Les étrennes du Conseil

Les étrennes du Conseil constitutionnel

La trêve des confiseurs aura été de courte durée pour les Sages du Conseil constitutionnel et leurs nombreux équipiers. Mais ils ont rendu hier leur copie après avoir été saisis sur la conformité à la Constitution de nombreux articles de la loi de Finances. Les redevables de l’ISF se réjouiront de voir retoqué le dispositif de plafonnement envisagé : les produits de la capitalisation n’améliorent pas les « facultés contributives » des intéressés, lesquels ne disposent pas librement de bénéfices qui seraient soumis à des « aléas » jusqu’au terme du contrat. Ce qui n’est pas tout-à-fait exact, messieurs les Magistrats : les fonds en euros offrent un rendement contractuel minimal. Dont le montant, majoré des participations bénéficiaires, est contractuellement garanti – le fameux « effet de cliquet » que les assureurs mettent en avant. La confusion bienveillante des contrats « en euros » et de ceux libellés en unités de compte réjouira les rentiers parcimonieux, qui capitalisent les bénéfices de leurs contrats au profit de leurs héritiers.

En revanche, les entreprises découvriront que les principes constitutionnels ne sont pas opposables aux personnes morales. En foi de quoi la fameuse taxe à 75%, qui s’appliquera aux très hautes rémunérations versées cette année et l’année prochaine, ne saurait être censurée au titre de son application rétroactive : ce sont en effet les firmes qui paieront l’addition et non les salariés concernés. Heureusement pour les grandes firmes, le Conseil constitutionnel a levé une lourde hypothèque qui pesait sur elles en termes d’« optimisation fiscale » : il ne saurait être question que l’ingénierie spécialisée fasse valider ses schémas sulfureux par l’Administration, avant de les mettre en application. La révolution fiscale n’est donc pas déclenchée et le pékin aurait tort de se montrer morose à cause de l’augmentation des impôts. En réalité, si l’on en croit l’hebdomadaire britannique The Economist, le Français serait affligé d’une disposition naturelle au « bleak chic » - le chic maussade -, une forme culturelle de spleen qu’il aurait héritée de longue date de ses philosophes et de ses écrivains. Premier responsable : Descartes et son « Je doute, donc je suis » - selon la traduction non littérale, mais finalement assez fidèle, du journaliste anglais. On ne s’étonnera pas que les Britanniques se gaussent de l’esprit critique, qui a longtemps valorisé le milieu intellectuel français. Mais on est au regret de constater que cette démarche honorable a été vaincue par la méthode Coué, une autre invention française que les Anglo-saxons ont adoptée et améliorée, avant de la réexporter chez nous. Ce n’est donc pas d’aujourd’hui que nos concitoyens ont le moral dans les chaussettes ; mais désormais, ils ne savent plus pourquoi.

La recette du jour

Traitement anti-spleen

Vous venez de découvrir que si vous êtes cafardeux, c’est à cause du doute cartésien et de l’esprit critique voltairien. Partez illico vous désintoxiquer aux Etats-Unis. Si vous ne parvenez pas à positiver niaisement comme les autochtones, rentrez chez vous avant que le mal ne s’aggrave. Débouchez du champagne et ouvrez Zadig : lisez simplement quelques paroles et vous serez guéri.

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