La crise du mâle américain

La crise du mâle américain

Les premiers résultats du dernier recensement américain viennent d’être publiés. Le Wall Street Journal qui, comme son nom l’indique, s’intéresse au business, y a relevé une statistique significative de la crise : les jeunes gens hésitent à se marier. Car « se marier coûte cher », avouent la plupart d’entre eux, qui se disent incertains de la pérennité de leur emploi – lorsqu’ils en ont un. L’histoire ne dit pas ce qui, pour les indécis de l’appariement, est supposé « coûter cher » : la cérémonie de mariage elle-même ? la vie commune ? la progéniture éventuelle ? la perspective du divorce ? Ce dernier procède en effet du mythe de l’american way of life : une vie exemplaire doit comporter un mariage princier et un divorce ruineux. Au moins un de chaque, ce qui assure à la corporation des traiteurs de luxe, et à celle des avocats, un gisement d’affaires inépuisable. Voilà une autre façon de mesurer l’impact de la crise : la production de petits-fours et celle des « motions » de divorce enregistrées par la Cour.

Et le WSJ de citer les chiffres : l’année dernière, 46.3% des jeunes de 25-34 ans n’ont jamais été mariés, contre 44.9% qui le sont ou l’ont été. C’est la première fois que le phénomène se produit depuis plus de cent ans. Bon, se dit-on, c’est en effet un signe de la montée de l’inquiétude face à l’avenir. Mais l’inquiétude grandit quand on fait le compte : 46.3 plus 44.9 font 91.2. Il manque 8.8% de la classe d’âge. Où sont-ils passés ? On suppose qu’ils représentent la fraction qui a choisi de vivre sous le statut du concubinage, considéré comme peccamineux chez l’Oncle Sam. Une fraction somme toute bien modeste, par comparaison aux pratiques licencieuses du Vieux Continent. De quoi accréditer la thèse avancée par le WSJ : le nombre de mariages décroît avec la montée en puissance du travail féminin, et surtout avec l’augmentation spectaculaire du ratio de femmes diplômées (elles sont désormais plus nombreuses que les hommes). Il y a donc deux explications possibles. La première, d’ordre économique : la carrière d’une belle blonde yankee ne passe plus par la conquête d’un mari fortuné, à dépiauter dans un habile divorce. La seconde, d’ordre culturel : avec un niveau d’instruction convenable, la femme américaine comprend que le mâle yankee ne vaut pas une thune. L’image du cow-boy texan et celle du banquier de Wall Street en prennent un coup. Au moins échappera-t-on à cet aspect de la crise : voilà longtemps que les Européennes ne se font plus d’illusions sur les qualités de leurs compagnons…

La recette du jour

Dinde à l’américaine

Vous avez une fille et son avenir vous préoccupe légitimement. Maintenez-la dans une ignorance crasse à l’exception de l’apprentissage de l’anglais. Puis mariez-la à un éleveur texan ou à un banquier new-yorkais. Avec le pactole de son divorce, vous en ferez une dinde dorée à l’or fin.

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