Un coûteux remède de (...)

Un coûteux remède de cheval

"Une exigence inabordable". C’est la réponse d’un flegme tout britannique du ministre de la Santé d’outre-Manche face à la demande de revalorisation de 19,2% de salaire des infirmières. Elles se sont mises en grève pour la première fois depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, avec quelques bonnes raisons pour cela : leur pouvoir d’achat a perdu 20% ces douze dernières années. Dans le sillage des blouses blanches, les postiers, les cheminots et même les policiers aux frontières appuient sur la pédale de débrayage. Et dans le royaume de Charles III, la liste des mécontents continue chaque jour de s’allonger.
Douze années pendant lesquelles les conservateurs au pouvoir (David Cameron, responsable du Brexit, puis Theresa May suivie par l’incroyable Boris Johnson, et Liz Truss) se sont assis sur les diverses revendications sociales. Pendant son court passage au 10, la météoritique et très droitière Truss a fait adopter un "mini budget" tellement irréaliste qu’il a provoqué, à peine arrivée, son départ précipité. C’est donc un difficile héritage pour Rishi Sunak, le nouveau Prime minister, dont les Britanniques attendent des miracles pour sortir de l’ornière.
Comme dans un miroir, les problèmes de nos amis Grands-Bretons se reflètent dans la vie politique française. Si, chez nous, la crise semble frapper moins durement, pour le moment, avec une inflation mieux contenue, elle véhicule les mêmes attentes sur le pouvoir d’achat. Avec la réforme des retraites et celle de l’indemnisation du chômage entre autres, le calendrier politique des mois à venir ne sera pas de nature à calmer dans l’Hexagone une opinion inquiète. Les factures de l’énergie vont grimper de +15% dès après la nuit de la Saint Sylvestre. Les familles modestes, qui sont déjà "au taquet", se demandent comment elles éviteront de basculer plus bas.
Mais en termes de revendications, les infirmières british jouent cependant petit bras par rapport à des syndicats de médecins libéraux français qui ont appelé à la fermeture des cabinets pour obtenir que les tarifs de base passent de 25 à 50 euros. Comme tout le monde, ils subissent l’inflation et doivent la compenser. Comme toutes les corporations, ils défendent légitimement leurs intérêts. Mais si le bon docteur Braun, ministre de la Santé, appliquait ce "remède" de cheval, il en coûterait 7 milliards de dépenses supplémentaires à la Sécu, et une participation augmentée pour les mutuelles.
Certes, la santé n’a pas de prix, mais tout de même...
Une telle augmentation des honoraires serait sans effet sur les déserts médicaux. Mais il n’en faut pas moins entendre les difficultés des praticiens qui veulent davantage de "temps médical" en se déchargeant de contraintes administratives, par exemple en embauchant des assistantes. Tous ne sont pas sur cette ligne "dure" de fermeture des cabinets, qui paraît même déraisonnable à certains alors que nous sommes face à une triple épidémie Covid-bronchiolite, grippe. Le ministère va t-il jouer sur cette division pour faire passer la pilule ?

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