Zone euro : En sortir ou

Zone euro : En sortir ou pas ?

Depuis la victoire de la gauche radicale en Grèce, le débat fait rage sur l’avenir de la zone Euro et, plus largement, sur celui de l’Europe. En France, il n’est pas exclu que certaines lignes bougent de manière…inattendue. Explications.

25 janvier dernier. C’est l’euphorie à Athènes. La parti Syriza du jeune Alexis Tsipras remporte une nette victoire et arrive au pouvoir. Son programme est simple : en finir avec l’austérité imposée par les créanciers internationaux de la Grèce et imposer un nouveau rapport de forces avec l’Union Européenne pour renégocier la dette.

Un mois et demi après, la tension est toujours très forte entre le gouvernement grec et l’Eurogroupe qui, sous la pression des Allemands, n’est pas disposé à faire des concessions sans un engagement d’Athènes sur un calendrier précis de réformes. D’ores et déjà, devant l’intransigeance de ses partenaires européens, le Premier ministre grec a dû remiser l’une de ses promesses mirobolantes de campagne, l’effacement total de la dette grecque.

Mais si la négociation n’aboutissait finalement pas, que se passerait-il ?

C’est là que le scénario d’une sortie de la Grèce de la zone Euro revient sur le tapis.

Et la question n’agite pas seulement nos amis grecs. Elle fait débat en Espagne à quelques semaines des élections législatives. En effet, le mouvement d’extrême gauche, Podemos, le cousin grec de Syriza, a fait une entrée spectaculaire dans le jeu politique espagnol, bousculant aussi bien les socialistes que les conservateurs.
En France également, la victoire de Tsipras a donné des couleurs aux partisans d’une remise en cause radicale de la politique monétaire en Europe, de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen.

Un enthousiasme qui mérite cependant d’être tempéré. Car, au-delà des propos de campagnes et des diatribes d’estrades, il n’est pas dit que le discours anti-euro soit porteur sur un plan purement politique et électoral.

Saut vers l’inconnu

Alexis Tsipras lui-même avait flairé le danger puisque, quelques jours avant son élection, il s’était bien gardé d’agiter le spectre de la sortie de la Grèce de la zone Euro.
Voyez aussi comment Marine Le Pen adoucit elle-même sa position sur le sujet. La Présidente du FN propose, depuis plusieurs mois maintenant, l’organisation d’un référendum sur la sortie de la France de l’Europe si elle était élue en 2017 à la Présidence de la République. En clair, son éventuelle accession à l’Elysée ne vaudrait pas quitus pour rompre unilatéralement avec l’Union Européenne.
Il n’est pas exclu que Marine Le Pen aille plus loin dans les deux années qui nous séparent de la présidentielle. Bien sûr, elle restera, pour assurer le spectacle, dans l’épure d’un discours virulent anti-européen pour surfer sur les mécontentements qui montent contre les technocrates de Bruxelles.

Mais elle sait bien qu’une partie importante de l’électorat de droite (professions libérales, retraités aisés, chefs d’entreprises…) craint les conséquences du saut vers l’inconnu que représenteraient la sortie de la zone euro et le retour au franc.
Une telle perspective ne manque pas d’effaroucher des électeurs qui sont pourtant tentés par le vote FN pour d’autres raisons. Un dernier verrou que Marine Le Pen pourrait bien s’employer à faire sauter..

Le jour où…

Alain Minc, naguère visiteur du soir de Nicolas Sarkozy à l’Elysée et aujourd’hui soutien d’Alain Juppé, le confirme dans Valeurs Actuelles (n° du 12 mars 2015) : « Aujourd’hui, la partie la plus à droite de l’UMP est prête, sans en être consciente, à devenir le supplétif du FN dès lors que celui-ci abandonnerait sa divagation de sortie de l’euro (…). Je pense que Marine Le Pen, aussi longtemps qu’elle refusera l’euro, ne peut arriver au pouvoir que par effraction. Le jour où elle acceptera l’euro, cela changera ».
La patronne du FN sait aussi qu’il n’est pas possible, en France, d’accéder à l’Elysée sans entrer « dans l’univers de l’économie réelle », selon l’expression du même Alain Minc. Et « l’univers de l’économie réelle », c’est l’Europe et la monnaie unique, malgré tout. Les euro-sceptiques Séguin, Chevènement, Villiers et autres Mélenchon ne sont jamais parvenus à incarner une alternative crédible même s’ils ont pu exercer une influence notable à un moment donné.

Cela n’empêche pas les Français d’être très critiques sur l’Europe telle qu’elle fonctionne. L’Europe qui impose des normes tatillonnes parfois aux limites de l’absurde agace. L’Europe qui s’ouvre à tous les vents inquiète.
Référendum en Grande-Bretagne

Par exemple, l’élargissement aux pays de l’Est, qui aurait mérité d’être soumis à l’approbation des peuples, s’est fait dans la précipitation la plus totale. Résultat : c’est le syndrome du plombier polonais qui, entre autres explications, a plombé le référendum sur la Constitution européenne en 2005.

Reste que, pour l’instant en tous cas, l’euroscepticisme ne fait pas une politique. Même en Grande-Bretagne, on hésite à larguer les amarres. Le Premier Ministre, David Cameron, a promis un référendum sur la sortie de l’Europe d’ici 2017 s’il était réélu en mai prochain au 10 Downing Street. Histoire de lâcher un peu de lest pour faire plaisir à des indépendantistes bien placés dans les sondages. Rien ne dit toutefois que cette consultation aura effectivement bien lieu dans les deux années qui viennent...

Au total, disons-le : l’Europe, il est plus facile d’y entrer que d’en sortir. Et ce n’est pas le moindre des acquis de ces soixante années de construction européenne.

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