L'argent au bourrier

L’argent au bourrier

Si les événements japonais n’étaient aussi dramatiques, et ne menaçaient de tourner au tragique, on pourrait se gausser des réactions qu’ils provoquent sur ce qu’il est convenu d’appeler « les marchés ». Et leurs acteurs, bien entendu. Déjà, des multinationales éminentes surfent sur la catastrophe : les unes en promettant de reverser aux sinistrés une fraction de leurs prix de vente ; les autres en procédant en fanfare à des distributions gratuites de leurs produits. Sans se montrer exagérément suspicieux, on ne parvient pas à croire sincère ce prurit de compassion, de la part d’organismes qui se distinguent ordinairement par leur comportement barbare à l’égard de l’espèce. Il semble plutôt que leur élan de générosité ait été scrupuleusement calibré par la direction financière et celle du marketing : un « plan média » peu coûteux et susceptible de liquider les surplus dans des conditions fiscales avantageuses, en ces temps d’activité mollassonne.

De la même façon, les investisseurs donnent l’image de la fourmilière qui a reçu un coup de pied : une débandade hystérique. Les commentateurs nous expliquent que les gestionnaires abandonnent les titres compromis par le risque d’une chute de l’activité et qu’ils se reportent sur les « valeurs sûres ». Et que voit-on ? Des spéculateurs qui vendent leurs positions en or et en pétrole pour couvrir leurs marges et éviter de se faire siphonner ; qui se reportent sur les obligations et les monnaies réputées « fortes ». Comme le franc suisse – déjà hors de prix – et… le yen japonais, ce qui ne manquera pas de surprendre : le pays est déjà le plus endetté du monde et le cataclysme présent va l’accabler de nouvelles dettes. La crise en cours avait démontré que les créances, même souveraines, n’avaient plus qu’une valeur d’estime et que les monnaies, même les plus usitées, étaient toutes réduites à la roupie de sansonnet. On assiste ainsi à une transformation de la loi de Gresham, selon laquelle la mauvaise monnaie chasse la bonne. Désormais, la monnaie pourrie chasse la mauvaise. En d’autres termes, les investisseurs font les poubelles. Vous ne sentez rien ?

La recette du jour

Epargne en compost

La surexploitation de votre potager l’a rendu désertique. Ne désespérez pas. Ajoutez à vos déchets alimentaires le solde de vos comptes-courants, comptes-titres et autres comptes d’épargne. Ajoutez du purin pour masquer les mauvaises odeurs et laissez patiemment se décomposer. Un jour ou l’autre, vous obtiendrez un peu de compost permettant de cultiver une bolée de blé.

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