Candidature au Nobel

Candidature au Nobel

Tout le monde attendait avec impatience l’attribution du prix d’Economie par le jury de Stockholm, un Nobel Canada Dry dans une science qui n’en est pas une, mais qui rend son lauréat plus célèbre que n’importe quel théoricien de la Physique, ou n’importe quel génie des Mathématiques – vu que cette discipline a été dynamitée par Nobel de la liste des sciences remarquables. Par rancœur, dit la légende, à l’égard de l’un de ses jeunes contemporains, matheux talentueux et beau garçon, qui lui aurait soufflé la blonde explosive qu’il convoitait. Entre nous, Alfred, c’est un peu mesquin. En tout cas, le Prix a été décerné cette année à trois économistes, deux Américains et un Gréco-britannique, pour leurs travaux relatifs à « l’adéquation entre l’offre et la demande sur le marché du travail ». Des préoccupations de grande actualité, eu égard à la montée du chômage. Et des travaux qui ne s’achèveront probablement jamais : depuis que les économistes s’intéressent au « marché du travail », il n’y a jamais eu « adéquation », c’est-à-dire équivalence rigoureuse, entre l’offre et la demande de postes, même en situation qualifiée de plein-emploi.

En quoi les travaux des nominés sont-ils novateurs ? Selon le Jury, ces économistes ont « démontré » que « plus les allocations de chômage sont importantes, plus le taux de chômage est élevé et la durée de recherche est longue ». Une véritable bombe, non ? On n’aurait jamais imaginé que lorsqu’ils sont confortablement indemnisés, et pendant un bon moment, les chômeurs soient moins pressés de retrouver du travail. Ça nous en bouche un coin, vraiment. Et cette découverte, marquée du sceau de la science, offre enfin aux gouvernements la méthode imparable pour éradiquer le chômage : supprimer les allocations. Car ce sont elles, voyez-vous, qui perturbent la « loi de l’offre et de la demande », laquelle constitue l’alpha et l’oméga de la technologie économique, bien qu’elle soit constamment démentie par les faits. Sauf sur le marché de la théorie économique, où l’offre est toujours en adéquation avec la demande politique. Qu’il nous soit donc permis de postuler humblement au prochain Nobel, par transposition du principe keynésien de la « préférence pour la liquidité » en un nouveau paradigme, que l’on appellera « préférence pour la dignité », ainsi libellé : lorsque le marché offre un travail inintéressant et mal payé à un chômeur, ce dernier préfère glander avec ses allocations, fussent-elles modestes.

La recette du jour

La tambouille d’Alfred

Vos enfants renâclent devant les épinards, les choux de Bruxelles et le foie de morue que vous infligez à leur bonne santé. Le climat familial est explosif. Apostasiez vos évangiles diététiques et servez à chaque repas un jambon-frites suivi d’une mousse au chocolat. Puis postulez au prix Nobel de la Paix.

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