprunteur pour déterminer ses capacités de remboursement. Il doit aussi informer, avant la signature du contrat, des caractéristiques du crédit et des risques liés à un défaut de remboursement. Le taux du crédit ne doit pas dépasser le taux de l’usure, qui est le taux maximal légal autorisé. Il consulte aussi les fichiers de la Banque de France pour vérifier si le client n’est pas inscrit pour plusieurs incidents de paiements (abus de découvert, crédit non remboursé...). En cas de rachat de crédits, le prêteur doit indiquer si le nouveau crédit regroupant les anciens crée une dette plus élevée ou plus longue que ceux regroupés. Ces informations doivent être données par écrit.
En cas de séparation...
Lorsqu’un couple prend un crédit à la consommation ou un crédit immobilier signé par ses deux membres, la banque peut réclamer à chacun le paiement des mensualités du prêt. Chaque membre du couple est donc garant du prêt (il s’agit de la garantie co-emprunteur). Le divorce ou la séparation du couple ne met pas fin au contrat de prêt, ni à la garantie co-emprunteur. Les signataires peuvent obtenir l’annulation de la garantie co-emprunteur soit en remboursant par anticipation le crédit soit en demandant à la banque la désolidarisation de l’un des co-emprunteurs (si la banque accepte, l’autre co-emprunteur reste seul à rembourser le crédit et à en être le garant). Soit encore en demandant à la banque d’annuler la garantie d’un des co-emprunteurs en la remplaçant par un nouveau garant ou une garantie supplémentaire (hypothèque, caution...).
Le profil des surendettés
– 83 % sont des personnes âgées de 25 à 64 ans (qui représentent 62 % de la population)
– 59 % des personnes surendettées vivent sous le seuil de pauvreté (contre 14 % de l’ensemble de la population)
– 55 % sont des femmes (52 % de la population)
– 52 % sont des personnes seules (38 % de la population)
– 28 % sont en CDI
– 25 % sont à la recherche d’un emploi
(Source : Banque de France)