Paine révolutionne la (...)

Paine révolutionne la Suisse

Les périodes de crise présentent au moins un avantage : elles raniment la réflexion sur les fondamentaux de l’organisation de la société, qui font l’objet de questionnements immémoriaux. Sans avoir jamais reçu de réponse définitive ; mais lorsque la prospérité se propage, même de façon chaotique, de tels sujets sont considérés comme relevant du sexe des anges, et à ce titre abandonnés aux bourreaux des mouches. Et puis voilà que nos temps font apparaître l’évidence d’une répartition très inégalitaire des revenus, laquelle s’accroît à la vitesse de reproduction des drosophiles. Si bien qu’un peu partout dans le monde, la pression monte contre l’attribution de salaires abusifs, ainsi nommées les rémunérations flamboyantes accordées aux grands managers et à leur staff, sur la base d’une logique économique qui échappe au sens commun. On pourra ainsi relever que la Suisse, pourtant peu suspecte de trotskysme militant, a adopté une réglementation visant à encadrer les hauts salaires : au pays de Calvin, l’enrichissement est certes un devoir du paterfamilias. Mais l’enrichissement sans cause est un péché mortel.

Voilà maintenant que les Helvètes sont en passe de franchir une nouvelle étape. En réactivant des thèses qui firent débat lors de la Révolution française, notamment sous l’impulsion de Thomas Paine. Lequel défendit l’idée d’un revenu de base servi à tout citoyen, sur des considérations qui interrogent le contenu du droit de propriété : « Les hommes n’ont pas créé la Terre. C’est la valeur des améliorations uniquement, et non la Terre elle-même, qui doit être la propriété individuelle. Chaque propriétaire doit payer à la communauté un loyer pour le terrain qu’il détient ». La collectivité serait ainsi créditée de sa part légitime sur le bail emphytéotique concédé aux biens d’exploitation. Et la productivité est désormais telle qu’il est possible de servir à chacun un revenu qui l’exonère de l’obligation de se soumettre à un travail pour garantir sa subsistance. Du moins en Suisse. Où une initiative populaire vient de recueillir suffisamment de signatures pour être présentée à la votation. En vue d’instaurer un Revenu de base inconditionnel de 2.500 francs (2.000 euros) pour tout citoyen, permettant ainsi à chacun de ne plus être contraint à « n’importe quelle tâche pour des raisons purement financières ». Le travail choisi. Ou l’oisiveté à vie. Un projet qui rencontre une forte opposition. Non, pas des milieux patronaux, mais des syndicats de travailleurs…

La recette du jour

Travail à la Suisse

Vous êtes fatigué d’être astreint à un travail inintéressant pour un salaire de concierge. Vous pouvez pétitionner afin que l’UE débatte de l’instauration d’un revenu inconditionnel. Mais cette perspective est lointaine. Préparez-vous plutôt à emménager en Suisse : d’ici deux ans, vous pourrez y exercer le métier qui vous plaît. Bénévolement.

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