Vladi et D-Day

Vladi et D-Day

Le calendrier de ce mois de juin, plutôt chargé sur le plan de la politique internationale, donne l’occasion aux chefs d’Etat de fourbir leur arme principale dans la diplomatie contemporaine : la communication. Ainsi nommée la méthode que l’on qualifiait de propagande, aux temps pas si lointains où l’on appelait encore un chat un chat et Rolet un fripon. Voici donc que le président Obama, en généralissime des armées otaniennes, visitait ses divisions européennes de l’espace conquis sur le défunt empire soviétique. Distribuant de larges brassées d’apophtegmes lénifiants et un peu de verroterie en dollars, imprimés pour l’occasion par sa Banque centrale. Ceci avant de rejoindre le G8 moins 1, qui s’est employé à casser du sucre sur le dos de Poutine après le dîner bruxellois. Dans le même temps, le président russe donnait une interview télévisée à des médias français, renvoyant aux Occidentaux la responsabilité des désordres ukrainiens, et rappelant sans détour que la Russie ne saurait accepter l’arsenal étasunien à ses frontières, ni l’abandon de sa souveraineté à une quelconque organisation supranationale. Avec une référence appuyée à la conception gaullienne de l’Etat, ce qui aura fait rosir de plaisir une large part du public français.

Chacun fait donc jouer sa fanfare propagandiste, sans vraiment respecter la lettre de la partition. Vladimir Pozner, un vétéran du journaliste qui a exercé sous les Soviets, puis aux Etats-Unis, puis en Russie postcommuniste – autant dire qu’il connaît bien la musique – résume ainsi la situation dans un entretien éclairant au Temps : « La guerre de l’information n’est pas tournée vers l’extérieur mais vers l’intérieur. Chaque pays compose son propre menu d’informations soigneusement sélectionnées ». C’est ce que l’on appelle la narrative, la version officielle d’une réalité en stuc. Pour autant, le G8 va se trouver reconstitué pour la célébration du 70ème anniversaire du D-Day. Il ne manque pas de piquant de constater que pour la première fois où la Russie est invitée à la cérémonie – reconnaissance tardive de la contribution décisive des Rouges au résultat de la Deuxième guerre -, les Occidentaux sont confrontés à une crise aiguë avec Moscou, la plus grave depuis bien des lustres. Ce sera peut-être l’occasion pour la France de compenser les faiblesses du Quai d’Orsay par son instrument diplomatique majeur : la diplomatie gastronomique. Pas moins de cinq toques réputées officieront au banquet officiel. Les spécialités normandes seront à l’honneur : ce sera donc un déluge de plats à la crème, qui auront, espérons-le, un effet pacificateur.

La recette du jour

Diplomatie à la crème

Vous êtes engagé dans une méchante empoignade avec un concurrent et vos négociateurs ont foiré dans leur mission. Reprenez les choses en main. Conviez votre adversaire à un banquet en compagnie des alliés qui vous ont si mal conseillé. Gavez-les de crème normande et assommez-les d’un vieux calva. S’ils survivent à l’indigestion, au moins seront-ils calmés pour un moment.

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