France, reine du bien-êtr

France, reine du bien-être

De quoi se plaint le peuple ? Les Français sont décidément des râleurs impénitents, des insatisfaits pathologiques qui voient systématiquement le verre à moitié vide. La preuve vient à nouveau d’en être apportée par une récente étude de l’OCDE : le bien-être hexagonal s’est accru depuis le début de la crise, figurez-vous, alors qu’il a régressé dans la majorité des grands pays. Il est ici question du Français standard, cet individu improbable qui résulte de la moyenne gaussienne des observations. Par exemple, le revenu disponible des ménages au augmenté pendant la période de référence ; mais les inégalités se sont fortement accrues – nettement plus que partout ailleurs. La moyenne s’améliore, donc, mais il y a davantage de monde en-dessous. Même chose pour l’emploi, qui est resté à-peu-près stable, mais le chômage de longue durée a prospéré. Il n’empêche qu’un tiers de nos concitoyens se déclarent mécontents de leur environnement au travail, ce qui fait d’eux les plus grincheux du salariat européen. Quant à l’égalité des sexes, on repassera : l’écart des salaires entre hommes et femmes s’est encore accru. Et ces dernières « se sentent plus en insécurité lorsqu’elles sortent seules le soir ». Voilà ce qu’il en coûte, mesdames, d’obliger vos maris à faire le ménage pendant vos virées nocturnes – ceci étant noté pour s’attirer l’affection des féministes. En tout cas, la crise ayant moins affecté les Français, ces derniers se montreraient moins solidaires et plus négligents en matière de bénévolat.

Sommes-nous devenus plus égoïstes ? Apparemment, les statistiques viennent contredire les allégations de l’OCDE. Pour preuve, la rémunération moyenne des patrons du CAC 40 a baissé, pour s’établir au-dessous du niveau prolétarien de 4 millions d’euros annuels. C’est dire le sacrifice qu’ils ont consenti pour compatir à la misère des temps. Et le pékin contribue également : il y aurait à ce jour 1 million de souscripteurs aux fonds d’« épargne solidaire » destinés à financer des projets « éthiques », en contrepartie d’une moindre rémunération de l’épargnant. Bon, reconnaissons quand même que le recrutement de ces généreux donateurs se fait essentiellement au travers de l’épargne salariale, c’est-à-dire à l’insu du plein gré des intéressés. Ce qui tend à démontrer que dans notre pays, la solidarité ne se manifeste spontanément que si elle est contrainte. Voilà qui nous promet l’avènement de nouveaux instruments solidaires dans la boîte à outils de Bercy, pourtant déjà bien équipée. Notre bien-être légendaire pourrait bien finir par en pâtir.

La recette du jour

Statistiques et paix sociale

Vous êtes chef d’entreprise et affligé par l’état d’esprit de vos salariés : un tiers couve une dépression, un autre tiers fait semblant d’être heureux par crainte de se faire virer, et le dernier tiers pousse les deux autres à la démission pour mériter une promotion. L’enfer. Placardez partout l’étude sur le bien-être de l’OCDE : personne n’y croira, mais ça calmera le jeu.

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