Le test du portefeuille

Le test du portefeuille

L’honnêteté relève-t-elle de l’inné ou de l’acquis ? Les esprits chagrins penseront que pour être aussi rare, cette disposition ne peut pas être inscrite dans les gènes de l’espèce humaine, sauf à être considérée comme une tare – heureusement non transmissible. Les tenants de l’acquis jugeront donc que le contexte culturel joue un grand rôle dans le comportement, et ils n’ont probablement pas tort. En témoigne l’expérience récente du Reader’s Digest, qui vient apporter une contribution éclairante à la question. Bien qu’au cas d’espèce, le test fasse davantage appel au sens civique qu’à l’honnêteté proprement dite. Voici de quoi il s’agit : les expérimentateurs ont « perdu » leur portefeuille dans plusieurs grandes villes du monde, et ont mesuré le nombre de fois où il a été « retrouvé » (il contenait toutes des informations utiles, outre quelques billets de banque). Les résultats offrent une grande diversité : presque personne ne profite de l’aubaine à Helsinki (11 retours sur 12) ou à Bombay (9/12) ; Les New-Yorkais et les Budapestois sont plutôt cool (8/12) ; Moscovites et Amstellodamiens plutôt bienveillants (7/12). Mais mieux vaut éviter de perdre son portefeuille à Rio, à Bucarest ou à Zurich (4/12 – voilà qui écorne au passage le légendaire sens civique des Suisses). Et il est illusoire de le récupérer à Madrid (2/12) ou à Lisbonne (1/12). Mais il faut admettre que dans ces deux pays, nécessité fait loi : la plupart des autochtones ont la bourse plate.

Vous vous demandez évidemment ce qu’il en est de Paris. Désolé de vous décevoir, mais la capitale française ne faisait pas partie de l’échantillon. Le motif le plus plausible de cette absence est le suivant : si vous apportez un portefeuille au commissariat en prétextant l’avoir trouvé, vous êtes immédiatement suspect d’appartenir à un réseau de pickpockets roumains. Par les temps qui courent, c’est aussi périlleux que de perdre un compte bancaire à Zurich. Si donc vous paumez votre morlingue à Paris, jamais vous ne le retrouverez. Ce n’est pas qu’on vous l’aura chouravé ; mais personne ne se hasardera à le ramasser. Trop dangereux. Le principe de précaution vaut aussi pour le Gouvernement. Voyez par exemple la bronca que soulève la réforme des rythmes scolaires. Parmi ceux qui l’ont déjà adoptée, on cherche vainement les enfants, les parents, les enseignants ou les élus locaux qui en soient satisfaits. Au point que sa généralisation devient hypothétique, sinon improbable en l’état. Il en résulte que le Ministre de l’Education nationale pourrait bien perdre son maroquin. Et bien que nos représentants politiques soient pétris de sens civique et d’honnêteté, ils seront sans doute peu nombreux à oser le ramasser.

La recette du jour

Portefeuille piégé

Vous déambulez dans les rues de votre ville et vous tombez sur un portefeuille. Ne vous baissez pas : il n’y a que des déconvenues à en attendre. De toute façon, le portefeuille est vide – les Français sont fauchés. Et c’est peut-être un piège de la caméra cachée. Pire encore, il pourrait s’agir d’un portefeuille ministériel : ramenez-le et vous risquez d’hériter de l’Education nationale. On ne peut souhaiter pareille mésaventure à son pire ennemi.

deconnecte