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Loi de Financement de la sécurité sociale pour 2016 : quoi de neuf pour les entreprises ? (2/2)

Second volet du panorama des points les plus importants de la loi de Financement de la sécurité sociale pour 2016 pour les entreprises : les mesures relatives aux redressements Urssaf.

- Mise en demeure
Le contenu de la mise en demeure del’Urssaf adressée au cotisant est clarifié. Il devra être précis et motivé.Dans le cadre d’un contrôle Urssaf, selon l’article L 244-2 du Code de la sécurité sociale, la mise en demeure invite l’employeur à régulariser sa situation dans le mois. La Cour de Cassation en a, logiquement, déduit que ce document ne constituait qu’une invitation impérative du débiteur à régulariser sa situation dans le mois, et qui n’était soumise à aucun formalisme particu-lier autre que celui du recommandé avec accusé de réception. Il s’agit toutefois d’un document important puisqu’il fixe le délai de prescription des cotisations (CSS art article L 244-3).
Dans un arrêt dit « Deperne » du 19 mars 1992, la Chambre sociale a décidé que la mise en demeure devait préciser, « à peine de nullité », outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve du préjudice. Les pouvoirs publics ont consacré cette jurisprudence : « l’avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent » (art. R 244-1 CSS). Cet arrêt « Deperne » avait fait naître de nombreux espoirs. Cependant, la jurisprudence s’est refusée de tomber dans l’excès du « formalisme exacerbé ». Ont été ainsi considérées comme valables et permet- tant d’identifier la nature des cotisations, les mentions telles que : « administration collectivités locales » ou « régime général- rappel suite à contrôle » ou encore « régime général-rappel sur contrôle », dès l’instant où les observations sont, elles, claires et explicatives. Il en est de même d’une mise en demeure comportant, en annexe, un tableau explicatif. Egalement, est sans incidence une erreur de chiffrage sur le docu-ment, admise par l’Urssaf, ou la non prise en compte d’un règlement fait par le débiteur. Autrement dit, dès lors que le cotisant a la faculté de connaître le montant et la cause de sa dette, de manière directe ou indirecte, la mise en demeure est valable.

Dans leur rapport « Pour un nouveau mode de relations Urssaf/entreprises », en avril 2015, les députés Bernard Gérard (LR,Nord) et Marc Goua (PS,Maine-et-Loire) avaient ainsi plaidé pour que soit modifié l’imprimé CERFA de mise en demeure, afin de le rendre plus clair et lisible et inséré dans le Code de la sécurité sociale que le contenu la mise en demeure doit obligatoirement être précis et motivé. La loi de finan- cement de la sécurité sociale pour 2016 reprend cette proposition. Un décret en Conseil d’Etat déterminera les conditions que devra respecter la mise en demeure pour être précise et motivée.

Autres mesures
Prévoyance collective : redressements pour mauvaise application de la législation.
Pour tous les contrôles engagés à partir du 1er janvier 2016, les redressements opérés en matière de protection sociale complémentaire seront modulés selon à la gravité du manquement, sous certaines conditions.

Lorsque le manquement à l’origine du redres- sement révèle une méconnaissance d’une particulière gravité des règles liées au ca- ractère obligatoire et collectif des systèmes de garanties de protection sociale complé- mentaire, l’agent en charge du contrôle doit en informer l’employeur, en justifiant sa décision dans le cadre de la procédure contradictoire préalable à la fin du contrôle. Le montant du redressement ainsi établi ne peut être supérieur à celui résultant de l’assujettissement de l’ensemble des contributions de l’employeur au financement du régime.

Hormis cette situation, le principe est que le redressement sera réduit aux sommes faisant défaut ou excédant les contributions nécessaires pour que la couverture revête un caractère collectif et obligatoire. Et ce, dans les conditions suivantes :

. une fois et demie ces sommes, lorsque le redressement repose sur l’absence de pro- duction d’une demande de dispense ou de tout autre document ou justificatif néces- saire à l’appréciation du caractère collectif et obligatoire ;

. trois fois ces sommes, dans les autres cas, et lorsque le manquement ne révèle pas une méconnaissance d’une particulière gravité des règles d’exonération des cotisations.

Ce redressement ne pourra être réduit en cas d’octroi d’avantage personnel, de dis- crimination, lorsque l’irrégularité en cause a déjà fait l’objet d’une observation lors d’un précédent contrôle, dans la limite des cinq années civiles précédant l’année où est engagée le contrôle, d’abus de droit, d’obstacle à contrôle ou de travail dissimulé, au cours des cinq années civiles qui précèdent celle où est initiée le contrôle. En outre, les employeurs ne pourront, dans le cadre de ce redressement réduit, demander aux salariés le remboursement des cotisations salariales dues sur les montants don- nant lieu à redressement. Cette disposition fait également suite aux préconisations du rapport parlementaire précité pour améliorer les relations Urssaf/entreprises.

Pénalité en cas de non-respect des NAO.
Le bénéfice de certains allégements de coti- sations sociales est conditionné à l’obliga- tion pour l’employeur d’engager, chaque année, une négociation sur les salaires effectifs avec les organisations syndicales. Lorsque l’entreprise ne respecte pas cette obligation annuelle, le montant des allége-ments ou exonérations était, jusqu’alors, réduit de 10 % pour l’année en question. Il est désormais supprimé lorsqu’aucune négociation n’a été engagée pendant trois années consécutives (sont notamment concernées par cette mesure : la réduction Fillon ainsi que les exonérations attachées aux implantations en zones rurales ou urbaines).

La loi prévoit désormais, dans ce cas, non plus une diminution des allégements de charge, mais une pénalité financière :

. si aucun manquement à l’obligation de né- gocier n’a été constaté lors d’un précédent contrôle, au cours des six années civiles précédentes, la pénalité est plafonnée à 10 % des exonérations de cotisations perçues par l’entreprise l’année où le manquement a été constaté ;

. si un manquement a été constaté sur cette même période, la pénalité est plafonnée à un montant équivalent à 100 % des exonérations de cotisations perçues par l’en- treprise l’année ou le manquement a été constaté.

Le montant de la pénalité est fixé par la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi), en tenant compte, notamment, des efforts constatés pour ouvrir les négociations, de la situation éco- nomique et financière de l’entreprise, de la gravité du manquement et des circons- tances ayant conduit à ce manquement, dans des conditions qui seront déterminées par décret.

Ces dispositions sont entrées en vigueur ce 1er janvier.

Travail dissimulé : le redressement forfaitaire modifié.
La sanction forfaitaire sera évaluée, pour tout constat de délit de travail dissimulé à compter du 1er janvier 2016, à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass), soit 9 654 euros, en 2016, contre six Smic, auparavant. Cette modification s’applique aux constats de travail dissimulé établis à compter de ce 1er janvier.

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