Alpes-Maritimes : moral

Alpes-Maritimes : moral en berne pour le BTP

La Fédération du BTP des Alpes-Maritimes a présenté la situation
et les perspectives de ce secteur d’activité particulièrement
important dans notre département. Les chiffres sont alarmants
et les professionnels du BTP, d’un naturel habituellement plutôt
optimiste, ne sont pas rassurants sur la santé économique de
cette branche d’activité.

Laurent Trocmé, Président de la Fédération du BTP 06 relève tout
d’abord la perte de 900 emplois, hors intérim, en matière de BTP
dans les Alpes-Maritimes. Cela s’ajoute aux 500 emplois déjà perdus
en 2012. Ce chiffre est à mettre en parallèle avec les 33.000 emplois
perdus au plan national dans le BTP (25.000 pour le bâtiment et
8.000 pour les travaux publics).

Le logement neuf privé poursuit sa chute. En effet, l’alourdissement de
la fiscalité immobilière et l’échec relatif du dispositif Duflot ont été des
signes négatifs envoyés par le gouvernement aux bailleurs privés, rappelle
Laurent Trocmé. A cela s’ajoute la rareté du foncier sur la Côte
d’Azur et la fréquence des recours contre les autorisations administratives,
qui sont autant de raisons à un ralentissement du logement neuf.

De plus, le PTZ+ (prêt à taux zéro) n’a pas atteint ses objectifs. Il visait
les primo-accédants, or les critères d’éligibilité du plafond de revenu
ou de la qualité du logement et les conditions restrictives permettant
de bénéficier d’un différé de remboursement des échéances ont fortement
diminué l’attrait de ce dispositif. Et les autorisations bancaires
de taux d’endettement ont fait blocage au PTZ+, selon le Président de
la Fédération du BTP 06.

De surcroît, les travaux dans les logements neufs ont diminué de 35 %
entre septembre 2012 et septembre 2013 dans les Alpes-Maritimes,
pendant que les mises en vente de logements neufs privés accusent un
recul de 14 % sur cette même période.

Par ailleurs, la Fédération du BTP 06 soulève le problème de la visibilité
sur les travaux publics et routiers. Il est certes habituel que de
grands travaux ne soient pas lancés pendant les quelques mois qui
précèdent et suivent des élections locales, le temps que période électorale
et mise en place de la nouvelle équipe municipale se passe.
Cependant, le rebond espéré lié au cycle pré-électoral de 2013 n’a
pas eu lieu et les entreprises de travaux publics ont dû « faire le dos
rond ».

Laurent Trocmé a aussi relevé des pratiques de concurrence déloyale
de la part de certaines entreprises du BTP. L’auto-entreprenariat, qui
a des conditions fiscales plus intéressantes, pénalise les artisans qui
ont un statut d’entrepreneur classique. Surtout, certaines entreprises
étrangères abusent du système du « détachement » de leurs salariés
et ne respectent pas la législation du travail française. La Fédération
Française du Bâtiment s’est faite force de propositions pour faire
évoluer la législation. La proposition de loi portant adaptation de la
directive européenne en France sera en première lecture à l’Assemblée
Nationale mi-février, l’idée principale étant de responsabiliser
l’ensemble la chaîne des décideurs et les maîtres d’ouvrage. Cependant
le point noir de cette proposition de loi est l’absence de contrôle
des entreprises étrangères. Comment, dans ces conditions, vérifier
que les charges et salaires sont effectivement versés ?

Dans les points positifs, l’auto-liquidation de la TVA, instituée depuis
le 1er janvier 2014, devient la règle dans tous les cas de sous-traitance
de BTP. Cela signifie que l’entreprise principale va « liquider »
la TVA de ses sous-traitants. Cela évitera les abus de certains soustraitants
et obligera l’entreprise principale à jouer un rôle de « contrôleur
des impôts » en quelque sorte. Pour le prévisionnel de l’année
2014, la Fédération du BTP 06 craint un nouveau recul d’activité.
L’un des espoirs réside dans l’annonce du Président de la République
de limiter à 5 mois le délai maximum préconisé pour l’autorisation du
permis de construire. Dans l’ancien, la hausse du taux de TVA de 7 à
10 % est inquiétante, surtout quant au travail au noir que ça pourrait
provoquer.

Des évolutions font cependant naître un certain optimisme dans la
profession : l’abattement exceptionnel de 25 % accordé jusqu’au 31
août 2014 sur les plus-values immobilières et le taux de TVA à 5,5 %
pour travaux de d’amélioration de la qualité énergétique.

Les grands chantiers d’infrastructures sont cependant au point mort,
comme par exemple la LGV. Le démarrage du tunnel du tramway
aura normalement lieu en juin. La situation financière des collectivités
territoriales est alarmante, ce qui fait craindre une diminution
des investissements en 2014. Au mieux, le redémarrage des grands
travaux aura lieu au dernier trimestre 2014, quelques mois après les
élections municipales.

Enfin, la problématique de gestion des déblais inertes est préoccupante,
car, hormis le site provisoire de La Roque à Roquefort les Pins
surexploité, les camions de déblais sont vidés dans le département du
Var. Le bilan carbone est donc catastrophique et le déficit de solution,
si rien n’est fait, est estimé à l’horizon 2020 pour les Alpes-Maritimes
à environ 470.000 tonnes à 1.300.000 tonnes/an.

En conclusion, l’activité BTP devrait reculer de 1 à 2 % en 2014 dans
le département et perdre autour de 500 emplois, surtout dans le secteur
des travaux publics et routiers.

Les 5.000 entreprises du BTP des Alpes-Maritimes et leurs 23.600
salariés auront bien du mal à relever le défi de l’emploi en 2014,
sans la mise en place de dispositifs législatifs adaptés.

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