Raoul Dufy et le miracle

Raoul Dufy et le miracle de l’imagination

Nous avons jusqu’au 28 septembre pour visiter, au musée des Beaux-Arts Jules-Chéret, une belle exposition des œuvres de Raoul Dufy. Elles témoignent de l’extraordinaire créativité du peintre. Au décès de l’artiste, son épouse, feue Eugénie Brisson, fit don de nombreuses toiles à la ville de Nice, un héritage généreux qu’elle accorda à sa commune de naissance. Depuis son ouverture en décembre, cette exposition obtient un franc succès. C’est en effet une remarquable collection qui est accrochée aux cimaises, sortie des réserves de Chéret pour nous illuminer en cette période hivernale.

Pour Dufy, le miracle de l’imagination, du dessin et de la couleur s’est produit le jour où il découvrit l’œuvre de Matisse. Il réalise être alors en présence d’une nouvelle ‘mécanique’ picturale, qui n’a plus rien à voir avec l’impressionnisme. Cette révélation lui donne de nouvelles raisons de peindre. Le musée retrace le cheminement du créateur avec clarté : pas trop d’œuvres présentées, mais suffisamment pour rendre cette exploration passionnante. Et beaucoup sont consacrées à la région.

Dufy est un contemplateur de la lumière méridionale : la mer, les bateaux, le ciel niçois...

Il les a beaucoup fréquentés. Il est si intéressé par l’esthétique du casino de la Jetée-Promenade qu’il a continué à le faire figurer sur ses toiles même après sa démolition pendant la Seconde Guerre. Grand amateur de musique, il célèbre la fée électricité des salles de concert, il peint les festivités. Ses compositions sont libres, audacieuses et joyeuses. Il s’affranchit de la perspective, des volumes, reconstruit les paysages en superposant les motifs. Il laisse parler son enthousiasme. Il est aussi portraitiste et peintre d’intérieurs vivement éclairés : il reprend les idées de Matisse en représentant des fenêtres de son atelier qui s’ouvrent sur la Méditerranée. Il innove dans le domaine des arts décoratifs, notamment dans la tapisserie, dont le musée présente un exemple avec cette œuvre réalisée à Aubusson, dont il a fait le carton en 1925. À l’image d’un Jean Lurçat ou... d’un Henri Matisse, il dépoussière le genre et le fait irradier de jeunesse. De 1944 jusqu’à la fin de sa vie, il n’a jamais cessé de créer des cartons tapissiers.

Nous nous trouvons également face à un Dufy illustrateur et décorateur, une facette moins connue.

Ses gravures sur bois témoignent de son talent extraordinaire ; elles furent réalisées pour illustrer Les Bestiaires et Le Cortège d’Orphée de son ami Guillaume Apollinaire. Il imagine aussi des tissus d’habillement et d’ameublement, créant plus d’un millier de modèles qui contribuent à sa reconnaissance internationale. L’exposition à Jules-Chéret montre également quelques belles céramiques.

Photo de Une ©M.L