Un million d'emplois,

Un million d’emplois, version Medef

Emploi- Pas de surprises dans les recettes proposées par le Medef pour créer un million d’emplois en France, mais une ambition de taille. Simplification, déréglementation et allègement des coûts des entreprises constituent le cœur de ces propositions qui remettent en cause les bases du pacte social en France, tel qu’il a été défini à la fin de la deuxième guerre.

« Nous disposons de tous les atouts pour réussir », promet Pierre Gattaz, président du Medef, ce 24 septembre, lors de la conférence de presse de présentation de ses propositions destinées à créer un million d’emplois. Un message qui veut « lancer le débat ». « C’est un appel à un travail important : il s’agit de bâtir un nouveau consensus, qui soit à la fois économique et social », annonce Pierre Gattaz. Malgré la publication par le quotidien économique « Les Echos », quelques jours auparavant, des mesures imaginées par le Medef, c’est toute la direction du syndicat patronal qui a défilé à la tribune pour présenter ses propositions.

Objectif affiché, donc : créer un million d’emplois d’ici cinq ans. Pour cela, « nous devons changer de logique, passer à une logique de création d’emplois par les entreprises, en s’adaptant aux mutations du nouveau monde qui se construit depuis quinze ans », estime Pierre Gattaz, énumérant des changements structurels comme le numérique et le durcissement de la compétition internationale. Le Medef a identifié quatre axes de changement. Tout d’abord, « la nécessaire rénovation de notre modèle économique et social », démarre le patron des patrons qui préconise de mettre l’entreprise au cœur de l’élaboration des règles sociales, dans un cadre général simplifié. Deuxième axe, « il faut tout faire pour diminuer les facteurs qui entravent la compétitivité de nos entreprises », continue Pierre Gattaz. En cause : le coût de la fiscalité, du travail, l’Euro, le financement des entreprises, l’énergie... Troisième point, la nécessaire reprise des investissements, avec un rétablissement d’une fiscalité favorable à la prise de risque et la relance d’investissements publics, dans la construction notamment. Le dernier axe concerne des leviers sectoriels qui pourraient lever des freins spécifiques, dans divers domaines comme le tourisme, la santé ou les services. D’après les estimations du Medef, ces derniers leviers pourraient libérer entre 50 et 100 000 emplois par secteur.

Tout remettre à plat

Fondamentalement, c’est le modèle économique et social dans son ensemble qui doit être rénové, pour le Medef. Jean-François Pillard, vice-président de l’organisation, évoque notamment les domaines de la gestion des compétences, de la protection sociale, du dialogue social et du fonctionnement du marché du travail. En réponse au niveau élevé de chômage, par exemple, le Medef préconise de privilégier les accords d’entreprises et de branches, par rapport à la loi. Quant au système de protection sociale, « il faut amener ces régimes vers l’équilibre », estime Jean-François Pillard. Au chapitre de la compétitivité des entreprises, « le taux de marge est au plus bas depuis 1985 », commence par rappeler Geoffroy Roux de Bezieux, vice-président du Medef, qui détaille les critères jugés déterminants pour améliorer la situation. Premier cité, le coût du travail, pour lequel le syndicat patronal demande une accélération du versement du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) et une pérennisation du dispositif. Le Pacte de responsabilité, lui, est jugé « insuffisant ».

Autre sujet pointé, le coût de la fiscalité. Le Medef propose ici de favoriser, à fiscalité constante, le risque sur la rente et de stopper la « hausse pernicieuse des fiscalités parallèles », explique Geoffroy Roux de Bezieux. En cause, en particulier, la fiscalité des collectivités locales. Dans le domaine de l’énergie, le Medef demande que soit ré-ouverte la question de l’exploitation du gaz de schiste. « Les autres le font », argumente Geoffroy Roux de Bezieux. Evoquant la situation des entreprises exportatrices, le Medef en appelle aussi à la politique monétaire européenne. « On souhaite que l’Eurocontinue à descendre », précise Geoffroy Roux de Bezieux.

Le coût de financement des entreprises, lui, pourrait être diminué, encore par la voie de l’évolution de la fiscalité, dans un sens plus favorable à l’investissement. « Il faut faire en sorte que l’épargne dormante puisse être orientée vers les entreprises », intervient Patrick Bernasconi, vice-président du Medef. Et parmi les autres pistes pour favoriser l’investissement, l’organisation patronale préconise aussi un allègement des règles de prudence imposées au secteur bancaire. Quant à l’investissement public, les collectivités locales sont invitées à déplacer leurs dépenses vers les investissements et non vers les dépenses de fonctionnement. Enjeu : « une des raisons pour lesquelles les investisseurs venaient en France est la qualité extraordinaire des infrastructures. Cet atout formidable est entrain de disparaître », regrette Patrick Bernasconi, qui préconise aussi une accélération de la décentralisation ainsi qu’un recours accru à l’utilisation des PPP, les partenariats publics privés.

Des poches d’emplois sectorielles

Au-delà de ces propositions de réformes globales, plusieurs présidents de fédérations ont ensuite présenté de potentiels leviers sectoriels qui pourraient être actionnés pour créer des emplois. Par exemple, entre 10 et 50 000 postes pourraient être créés dans les industries de la santé, estime Christian Lajoux, président de la Fédération française des industries de santé (FEFIS). Il préconise notamment une meilleure lisibilité des règlements administratifs et un travail sur le rapprochement des ingénieurs et des soignants. Un « chiffre réaliste » dans le domaine du bâtiment fortement utilisateur de main d’œuvre, c’est 150 000 emplois, évalue de son côté la fédération pour le secteur . Mais « il faut un environnement institutionnel adapté. Nous proposons des mesures simples, pragmatiques. Il s’agit de favoriser la construction de logements dans les zones tendues », démarre Jacques Chanut, président de la FFB (Fédération française du bâtiment). Propositions : se concentrer sur marché locatif intermédiaire, répondre aux besoins des primo-accédants. Par ailleurs, « la rénovation énergétique du bâtiment doit rester une priorité, pas seulement dans les discours », pointe Jacques Chanut. Autre piste d’amélioration, la lutte contre la fraude au détachement de travailleurs. Un autre vivier potentiel d’emplois, similaire à celui du bâtiment, réside dans le secteur des services à la personne d’après la fédération pour ces activités « la réduction d’impôt a créé le marché, et en quelques années, il a généré 400 000 emplois. Mais en 2013, on en a détruit 80 000. C’est une aberration », explique Maxime Aiach, président de la Fédération du service au particulier (FESP), qui dénonce une « augmentation significative des coûts », via l’augmentation du taux de TVA et des cotisations sociales. Propositions : diminuer ceux-ci et établir une, « vraie stabilité réglementaire », ajoute Maxime Aiach.

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