La revanche des bactéries

La revanche des bactéries

Ah, les antibiotiques ! L’espèce humaine doit beaucoup à Alexander Fleming, pour avoir découvert – fortuitement – la pénicilline. Une avancée remarquable que Sir Alexander doit à sa négligence coupable : pour avoir oublié de nettoyer une boîte de cultures bactériennes qui traînait sur sa paillasse, ce qui lui vaudrait aujourd’hui de se faire virer de son labo, il allait ouvrir la voie à des thérapies suffisamment efficaces pour améliorer l’espérance de vie humaine d’une bonne dizaine d’années. Pendant que son homonyme Ian Fleming imaginait James Bond, l’Agent pathogène 007 qui allait méchamment écourter la longévité des ennemis de Sa Très Gracieuse Majesté. Bref, les antibiotiques ont un pouvoir thérapeutique tellement puissant qu’on les a mis à toutes les sauces, si l’on ose dire. Ils auraient fait l’objet d’une prescription excessive, même en l’absence d’ordonnance du médecin : nombre d’animaux d’élevage sont gavés d’antibiotiques, délivrés à titre préventif. Si bien que le pékin moyen en ingère régulièrement à l’insu de son plein gré. Il en résulte que les bactéries malignes, sans avoir lu un traitre mot des œuvres de Darwin, se sont rapidement adaptées à ce bombardement permanent. Et sont devenues résistantes aux traitements qui désintégraient leurs ancêtres.

En foi de quoi l’OMS vient-elle de lancer un cri d’alarme : cette résistance accrue promet de rendre potentiellement mortelles des affections considérées jusqu’à ce jour comme relativement bénignes. Un constat qui justifierait, de la part de l’industrie pharmaceutique, des investissements massifs dans la recherche, afin de se préparer à l’« ère post-antibiotique ». Au lieu de cela, il semblerait que les firmes préfèreraient encourager les praticiens à prescrire leurs produits traditionnels, très rémunérateurs faute d’être toujours efficaces. Voilà ce qu’il en coûte d’imposer aux chercheurs une hygiène irréprochable sur leurs paillasses : le hasard, qui est gratuit, ne contribue plus aux découvertes médicales. Il faut maintenant allonger des milliards sans aucune garantie de succès : les grandes avancées de la science deviennent résistantes à l’argent. C’est dire si la situation est préoccupante. Il en va de même dans la vie publique. Jusqu’à une date récente, la langue de bois suffisait à maintenir les populations dans une ignorance bienfaisante de la réalité. Puis la propagande a pris le dessus, et les doses se sont intensifiées. On en est maintenant arrivé au mensonge délibéré dans la trame du discours public. Sans grand succès, apparemment, car l’épidémie de défiance se propage en proportion directe de l’énormité des calembredaines officielles. Vivement que les nègres de nos éminences renoncent à faire le ménage sur leurs paillasses : ils pourraient alors découvrir, par hasard, le germe de la sincérité.

La recette du jour

Cure de désintox

Vous êtes légitiment soucieux de votre santé et vous faites confiance à la science médicale. Vous avez raison : votre corps a déjà stocké les médicaments destinés à combattre des maladies que vous n’aurez jamais. Pour éliminer les antibiotiques que vous avez ingérés à votre corps défendant, faites-vous inoculer la turista, la peste et le choléra. Vous vous sentirez mieux.

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